Recherche enseignants désespérément, l’édito de Fabrice Grosfilley
Ce vendredi, Fabrice Grosfilley évoque dans son édito l’enseignement et la pénurie d’enseignants.
Manque-t-on d’enseignants dans nos écoles ? Oui, mais pas plus que d’habitude. Peut-on pallier cette pénurie ? Sans doute, mais ça coûtera de l’argent.
Si vous êtes enseignants, élèves, parents d’élèves, grands-parents, bref, concerné de loin ou de près par ce qui se passe dans les écoles, vous avez sûrement entendu parler de la pénurie d’enseignants. Alors est-ce que cela existe ? Oui. Est-ce que le phénomène est en augmentation ? Apparemment non, d’après la ministre Caroline Désir. Il n’empêche que cette situation est évidemment dommageable et que les premiers à en subir les conséquences sont les enfants et les adolescents. Et le phénomène n’épargne pas les écoles néerlandophones. La communauté flamande rechercherait près de 10 000 enseignants, et rien que parmi les annonces du VDAB, l’équivalent d’Actiris, on recense 4.000 propositions.
La situation est donc critique dans l’enseignement néerlandophone et elle est tendue dans l’enseignement francophone. Côté francophone, parmi les jeunes diplômés, un enseignant sur trois quittera le métier dans les cinq ans qui suivent sa nomination. Cela représente assez bien l’âpreté de cette profession où l’on est confronté à la dureté des élèves, à l’interventionnisme des parents, à des salaires qui ont l’avantage d’être stables, mais pas mirobolants, et toute une série de difficultés : les nouveaux programmes qu’on doit assimiler pour cause de réforme, les transports kafkaïens quand on doit cumuler deux heures dans une école et trois heures dans une autre et qu’on a toute la ville à traverser.
Il ne faut pas jouer au Bisounours et penser que la situation va se corriger toute seule. Côté francophone, elle va même devenir encore plus compliquée, avec le Pacte d’excellence, il faudra dans les prochaines années engager davantage d’enseignants, en particulier en géographie ou en langues étrangères, qui sont les matières où la pénurie se fait le plus sentir. Et pour cela, il n’y a pas d’autres solutions que de rendre la profession plus attractive.
Ce matin, la ministre de l’Éducation a laissé entrevoir une piste de solution. Avec une plus grande mobilité entre les réseaux, pour que les enseignants puissent passer d’un pouvoir organisateur à un autre. Mais aussi une meilleure reconnaissance de l’ancienneté pour ceux qui viennent à l’enseignement dans une seconde ou troisième partie de carrière, histoire de ne pas recommencer à zéro alors qu’on a déjà 40 ans ou plus. Enfin, la création d’un pool de réserve, avec des enseignants qui pourraient être envoyés vers les écoles où l’on manque de bras, est sur la table. Toutes ces mesures demanderont un investissement. Raisons pour lesquelles elles doivent encore être validées, la semaine prochaine, en gouvernement de la fédération.
Certes, l’enseignement en Fédération-Wallonie-Bruxelles nous coûte très cher. Certes, il n’est pas le plus performant du monde. Avec des niveaux de connaissance très moyens, des inégalités sociales qu’on ne corrige pas, beaucoup de démotivation parmi les enseignants. Il y a sûrement énormément de choses à corriger. Mais une société qui n’investirait plus dans l’enseignement est une société qui se condamnerait à être moins performante. C’est le grand paradoxe des francophones : c’est aujourd’hui le niveau de pouvoir le plus important pour notre avenir qui est aussi le désargenté.
■ Un édito de Fabrice Grosfilley