Rue de la Loi : ce que mesurent les sondages
Essayer de prévoir les résultats d’une élection à l’avance, c’est ce qu’essaye de faire les instituts de sondage. Tout au long de l’année des baromètres tentent de prendre le pouls de l’opinion. Les sondages publiés à l’approche du scrutin sont évidemment regardés avec encore plus d’intérêt que les autres.
Même si les partis politiques disent les prendre avec distance, en réalité ils adaptent leur stratégie à ce que disent ces sondages. Ces sondages vont donc créer un climat. Il donne aux uns le sourire du vainqueur, à l’autre la grimace de la défaite. Ils nourrissent les commentaires de la presse et galvanisent ou démoralisent les militants. Pourtant ces sondages ne sont jamais justes, au mieux ils s’approchent de la réalité électorale. Pourquoi s’en soucier ? Parce que intérêt d’un sondage est de donner une tendance. Plus que le score réel c’est donc la progression ou le recul d’une formation que les instituts permettent d’anticiper
En Belgique francophone les sondages politiques restent des évènements (il y en a deux principaux : celui d’Ipsos avec RTL et Le Soir, et son concurrent publié par La Libre Belgique et la RTBF). En temps normal il ne s’en publie plus que 4 ou 5 par an. C’est une situation très différente des Etats-Unis où même de la France où l’on oublie des sondages intentions de vote chaque semaine, et même tous les jours lorsqu’on approche d’une élection présidentielle. La raison de cette rareté relative est simple, ces sondages ont un coût. Si on veut qu’ils soient faits sérieusement ce coût se chiffre en dizaine de milliers d’euros annuels, raison pour laquelle les médias se regroupent de plus en plus pour les publier.
Quelques précautions à vous rappeler encore et encore : un sondage ne mesure que des intentions de vote. L’intention n’est pas l’action, jusqu’au dernier moment l’électeur peut modifier sa décision. Deuxième remarque le sondage se base sur une part infime du corps électoral. Il y a en Belgique 8 millions d’électeurs inscrits. La plupart des sondages sont réalisé sur l’interrogation de 2000 ou 2500 personnes. Le problème est encore plus aigue pour la région Bruxelloise où habituellement les instituts de sondage interrogent entre 500 et 700 personnes. Ajoutez la complexité linguistique (puisqu’à Bruxelles on peut voter coté francophone ou néerlandophone) et vous comprendrez que ces résultats sont évidemment à relativiser. Au delà du nombre de personnes interrogées c’est le savoir-faire du sondeur, sa capacité à constituer un échantillon vraiment représentatif et à bien analyser les chiffres qui fera la qualité du sondage. Tous les instituts ne se valent évidemment pas.
Pour bien analyser un sondage vous devez aussi vous assurer que le commanditaire est neutre (il n’est pas rare que des partis politiques commandent eux-mêmes des sondages… et en propose la diffusion à la presse quand ils leurs sont favorables). Mais surtout vous devez regarder les dates auxquelles il a été réalisé. Entre l’enquête de terrain, et la publication ( si les choses sont faites sérieusement) il faut au minimum une à deux semaines, pour traiter les résultats. Cela veut dire par exemple que les sondages qui vont sortir maintenant ou dans les prochains jours, ont été réalisés avant l’affaire du tract aux couleur d’Ecolo distribué au marché de Laeken. Or c’est typiquement le type d’événement qui peut influencer le choix des électeurs. Une campagne électorale ressemble de ce point de vue à une étape de tour de France. Franchir les sprints intermédiaires en tête c’est bien, mais au final c’est la ligne d’arrivée qui compte. Une élection ne se gagne et ne se perd pas dans les sondages. Mais le jour du scrutin.