L’édito : notre fragilité énergétique
Que se passerait-il si nous devions être un jour privés d’énergie ? Ce mercredi midi, une partie des Bruxellois ont pu avoir un avant-goût de la situation, à la suite d’une gigantesque panne de courant.
Cette panne, elle est intervenue à la mi-journée, sur les communes d’Evere et Schaerbeek. Au total, une cinquantaine de rues privées de courants. En amont, un “poste de fourniture” explique Sibelga, avec un câble victime d’une surchauffe. Un câble de secours aurait dû prendre le relais mais il s’est révélé défectueux. Ce sont au total une trentaine de cabines hautes tensions qui dépendaient de ce poste de fourniture qui se sont retrouvées privées de courant.
Cette panne n’a duré que deux heures pour une partie des quartiers concernés, dans d’autres zones elle a duré tout l’après-midi. Plusieurs dizaines de milliers de Bruxellois ont donc pu en mesurer les effets concrets. Des couloirs plongés dans le noir, des frigos qui s’arrêtent, parfois des ascenseurs, des feux rouges qui passent à l’orange clignotant, etc. Si dans la plupart des services sensibles des systèmes de batteries ou des groupes électrogènes ont pris le relais, on n’est jamais à l’abri de défaillances en chaîne. A la RTBF, l’un des groupes électrogènes a explosé, il a fallu appeler les pompiers et le journal télévisé de 13h a même été brutalement interrompu.
Cet incident, qui n’est pas trop grave, nous permet de mesurer notre dépendance à l’électricité. Si demain il n’y a plus de courant, que pouvons nous encore faire ? Cette question, il est intéressant de se la poser dans le contexte que nous connaissons. Que ce soit dans une perspective positive : quelles sont les automatisations parfois superflues dont nous pourrions nous passer si nous souhaitons économiser l’énergie ? Ou dans un perspective moins positive, et peut être un peu angoissante : que ce se passerait-il en cas de délestage, cette stratégie qui consiste à couper le courant quelques heures pour éviter un black out complet en cas d’alimentation insuffisante ou d’incident majeur quelque part sur le réseau électrique ?
Ce délestage est très théorique, je vous rassure. Mais on a quand même compris qu’avec la guerre en Ukraine, ce scénario ne doit plus être complètement évacué. Si l’Union européenne devait réellement, demain, se passer du gaz et du pétrole russes, l’alimentation électrique de nos voisins allemands par exemple serait probablement compromise. Ce serait de notre responsabilité et de notre sens de la solidarité de partager une partie de l’électricité produite en Belgique avec les pays limitrophes. Ce scénario qui pouvait paraître de la science-fiction il y a quelques mois ne peut pas être totalement exclu. Ces plans d’urgences européens existent bel et bien pour l’électricité, mais aussi pour le gaz naturel.
Si vous prenez la peine d’y réfléchir deux minutes, nous sommes donc hyper dépendants des différentes sources d’énergie mises à notre disposition. L’électricité pour s’éclairer et faire tourner toute une série d’équipements domestiques, le carburant pour se déplacer, le gaz pour se chauffer. La panne de ce mercredi, outre qu’elle aura permis de vérifier si les équipements de secours étaient opérationnels ou pas, doit nous servir d’avertissement. Nous sommes, collectivement, vis-à-vis de l’énergie, dans une situation de grande dépendance, et même de grande fragilité.
■ Un édito de Fabrice Grosfilley