Rue de la Loi : sous pression, Bruxelles s’octroie un jour de plus (et se déchire sur l’école bilingue)
C’est l’heure des derniers arbitrages. Les négociateurs bruxellois sont désormais à portée de main d’un accord. Mais comme pour un marathon ou une étape alpine de tour de France les derniers décamètres sont toujours les plus difficiles.
En entrant en négociation ce lundi midi plusieurs négociateurs voulaient croire qu’un accord définitif était possible avant la fin de journée. Rudi Vervoort, au micro de BX1, se voulait plus prudent «cela dépendra de la dynamique de l’après-midi, mais je pense que l’accord nécessitera de trancher encore quelques points demain ». Se laisser de l’air et ne pas s’enfermer dans un calendrier trop serré ou euphorique, la ligne du ministre-président et de son entourage ne change pas. A juste titre : quelques heures plus tard les négociateurs annonçaient un brusque coup de frein et la suspension de la réunion en cours. En cause une nouvelle demande de l’Open VLD pour intégrer le MR dans les négociations, pour les uns, ou un travail compliqué à faire en fiscalité pour d’autres. Les deux versions sont plausibles et permettent à tous les acteurs de ne pas devoir assumer ouvertement le poids de cette crise innatendue.
En théorie les négociateurs auraient dû mener un double travail. L’un sur le contenu de l’accord de gouvernement (il faut résoudre les derniers points laissés en suspens et se mettre d’accord sur la communication de l’ensemble), l’autre sur la physionomie de la future équipe gouvernementale (comment regroupe-t-on les compétences et qui les obtient). Inévitablement les deux discussions se croisent. La discussion sur les paquets de compétences a déjà été entamé (nous expliquions vendredi dans le 18h de BX1 que des rencontres bilatérales avaient été organisées par le formateur avec chacune des formations sur cette question, ce qu’on appelle en négociations la technique du confessionnal, pour tenter de déminer le terrain) mais ne débouche pas encore sur un accord. Lundi après-midi les travaux autour de la note régionale ont finalement été suspendus, et les négociateurs se concentraient sur la note de la Cocof, le temps que des groupes techniques tentent de déminer les dernières difficultés. Une nouvelle réunion plénière était convoquée pour mardi. Les congrès de participation étaient reportés à mercredi. La négociation venait de prendre un jour de retard.
Des positions pas insurmontables…
A l’entrée de la réunion lundi midi les écarts de position ne semblaient pourtant pas insurmontables. Deux dossiers étaient mentionnés publiquement (il n’est pas exclu qu’il en existe davantage) : sur la fiscalité et l’enseignement. Le débat sur la fiscalité concerne notamment la réduction des droits d’enregistrement pour l’achat un premier bien (l’abattement est de 175 000 euros depuis janvier 2017 à condition d’y établir sa résidence principale, comment évaluer l’efficacité de cette mesure et faut-il l’étendre ou la lier à l’efficacité énergétique du bâtiment ? ) .
Celui sur l’enseignement vise à permettre la création d’écoles bilingues, une idée portée par les recteurs de la VUB et de l’ULB qui se proposent d’en être les parrains. L’idée est de doté, au moins à titre expérimental, la région bruxellois d’une école vraiment bilingue, qui traiterait Français et Néerlandais à égalité. Les socialistes et écologistes bruxellois des deux communautés étaient plutôt enthousiastes « ce sont nos enfants, sur notre territoire, il faut qu’on les aide pour trouver un boulot dans leur région commentait Fouad Ahidar pour One.Brussels (le SPA) si On imaginait que la COCOM (commission communautaire commune ) pouvait servir ce dossier. Olivier Maingain pour Défi semble y avoir mis un frein, estimant que ce n’était pas le rôle de la Cocom : « renforcer l’enseignement des langues est indispensable, de là à s’engager dans la voie de la régionalisation de l’enseignement ce n’est pas du tout notre choix » et plaidant pour qu’on parle de multilinguisme et pas seulement de bilinguisme. Rudi Vervoort tranchait le débat ainsi « l’idée n’est pas d’aller vers une régionalisation mais d’amener autour de la table les deux communautés ». Traduction : le projet d’école bilingue reste sur la table… mais la Région Bruxelloise ne forcera pas le passage pour l’imposer.