Un nouveau monde et la bannière européenne, l’édito de Fabrice Grosfilley
Ce mercredi, Fabrice Grosfilley évoque dans son édito le nouveau calendrier pour la transition énergétique sur fond de guerre en Ukraine et d’élargissement de l’OTAN.
La guerre en Ukraine, c’était d’abord un choc, un traumatisme. C’est comme cela que nous le ressentions il y a deux mois et demi. Aujourd’hui, c’est surtout un grand coup d’accélérateur. Et il touche tous les domaines.
Ce mercredi, la présidente de la Commissio, Ursula von der Leyen a ainsi annoncé un nouveau calendrier pour la transition énergétique. L’idée est désormais de porter à 45% la part d’énergie renouvelable dans la Commission européenne d’ici 2030. Dans moins de 8 ans donc. Nous étions avant le début du conflit sur un objectif de 32%, nous étions passés le mois dernier à 40%, on parle dorénavant de 45%. Pour cela, la présidente de la Commission propose de rendre obligatoires les panneaux photovoltaïques sur tous les bâtiments neufs d’ici 2025, c’est dans 3 ans, pour les constructions publiques ou commerciales, et d’ici 2029, c’est dans 7 ans, pour les maisons privées. La Commission se prépare à investir 210 milliards de plus dans cette stratégie énergétique. Et elle souhaite que nous puissions baisser notre consommation de 13% d’ici 2030, ce qui veut dire des économies d’énergie qui vont toucher tout le monde. Y compris vous qui êtes en train de me lire ou de me regarder.
Autre accélération sur le terrain militaire cette fois. La Commission européenne, toujours, a annoncé la mise en place d’une task force pour les achats militaires. En clair, la Commission va coordonner l’achat de matériel et de munitions. Elle va même passer commande au nom des états membres, comme elle l’avait fait pour les vaccins. Là, ce sont 500 millions d’euros qui sont annoncés dans les 2 années à venir. Avec comme priorité le remplacement du matériel obsolète, hérité de l’époque soviétique et qui est encore utilisé dans certains pays de l’ancienne Europe de l’Est. Que l’Europe coordonne et commande dans un domaine aussi sensible que des achats militaires est une avancée inouïe. Quelque chose qui était inimaginable il y a quelques mois.
Vous ajoutez des États membres comme la Belgique qui sont en train de revoir leur budget militaire à la hausse. D’autres comme la Suède ou la Finlande qui décident de s’affilier à l’OTAN et vous comprenez qu’il est en train de se passer quelque chose d’extrêmement important sur notre continent. Après des décennies de désescalade, l’investissement militaire est en train de redevenir une priorité. Si depuis sa création, l’Union européenne, depuis près de 60 ans, a surtout été vue comme une manière de construire un espace de paix et de prospérité au départ d’une logique de marché unique, les Européens sont en train de prendre conscience que ça ne suffit plus. Ça, c’est plus qu’un coup d’accélérateur, c’est un tournant de l’histoire et nous sommes en train de le vivre en direct.
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Ces bouleversements, on n’en mesure pas encore toutes les conséquences. Mais ils nous mettent en face d’une réalité qu’on a sans doute un peu de mal à verbaliser. C’est que si nous ne sommes pas formellement en guerre avec la Russie, ce conflit nous touche malgré tout de très près. Au niveau économique, énergétique, politique, et même au niveau militaire puisque nous nous mettons à acheter et à produire des armes. Prochaine étape, la technologie. La Russie de Poutine annonce aujourd’hui avoir mis au point des armes lasers capables de détruire des drones ou des avions. Il flotte dans l’air un parfum de course à l’armement. Ajoutez un ralentissement de la production agricole, des échanges commerciaux qui deviennent moins naïfs et le glas d’une certaine idée de la mondialisation. Nous sommes en train de changer de monde. C’est important d’en être conscient.
■ Un édito de Fabrice Grosfilley