Le couard et la racaille, l’édito de Fabrice Grosfilley

Ce lundi, Fabrice Grosfilley évoque dans son édito la tentative de meurtre dans la station de métro Rogier, vendredi dernier.

L’image a fait le tour des réseaux sociaux, la Une des journaux télévisés et elle est encore dans la presse écrite ce matin. Ce qui s’est passé, dans la station de métro Rogier, vendredi soir pourrait être un banal fait divers s’il n’avait pas secoué considérablement de très nombreux Bruxellois et en particulier tous ceux qui empruntent les transports en commun.

Si cet homme, qui pousse une femme sur les rails, au moment où la rame entre en gare, nous choque autant, c’est parce que nous pouvons évidemment tous nous identifier à la victime et nous révolter face à la lâcheté. Il n’y pas de mort plus révoltante que celle d’une victime qui est dans l’incapacité de se défendre, attaquée par surprise, sans avoir ni le temps, ni les moyens de réagir. Pas de plus grande bassesse que celle qui consiste à attaquer par-derrière une proie sans défense et à s’enfuir sitôt son méfait accompli.

Cette indignation se couple à cette interrogation sans réponse, pourrions-nous, nous aussi nous retrouver à la place de la victime ? Un de nos proches, une de nos connaissances, pourraient-ils être celui ou celle qui poussera vers une mort quasi-certaine ? Ce frisson est comparable à celui que nous avons pu ressentir lors des attentats du 22 mars lorsque la mort est aussi violente qu’aveugle, où les victimes n’ont pas d’autres torts que d’être au mauvais endroit, au mauvais moment. De croiser la route d’un fou de Dieu, ou peut-être d’un fou tout court.

L’enquête ou ce que nous en savons à ce stade ne nous permet pas beaucoup de commentaires. Si ce n’est que sans le freinage d’urgence activé par le conducteur de la rame, l’attentat aurait été fatal. Comment l’agresseur a-t-il choisi sa victime, avec quels mobiles… On attend ce lundi soir que l’enquête nous en dise un peu plus.

Dès samedi, un homme politique tweetait un message qui dénonçait la racaille non éduquée et appelait à la tolérance zéro. La doctrine de la tolérance zéro, est celle qui veut qu’on n’accorde aucune circonstance atténuante et qu’une politique de peines maximales systématiques enraye le sentiment d’impunité. Quant au mot “racaille”, le mot n’est évidemment pas choisi au hasard. Il désigne la partie du peuple, la plus pauvre, la plus méprisable, nous dit le dictionnaire de l’Académie française. On doit son utilisation politique à Nicolas Sarkozy lors d’une visite à Argenteuil en 2005. Attribuer aux jeunes des banlieues, le terme de “racaille” les mettre au ban de la société française. Deux jours plus tard, de violentes émeutes avaient embrasé les banlieues françaises.

Ce vendredi soir, on doit quand même souligner que l’agresseur était un homme de nationalité française, originaire de Lorraine, âgé de 23 ans. Et que son prénom est Benjamin. Le conducteur de métro lui, il s’appelait Youssef.

■ Un édito de Fabrice Grosfilley