Depuis 2008, le nombre de personnes sans-abri ou mal logées a presque doublé
Entre 2008 et 2016, le nombre de personnes sans-abri – qu’elles soient dans la rue, des squats ou des maisons d’accueil – comptabilisées dans les communes bruxelloises a pratiquement doublé, ressort-il de la quatrième édition du rapport “Personnes sans-abri et mal logées en Région de Bruxelles-Capitale” publié vendredi par la Strada, le centre d’appui du secteur bruxellois de l’aide aux sans-abri.
Cette importante augmentation a essentiellement été constatée dans les espaces publics (+72%), dans les accueils d’urgence (Samusocial et Pierre d’Angle; +29%), dans les occupations négociées (+42%) et dans les squats (+39%). “Cette augmentation visible cache un phénomène de plus grande précarisation des couches les plus faibles à Bruxelles“, a commenté le directeur de la Strada, Yahyâ Hachem Samii.
Alors que le nombre de places dans les structures d’hébergement reconnues (hors accueil d’urgence) reste stable, le nombre de personnes dénombrées double sur la même période, épinglent les auteurs du rapport. En 2008, 45% des personnes comptabilisées étaient ainsi accueillies dans une structure d’hébergement reconnue contre seulement 25% en 2016.
Pour réaliser son enquête, la Strada a fédéré 150 organismes du secteur de l’aide aux sans-abri et a bénéficié du soutien d’une série de services publics tels que les CPAS, les communes, la Stib et la SNCB. Concrètement, plus de 180 volontaires ont sillonné, de 23h00 à minuit, le 7 novembre 2016, l’ensemble du territoire de la Région bruxelloise afin de compter le nombre de sans-abri et mal logés. Par ailleurs, le secteur de l’hébergement et du résidentiel a fourni les chiffres d’occupation. Cette méthode est identique à celle utilisée lors des recensements précédents, qui ont eu lieu en 2008, 2010 et 2014.
Au total, 3.386 personnes ont été dénombrées cette nuit-là, dont 35% de sans-abri, 25% sans logement et 40% en logement inadéquat. La répartition géographique constitue un élément important de l’étude. La majorité des personnes dénombrées se trouvait en effet hors du Pentagone (44%) et dans les quartiers autres que le centre-ville (32%). “En comparaison avec 2014, nous constatons une diminution de moitié de la présence dans les gares (17% contre 32% en 2014) et dans le centre-ville (7% contre 14% en 2014). Cette baisse est peut-être à mettre en lien avec les mesures de sécurité renforcées et surtout après les attentats de mars 2016”, avancent les auteurs de l’étude.
Pour la première fois, un double recensement a eu lieu. Après celui du 7 novembre 2016, un second a été organisé le 6 mars 2017, alors que le plan hivernal était alors activé. Ce dispositif ouvre jusqu’à 1.348 places dans l’accueil d’urgence, dont 57 en centre d’accueil de crise, 965 en maisons d’accueil et 326 en accueil d’urgence. Il en est ressorti que, malgré le plan hivernal, une personne dénombrée sur 8 se trouvait dans les espaces publics. Environ 25% des personnes dénombrées étaient hébergées dans un des centres du dispositif hivernal. Au total, quelque 4.094 personnes (contre 3.386 en novembre) ont été dénombrées, dont 48% de sans-abri, 21% sans logement et 31% en logement inadéquat. Il est apparu que 653 enfants ont été recensés cette nuit-là, dont 249 dans une situation de sans-abrisme. “Un constat alarmant”, selon la Strada. Le dénombrement de mars 2017 confirme les résultats relatifs à la répartition géographique posés en novembre 2016 puisque la majorité des personnes dénombrées reste hors Pentagone (43%) et dans les quartiers autres que le centre-ville (28%).
Selon les chercheurs, les résultats présentés dans ce rapport offrent un bon aperçu de la diversité des situations de vie et des besoins, mais restent toutefois en dessous de la réalité. Il existe en effet des “zones grises” (squats, personnes cachées, logées chez des tiers,…) dont il est difficile d’avoir une estimation précise. Cette étude est l’occasion pour les professionnels du secteur de rappeler qu’une grande diversité de réponses est nécessaire pour répondre au sans-abrisme. “Il est clair qu’on n’y répond pas d’une seule manière. Il faut développer une collaboration durable sur toute une série de matières, en n’oubliant pas de travailler sur la prévention pour éviter que des personnes ne basculent dans la rue”, conclut le directeur de la Strada. (Belga, photo Belga/Bruno Fahy)
- Découvrez ci-dessous le rapport de la Strada :