CPAS d’Anderlecht: “Toute la lumière devra être faite sur les éventuels dysfonctionnements”, réagit le bourgmestre Fabrice Cumps

“Toute la lumière devra être faite sur les éventuels dysfonctionnements dans la gestion de certains dossiers individuels”, a réagi ce mercredi midi Fabrice Cumps (PS), bourgmestre d’Anderlecht, après la diffusion mardi d’un reportage de la VRT ayant mis en lumière des irrégularités dans l’octroi d’allocations. Il insiste sur la “grande tension” entre les moyens humains et matériels dont le CPAS d’Anderlecht dispose.

Un reportage de la VRT diffusé mardi soir fait état de soupçons d’octrois indus de revenus d’intégration, manifestement par manque de contrôle. L’enquête révèle notamment que des étudiants qui ne sont pas domiciliés dans la commune ont pu bénéficier d’un revenu d’intégration pendant une longue période. “L’octroi des aides sociales par le CPAS d’Anderlecht est en principe réservé aux personnes qui sont domiciliées sur notre territoire après enquête de la police, toute la lumière devra être faite sur les éventuels dysfonctionnements dans la gestion de certains dossiers individuels”, réagit Fabrice Cumps. “La situation est rendue encore plus difficile sur le terrain par la concentration sur notre territoire de structures d’accueil pour personnes fragilisées. Des demandeurs sont en effet inscrits en adresse de référence, en principe celle du CPAS même. Ce sont généralement des personnes sans-abris. Cette situation peut durer de trop nombreuses années, ce qui est inacceptable.”

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Charge de travail

Dans l’enquête de l’émission Panorama, deux membres de la rédaction tous deux domiciliés en Flandre et financièrement à l’aise, sont parvenus à présenter un faux dossier de demande d’aide et obtenir chacun plus de 7000 euros du CPAS d’Anderlecht. L’un a choisi une adresse via Google Maps, l’autre l’adresse d’une amie, un scénario facile à vérifier. Mais la visite à domicile et les enquêtes sociales n’ont pas eu lieu. Pour les travailleurs sociaux, ce manque de contrôles est lié à une charge de travail titanesque. À Anderlecht, ils gèrent jusqu’à 200 dossiers, contre 120 en moyenne dans les autres CPAS bruxellois. En plus des dossiers, les travailleurs sociaux doivent faire entre 20 et 30 visites de domicile par semaine.

“Les services sociaux du CPAS d’Anderlecht sont effectivement sous grande tension”, souligne Fabrice Cumps, qui tient “à saluer les équipes d’assistants sociaux qui dans leur immense majorité font un travail sérieux et de qualité dans des circonstances particulièrement difficiles”, avant d’alerter “quant à l’état de tension entre les moyens humains et matériels dont le CPAS d’Anderlecht dispose en regard des besoins. Dès lors, toutes les éventuelles mesures fédérales visant à renvoyer vers les CPAS la charge de l’accompagnement des usagers exclus du chômage signifieraient – ni plus ni moins – une paralysie totale de nos services sociaux de proximité. Cumps “exhorte les négociateurs fédéraux à renoncer à toute forme de cynisme et résolument se montrer solidaires des ville et communes bruxelloises confrontées à une succession inédite de crises ces dernières années.”

Le socialiste rappelle que différentes mesures organisationnelles ont été prises très récemment.  Un nouveau bâtiment administratif a ainsi été ouvert, des assistants sociaux ont été recrutés et un ombudsman a été engagé. Un plan d’urgence a été également approuvé pour répondre à la nécessité d’accélérer les délais de traitement des dossiers individuels “dans le strict respect du contexte règlementaire”, selon le bourgmestre.

“Je vous le garantis: il y a encore des cadavres dans le placard”

L’échevin des Finances de la commune d’Anderlecht, Bieke Comer (Vooruit), réclame de son côté un “audit financier approfondi” du CPAS de sa commune. Interrogé par Belga, l’édile s’est dit “vraiment choqué” par ces informations.

“Le CPAS est là pour venir en aide aux personnes dans le besoin. Quiconque fraude doit être puni”, juge M. Comer. Celui-ci réclame la conduite d’un audit de l’institution, mais aussi davantage de professionnalisme et de contrôle en son sein. L’élu rappelle que son parti est depuis longtemps en faveur de la mise sur pied d’un CPAS commun pour tout Bruxelles.

L’attribution des revenus d’intégration est décidé par le comité spécial du service social. Cet organe est composé de mandataires politiques locaux. La loi leur accorde une autonomie entière de décision. A Anderlecht, sept membres composent ce conseil, présidé par le président du CPAS, Lofti Mostafa (PS), également président de la société de logements sociaux. Selon son prédécesseur direct, le socialiste Mustapha Akouz, l’institution mériterait également de “faire l’objet d’un reportage entier de Pano”.

Interrogé par VRTNWS, l’ancien conseiller communal d’Anderlecht aujourd’hui député régional Gilles Verstraeten (N-VA) estime que ces irrégularités ne sont pas limitées à sa commune.  “Cela a aussi cours dans d’autres communes, comme Molenbeek ou Bruxelles-ville”, accuse-t-il. “Je vous le garantis: il y a encore des cadavres dans le placard. Il y règne une culture de clientélisme où tout peut être réglé si l’on connaît quelqu’un”.

Face à la polémique, la ministre fédérale sortante de l’Intégration sociale, Karine Lalieux (PS), a décidé de mobiliser l’inspection. “Le CPAS travaille avec l’inspection et l’administration pour trouver des solutions. Si des allocations devaient avoir été allouées de manière injustifiée, il faudra qu’elles soient remboursées”, a commenté la ministre.

Ducarme veut mener des auditions à la Chambre

Le président de la commission des Affaires sociales de la Chambre, Denis Ducarme (MR), veut lui porter au parlement fédéral le dossier de possibles fraudes au CPAS d’Anderlecht, a-t-il annoncé mercredi. Il proposera en début d’après-midi de mener des auditions sur le sujet.

“Ce n’est pas habituel mais au vu de l’ampleur des fraudes et de la non effectivité des contrôles, je voudrais que la commission puisse entendre les deux journalistes qui ont mené cette enquête ainsi que la ministre de l’Intégration sociale”, a expliqué M. Ducarme.

Le chef de groupe N-VA, Theo Francken, et le député Wouter Raskin demanderont une modification de l’agenda afin que la ministre de l’Intégration sociale, Karine Lalieux, donne des explications en commission.

 

BX1 – Belga – Photo Belga

 

 

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20 novembre 2024 - 12h28
Modifié le 20 novembre 2024 - 12h59