Faillites dans l’Horeca : la crainte de “l’effet retard”
Parkside Brasserie, restaurant connu dans le quartier européen, a annoncé ce matin dans La Capitale avoir déposé le bilan. D’autres ont connu le même sort ces dernières semaines. Mais si beaucoup dans l’horeca sont en grande difficulté financière, le nombre de faillites prononcées reste faible. La levée du moratoire, le 31 janvier dernier, ne se traduit pas encore sur le terrain. Explications.
Dix ans après son ouverture avenue de la Joyeuse Entrée, Parkside Brasserie a fait aveu de faillite, nous confirme Fabien Hermans, de la Fédération Horeca-Bruxelles. Vu la situation difficile dans le secteur, il sera probablement suivi par d’autres, même s’il est difficile d’évaluer dans quelle ampleur. Le nombre de faillites prononcées, en revanche, reste limité, et même exceptionnellement bas, malgré la levée du moratoire sur les faillites le 31 janvier dernier.
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« Nous avons un peu plus de faillites prononcées depuis le 31 janvier, mais cela reste faible. », confirme Paul Dhaeyer, le président du tribunal de l’entreprise francophone de Bruxelles. C’est que si le moratoire légal est levé, le moratoire tacite sur les dettes fiscales et les cotisations sociales est toujours en cours. Il a été prolongé jusqu’au 30 juin. « Or le gros des citations de faillites sont issues du fisc et de l’ONSS, qui représentent 85% des dossiers en insolvabilité. », explique Paul Dhaeyer. Que se passera-t-il une fois que l’Etat va desserrer l’étau ? La fin de l’année risque d’être chargée.
En mars 2021, 599 entreprises ont été déclarées en faillite en Belgique, selon les dernières statistiques publiées par Statbel. Le secteur du transport est le plus touché, avec 223 faillites. La construction (142 faillites) et le commerce (114) arrivent ensuite. Enfin l’horeca, avec 89 faillites. Précision importante : il s’agit bien des faillites prononcées, pas des faillites demandées, difficiles à estimer.
Chiffres historiquement bas
Selon les dernières études de la société d’informations commerciales Graydon, 272 faillites ont été prononcées à Bruxelles au premier trimestre 2021, dont 43 dans l’horeca (contre 111 en 2020 et 138 en 2019). « Ces chiffres sont historiquement bas », commente Eric Van den Broele, directeur Recherche & Développement chez Graydon. La diminution du nombre de faillites se marque plus fortement dans la capitale, que dans les deux autres régions. Notons encore que ces 43 faillites ont entraîné la perte de 167 emplois « ce qui montre qu’elles concernent surtout des entreprises de grande taille, conséquence du fait que le système bruxellois d’aide favorise les petites sociétés. »
Et Eric van den Broele n’est pas optimiste : 20 % des entreprises dans l’horeca sont en sérieuses difficultés financières aujourd’hui malgré les aides régionales. « Le risque c’est qu’une fois que le moratoire sur le fisc et l’ONSS sera levé, et une fois passés les délais de paiement accordés par les administrations créancières, une bonne partie de ces entreprises tombent en faillite. » « On s’attend à une dégringolade au dernier trimestre de l’année. », conclut Eric van den Broele.
Besoins de liquidités
Crainte largement partagée. Le secteur est aujourd’hui très lourdement endetté, malgré les aides, « pour tenir le coup, assurer le payement des charges, du fonctionnement de l’entreprise. », assène Philippe Trine, président de la Fédération Horeca-Bruxelles. Et de donner l’exemple de ce patron à la tête de quatre établissements à Bruxelles, qui a dû engranger 900.000 euros de crédit.
Finance&Invest.brussels a d’ailleurs vu le nombre de demandes de prêt augmenter ces dernières semaines. Il faut dire que le secteur Horeca a de plus en plus de difficultés à obtenir des prêts bancaires classiques. Les prêts de Finance&Invest.brussels permettent de couvrir les dettes du passé (celles dues aux fournisseurs par exemple), les frais fixes qui se poursuivent, et d’aider au redémarrage, détaille le CEO Pierre Hermant. « La relation de confiance entre fournisseurs et clients a été endommagée par la crise, les crédits fournisseurs vont désormais se faire au cas par cas. » alors qu’avant la crise, ce système, basé sur la confiance, consistant pour le fournisseur à se faire payer une fois le produit écoulé par son client, était très répandu. Ce n’est plus le cas. Ces dernières semaines, donc, la liste d’attente des dossiers de demande de prêt s’allonge : « On a reçu énormément de dossiers, une centaine rien que ces dernières semaines », indique encore Pierre Hermant, précisant qu’il s’agit là des dossiers éligibles, pas de l’ensemble des demande. Et plus de 200 prêts ont été accordés ces derniers mois.
S.R. – Photo : Arch. BX1