Comité de concertation : les chiffres permettent-ils des assouplissements ?

Le Comité de concertation se réunira ce vendredi, au Palais d’Egmont. Après des décisions ajournées, se dirige-t-on vers certains assouplissements ? Les chiffres le permettent-ils ?

Le Comité de concertation entre en réunion ce vendredi, pour faire un nouveau point sur la gestion de la crise sanitaire : sur la table, des mesures d’assouplissements, qui étaient en réalité déjà en ligne de mire la semaine dernière, avant que les discussions ne soient ajournées.

Reportage | Les Bruxellois réagissent à l’absence de décisions lors du dernier Comité de concertation

Ainsi, vendredi dernier, le Comité de concertation avait ajourné ses décisions, les reportant à ce 5 mars : on craignait alors l’amorce d’une troisième vague, alors que le cap des 200 admissions à l’hôpital avaient été dépassé, une première depuis le mois de décembre.

Une meilleure situation épidémiologique ce vendredi ?

La situation a-t-elle changé entre ce vendredi, et la semaine dernière, alors que cette conjoncture avait empêché toute mesure lors du Comité de concertation de vendredi dernier ? “Oui. D’une part, le nombre de contaminations commence à stagner, on a encore une très discrète augmentation, mais on s’attend en cette fin de semaine et ce week-end à avoir un plateau et une diminution la semaine prochaine ; on a encore une augmentation modérée du taux d’hospitalisation, mais là aussi on s’attend logiquement à ce que, dans les huit jours qui viennent, on prenne la direction inverse, et qu’on retrouve une situation plus stable. Elle n’est pas idéale, mais elle est plus stable effectivement“, explique Yves Van Laethem, porte-parole interfédéral Covid-19.

Si l’on regarde les indicateurs cette semaine par rapport à la semaine dernière, ils restent fondamentalement les mêmes, excepté pour le nombre d’admissions à l’hôpital où il y a une augmentation de 20%, et une occupation plus importante des lits de soins intensifs. C’est un phénomène assez bizarre, proportionnellement aux admissions à l’hôpital. Mais si on regarde les autres indicateurs, le taux de positivité reste autour de 6,6%, c’est raisonnable ; le taux de reproduction est assez maîtrisé pour l’instant, et reste autour de 1. Ce n’est pas la flambée qu’on attendait, qui avait été prédis par les modèles mathématiques “, ajoute l’épidémiologiste et professeur de santé publique, Yves Coppieters (ULB).

Néanmoins, les craintes importantes face aux admissions, vendredi dernier, semblent balayées. “C’est toujours à suivre, mais ça n’a pas explosé. La crainte était effectivement de voir une augmentation brutale à la fin de la semaine dernière, qu’on soit au début d’une troisième vague extrêmement rapidement : ce n’est clairement pas le cas, nous n’avons pas de troisième vague. Nous sommes toujours sur ce plateau, difficile à maintenir“, indique Yves Van Laethem.

Interview complète d’Yves Van Laethem, porte-parole interfédéral Covid-19

Des assouplissements sont-ils désormais possibles ?

Lors du Comité de concertation de ce vendredi, des assouplissements sont sur la table, et souhaités par plusieurs membres du Codeco. Mais la situation sanitaire les permet-ils ? “En tout cas, elle ne les exclut plus : on est dans une situation où le contexte global doit de nouveau être repris en considération (…) On n’est plus dans une situation comme la semaine dernière, où toute mesure, même bienvenue pour la psychologie, est dangereuse pour la santé“, explique Yves Van Laethem.

Duplex | Le Comité de concertation va-t-il prendre des décisions ce vendredi ?

Yves Coppieters insiste également sur le fait que cette décision est politique, même si “sur un plan social, des assouplissements sont nécessaires. Bien sûr, on peut toujours garder un principe de précaution, en se disant qu’au plus on reste dans des mesures fortes, au moins on aura de transmissions, mais il faut voir l’ensemble de la réalité de la situation“, explique-t-il, “Je pense qu‘il y a moyen de trouver des activités de relâchement, des bulles d’oxygène, à moindre risque : les activités en extérieur, le retour à des activités pour les jeunes qui sont eux à moindre risque, et le fait qu’ils soient testés au maximum lorsqu’ils retournent sur les campus universitaires et les hautes écoles. Et cela passe aussi par toute une série de sous-secteurs qui sont capables de mettre en place des protocoles efficaces : on l’a bien vu, la reprise de la culture entre les deux vagues n’a pas entraîné de réaugmentation, en tout cas ce n’est pas l’origine de la seconde vague“.

Interview complète d’Yves Coppieters, épidémiologiste et professeur de santé publique (ULB)

En ligne de mire : l’extérieur, et l’enseignement

Parmi les deux grands points qui devraient être abordés lors du Comité du concertation, on retrouve les activités en extérieur, et l’enseignement. Des assouplissements sont envisagés dans ces deux domaines, et pourraient être entérinés dès ce vendredi.

