Formation bruxelloise : le PS mise sur une coalition de gauche et vise un retour à l’équilibre budgétaire en dix ans
À l’arrêt depuis des mois, la formation d’un gouvernement bruxellois pourrait connaître un tournant. Le PS met sur la table une proposition de coalition de gauche. L’objectif est d’avoir un accord d’ici le 21 juillet.
Le PS d’Ahmed Laaouej a récemment présenté une note à cinq partis de gauche (Ecolo, PTB, Groen, Vooruit et la Team Fouad Ahidar) en vue d’un accord de gouvernement pour le 21 juillet, jour de la fête nationale. Le document intitulé “Bruxelles, une région autonome, solidaire et populaire qui protège, répare et cultive”, et dont nous avons pu prendre connaissance, fixe un objectif : ramener la Région bruxelloise à l’équilibre budgétaire en dix ans.
Il s’agit d’une note de cadrage de début de négociation et non un document définitif. Un document qui commence d’ailleurs par dresser un état des lieux de la Région bruxelloise et des priorités du moment. Ahmed Laaouej a articulé ses propositions autour de trois grandes crises : la crise sociale, qu’il attribue à ce qu’il appelle la brutalité économique d’un certain nombre d’opérateurs, la crise climatique et de la biodiversité, et la crise budgétaire qui menace l’autonomie de la Région bruxelloise.”Cette note intègre déjà très fortement des éléments de langage et des préoccupations qui peuvent être ceux du PTB ou de la famille écologiste“, analyse Fabrice Grosfilley, éditorialiste chez BX1.
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Retour à l’équilibre budgétaire en dix ans
Là où les libéraux veulent un retour à l’équilibre budgétaire dans maximum sept ans, la note d’Ahmed Laaouej parle, elle, d’un retour à l’équilibre dans dix ans. Là où la déclaration de politique générale du Mouvement Réformateur parle essentiellement d’économies — 200 millions la première année, 400 millions ensuite, etc. —, la note d’Ahmed Laaouej conjugue, elle, économies et rentrées fiscales. On y parle d’une politique fiscale qui serait davantage redistributive, avec une contribution du capital et aussi une contribution des bénéficiaires des infrastructures bruxelloises qui, aujourd’hui, les utilisent sans rien payer.
Autre grande différence : la politique du logement. Sur les loyers, là où la déclaration de politique générale du MR parle d’assouplir le cadre, la proposition Laaouej parle d’accentuer l’encadrement des loyers, d’offrir des prêts à taux zéro pour acquérir ou rénover un logement, et propose de financer cela par une taxe sur les multinationales du logement Airbnb.
Pour cela, la note propose toute une série de mesures comme un encadrement renforcé des loyers, une réforme des primes à la rénovation pour mieux cibler les ménages précaires, et davantage de logements sociaux écologiques. Le texte évoque aussi la création d’un fonds pour les garanties locatives et une adaptation du PRAS (Plan régional d’affectation du sol) pour mieux répondre aux enjeux climatiques. De plus, le PS entend réduire le trafic de transit par des incitants fiscaux.
Deux visions pour Bruxelles
Les négociateurs bruxellois sont désormais face à deux propositions. “D’un côté, un texte du MR de 80 pages présenté comme une déclaration qui serait quasiment dans sa forme définitive, et de l’autre, une note de cadrage, sept pages seulement, qui est un point de départ de négociation“, constate Fabrice Grosfilley. “On notera par exemple que la sécurité et la propreté occupent tout un chapitre dans la note du MR — ce n’est pas abordé dans la note du PS. À l’inverse, le PS parle de droit à l’épanouissement culturel, de droit aux prestations familiales ou de droit à un revenu minimum, qui sont des concepts qui n’apparaissent pas dans le document libéral.“
“Au chapitre institutionnel, Ahmed Laaouej suggère de supprimer la Cocof et la VGC, et de n’avoir à Bruxelles plus qu’un seul parlement et un seul gouvernement pour tout le monde — francophone ou néerlandophone — avec seulement cinq ministres et plus de secrétaires d’État, alors que du côté du MR, on a plutôt mis l’accent sur la réduction du nombre de conseillers communaux et la création d’un mécanisme de “préférendum” avant les prises de décision“, ajoute-t-il.
Le PS mise sur un accord conclu d’ici au 21 juillet. De leur côté, les partis consultés (PTB, Groen, Vooruit, Team Fouad Ahidar et Ecolo) doivent désormais soumettre la note à leurs instances, avant d’éventuelles nouvelles discussions. En parallèle, le Parlement bruxellois s’apprête à débattre de la proposition du MR. Un mois de juin qui s’annonce déjà sous tension.
■ Analyse de Fabrice Grosfilley, éditorialiste en chef chez BX1