La leçon de politique, l’édito de Fabrice Grosfilley

Ce mercredi, Fabrice Grosfilley évoque dans son édito le discours d’Alexander De Croo à l’UCLouvain sur le manque de communication entre les présidents de partis francophones.

« Le fait que les présidents de partis se voient sur des plateaux de télévision pour s’engueuler, c’est un problème. » La petite phrase est signée Alexander De Croo, Premier ministre du gouvernement fédéral. Elle est directement adressée aux présidents de partis francophones. Après les étudiants néerlandophones, les francophones. Ce mercredi, Alexander De Croo prononçait un cours magistral devant les étudiants de l’UCLouvain, comme il l’avait déjà fait il y a quelques jours devant ceux de l’Université de Gand.

L’occasion pour le Premier ministre de s’adresser aux étudiants donc. Mais aussi et surtout d’envoyer un petit message à ses partenaires de majorité. “À sept partis, nous avons un gouvernement de centre avec des partis qui ont chacun leur particularité. À moi de construire le consensus“, a-t-il expliqué, avant de glisser quand même que ce qu’on attend du monde politique ” c‘est de réfléchir avant de parler et de venir avec des solutions. Du côté francophone, il faut que les présidents de ces partis se voient sur des plateaux de télévision pour s’engueuler, c’est un problème. Ils devraient se parler plus“.

La petite phrase d’Alexander De Croo n’est pas gratuite. Elle intervient après un débat homérique à la RTBF, il y a quelques jours, avec la mine de Jean-Marc Nollet qui s’allongeait au fur et à mesure que ses partenaires s’engueulaient. Elle intervient encore alors que Georges-Louis Bouchez, ce matin même sur LN24, estimait qu’il réalisait « à quel point aujourd’hui le gouvernement n’est pas à la hauteur de l’enjeu“, et que dans la gestion de la crise énergétique, ce gouvernement était “le maillon faible“.

Qualifier un gouvernement auquel on participe de maillon faible alors qu’on y a 3 ministres et un secrétaire d’État, qu’on en a rédigé le programme et qu’on lui vote chaque année la confiance, ça n’a évidemment pas plu dans les chaumières des partenaires. Thomas Dermine pour le PS, et Gilles Vanden Burre pour Écolo se sont donc permis de répondre. Le premier a estimé que le maillon faible est un président de parti qui étale son impuissance en flinguant le gouvernement auquel il participe. Tandis que pour l’écologiste, les outrances du président du MR dépassent chaque jour de nouvelles limites et nourrissent l’antipolitique et le populisme.

Bref, il y a désormais une ambiance délétère dans la majorité Vivaldi. Et si personne n’a envie de débrancher la prise pour aller vers de nouvelles élections, il est clair que les présidents de partis ne peuvent plus se sentir, ça les concerne. Mais plus en état de travailler ensemble, là, ça nous concerne. Et qu’Alexander y fasse désormais publiquement référence indique bien que cette mésentente est désormais un caillou dans la chaussure gouvernementale. Un gouvernement qui boite, c’est un gouvernement qui avance moins loin et moins vite.

Alors que le pugilat atteint des niveaux rarement atteints côté francophone, la petite phrase du premier sonnait donc comme un appel. La question, c’est de savoir si le Premier ministre a encore de l’autorité sur les présidents de parti qui soutiennent son gouvernement. S’ils sont en état de l’écouter et de changer d’attitude. Et de savoir si c’est un rappel à l’ordre. Ou plutôt un appel au secours.

Un édito de Fabrice Grosfilley