Les activités en extérieur

Jeudi, le Premier Ministre, Alexander De Croo, annonçait à la Chambre l’élaboration d’un “plan plein air”, afin de donner des perspectives aux activités en extérieur.

Article | Alexander De Croo annonce un “plan plein air” pour les activités en extérieur

En extérieur, on irait ainsi vers un élargissement de la bulle en extérieur : de quatre personnes aujourd’hui, on pourrait passer à huit ou dix personnes, avec port du masque. “Si elle est bien maîtrisée au sein de la population, et qu’il ne se passe pas n’importe quoi en extérieur, cette décision est relativement neutre d’un point de vue épidémiologique. On sait bien qu’à l’extérieur, le risque de contamination existe, il n’est pas nul, et c’est pour cela qu’il faut faire attention à ce que l’on fait en extérieur aussi, mais il est fortement diminué par rapport à l’intérieur. On peut espérer que si le beau temps de printemps, qui pointera le bout de son nez dans quelques semaines, est parmi nous, ceci pourrait aider à retrouver un certain équilibre, et à moins se retrouver face à un mur, avec un risque mineur de contamination“, explique Yves Van Laethem.

Dans le cadre du plan Plein Air, on verrait également la reprise, dans un second temps, de certaines activités en extérieur, comme les terrasses ou certains sports. Les élèves du primaire et du secondaire pourraient également profiter d’une excursion en plein air par mois.

L’enseignement

Au niveau de l’enseignement secondaire et supérieur, les gouvernements des différentes communautés se sont accordés autour d’une volonté d’un retour au présentiel à 20% pour le 15 mars. Cet accord devra être validé, ou non, par le Comité de concertation ce vendredi.

C’est envisageable : on sait que, dans l’enseignement supérieur, lorsque les choses sont bien appliquées, et elles le sont, le risque de contamination n’est pas tellement lors de l’enseignement, mais dans les activités autour de l’enseignement. Cet enseignement, qui est effectivement important, voire indispensable pour les premières années par exemple, qui n’ont pas encore l’habitude de l’enseignement supérieur, indispensable pour faire son année correctement, il ne faut pas qu’il entraîne des dérives à l’extérieur des cours, parce que c’est là que le problème peut se situer. Mais dans les cours eux-mêmes, c’est parfaitement maîtrisable“, nous explique Yves Van Laethem.

Pour mettre en place cette reprise progressive du présentiel dans l’enseignement supérieur, Yves Coppieters plaide pour davantage de testing, “la responsabilité des universités sera de mettre à disposition un testing beaucoup plus accessible. L’étudiant, au moindre doute, au moindre symptôme, devra pouvoir facilement se faire tester sur son campus, à moindre coût“. Un focus important, selon l’épidémiologiste, doit aussi être prévu sur le suivi des contacts.

Pour les autres, des perspectives

Néanmoins, il ne devrait pas y avoir de décision concernant une reprise des voyages non-essentiels. Quant à l’horeca, la culture ou l’événementiel, leur déconfinement ne semble pas sur la table du comité de concertation de ce vendredi, mais davantage, peut-être, de perspectives.

Mais est-ce que la situation actuelle est suffisamment stable pour pouvoir annoncer des perspectives, ce vendredi ?

“Le gouvernement l’avait annoncé, avant le stop qu’il y a eu la semaine dernière, qu’il faudra attendre 3 semaines à 1 mois pour avoir une meilleure idée globale de l’évolution des contaminations en Belgique et de l’impact des variants, et de l’impact de la vaccination. On a fait un reset de la vaccination, qui devrait s’accélérer dans les semaines à venir. L’impact des variants n’est pas pour l’instant trop important, même si le variant anglais est maintenant la souche dominante dans notre pays, donc il y a peut-être moyen de donner des perspectives, sachant bien sûr qu’un signal négatif pourrait reporter cette perspective. Mais en tout cas, un objectif dans autant de temps est envisageable, mais c’est une décision politique“, confirme le porte-parole interfédéral  Yves Van Laethem.

C’est la responsabilité de nos décideurs de donner des perspectives claires, comme on le voit maintenant en France, en Italie, ou dans d’autres pays européens, où les gouvernements ont donné des dates, des échéances. Bien sûr, elles pourront être revues sur la situation épidémiologique s’aggrave, mais je pense tous ces secteurs doivent se préparer, et des échéances à la mi-avril ou fin-avril sont tout à fait raisonnables par rapport à une reprise partielle des activités : les terrasses (…), etc en attendant une couverture vaccinale la plus maximale possible“, ajoute Yves Coppieters.

 

Arnaud Bruckner – Photo : Belga (archives)