Pas d’interdiction de vols de nuit, mais une baisse des nuisances sonores : la Région bruxelloise n’exclut pas un recours

Le gouvernement flamand a octroyé vendredi à Brussels Airport un nouveau permis d’exploitation. Celui-ci n’y interdit pas les vols de nuit. Il prévoit toutefois une réduction de 30% des nuisances sonores d’ici 2032, a annoncé la ministre flamande de l’Environnement, Zuhal Demir (N-VA).

Le permis, délivré pour une période indéterminée, prévoit ainsi l’introduction de manière progressive de nuits silencieuses les week-ends.

La ministre flamande a également fixé un plafond de 240.000 mouvements d’avions par an à partir de 2032, ce qui rend possible un scénario de croissance de l’aéroport de l’ordre de 13%.

A l’heure actuelle, Brussels Airport enregistre 212.000 mouvements (2023) par an.

Le plafond de 240.000 fixé vendredi est supérieur à la limite de 234.000 mouvements recommandée par la commission régionale d’avis en matière d’environnement, la GOVC.

Les conditions du permis sont “un carcan viable”

Les conditions sont un carcan, mais à première vue un carcan viable“, a réagi vendredi DHL à l’annonce de l’octroi par le gouvernement flamand d’un nouveau permis d’exploitation à Brussels Airport. Cela aura “inévitablement” un impact sur l’organisation du réseau, prévient l’entreprise de logistique, qui assure qu’elle s’adaptera afin de poursuivre ses activités à partir de Zaventem.

Le transporteur express DHL a réagi de manière “modérément positive” aux nouvelles conditions. Elles impliquent en effet des restrictions supplémentaires en ce qui concerne le nombre d’heures disponibles pour le décollage et l’atterrissage, en particulier les week-ends. En outre, les conditions limitent l’utilisation de certains types d’avions, spécifiques à l’aéroport de Bruxelles, pointe l’entreprise de logistique.

Cela aura inévitablement un impact sur l’organisation de notre réseau. Il faudra déployer des efforts considérables pour aligner les connexions mondiales aux conditions renforcées“, analyse Lorenzo Van de Pol, porte-parole de DHL Aviation. “À première vue, les conditions sont un carcan pour DHL, mais un carcan viable. Il nous semble logique que des efforts soient demandés à tout le monde et nous déploierons ces efforts, notamment parce que nous constatons que le permis recherche un équilibre subtil entre les intérêts de l’aéroport, de l’économie et de l’environnement.”

DHL va à présent analyser les conditions du permis plus en détail afin d’en déterminer l’impact global, qui “n’est pas encore tout à fait clair“. Une procédure européenne doit maintenant évaluer de manière plus approfondie toutes les mesures et conditions proposées avant qu’elles n’entrent en vigueur.

À l’issue de cette procédure et de cette évaluation, DHL Express adaptera son organisation afin de poursuivre ses activités à partir de Zaventem. D’ici là, rien ne changera pour les clients de l’entreprise.

Woluwe-Saint-Lambert réagit

Du côté des communes touchées par les nuisances sonores, les réactions ne se sont pas faites attendre. Le bourgmestre de Woluwe-Saint-Lambert Olivier Maingain (DéFI) a déclaré dans un tweet qu’il “chargera l’avocat de sa commune d’examiner tous les moyens juridiques pour attaquer le permis d’environnement” de Brussels Airport.

Même chose du côté du ministre bruxellois de l’Environnement Alain Maron :

https://twitter.com/alainmaron/status/1773692895897207242

La délivrance du nouveau permis d’environnement à l’exploitant de l’aéroport national ne protège pas suffisamment la santé et le bien-être des riverains, selon Alain Maron. Si l’analyse en profondeur le confirme, il sera proposé au gouvernement bruxellois d’aller en recours, a-t-il déclaré.

Pour celui-ci, la Flandre avait l’occasion d’aller plus loin afin de protéger la santé et la qualité de vie de l’ensemble des personnes concernées par le survol. Dans un communiqué, M. Maron a rappelé que le gouvernement bruxellois avait demandé, dans son avis officiel, que le nouveau permis d’environnement prévoie notamment de limiter le nombre de mouvements d’avions à 220.000 par an; de faire respecter les normes de bruit bruxelloises pour limiter les nuisances sonores; et de supprimer les vols de nuit.

L’exécutif de la Région-capitale avait également demandé d’imposer un renouvellement de la flotte pour des avions moins bruyants. Selon le ministre bruxellois, l’avis de l’administration flamande du 15 mars dernier allait globalement dans le même sens, avec un peu moins d’ambition.

Une “mascarade”, selon Benoît Cerexhe

Le permis d’Environnement délivré par le gouvernement flamand à l’exploitant de l’aéroport national, “sur le dos des habitants qui subissent un survol bien trop intensif depuis 20 ans au moins” est une “mascarade“, a déploré vendredi le bourgmestre de Woluwe-Saint-Pierre, Benoît Cerexhe (Les Engagés).

Tous les recours possibles” seront introduits, a-t-il annoncé dans un communiqué.

Pour M. Cerexhe, le plafond de 240.000 vols par an fixé par la ministre flamande de l’Environnement Zual Demir (N-VA) à partir de 2032, permet encore un scénario de croissance de 13 % par rapport aux 212.000 mouvements de 2023. Le permis impose par ailleurs une réduction de 30% du nombre de personnes gravement privées de sommeil d’ici 2032.

Nous demandions un plafond à 220.000 mouvements par an, l’interdiction des vols de nuit de 22h à 7h, et l’interdiction d’accès à l’aéroport pour les avions les plus bruyants“, a énuméré le bourgmestre.

La Commission régionale flamande des permis environnementaux proposait de rendre un avis favorable sous conditions pour Brussels Airport, de limiter le nombre de mouvements à maximum 234.000 à partir de 2030, et surtout de durcir progressivement le principe des nuits silencieuses le week-end. Cette commission suggérait de n’autoriser, dès 2026, ni décollage ni atterrissage entre 1h et 5h du matin les vendredi, samedi et dimanche. À partir de 2030, l’interdiction serait d’application de 23h à 7h, avec quelques exceptions.”

Mais il n’en est rien. “Madame Demir agit, guidée uniquement par les intérêts de l’aéroport“.

M. Cerexhe a demandé au ministre-président bruxellois d’activer la procédure en conflit d’intérêt et de saisir sans délai le Comité de concertation.

Le bourgmestre attend une réaction du ministre fédéral de la Mobilité, Georges Gilkinet (Ecolo). “Il a l’occasion de convaincre que sa volonté d’interdire les vols de nuit via les “quota count” n’était pas qu’un effet d’annonce“.

■ Reportage de Maria Bemba, Karim Fahim et Hugo Moriamé 

Belga – Photo : Belga

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29 mars 2024 - 10h41
Modifié le 29 mars 2024 - 18h21