Hooliganisme à Lemonnier, l’édito de Fabrice Grosfilley
Ce lundi, Fabrice Grosfilley évoque dans son édito les émeutes qui ont pris place dans le centre de Bruxelles dimanche suite au match Belgique-Maroc.
Voyous, délinquants, émeutiers. Depuis hier après-midi, les qualificatifs ne manquent pas pour désigner ceux qui ont participé aux violences qui ont frappé le boulevard Lemonnier à l’occasion du match Belgique-Maroc. Question subsidiaire : puisque ces violences étaient prévisibles, pouvait-on les éviter ?
« Des voyous, des crapules. » Ces termes sont ceux employés dès hier soir par Philippe Close, le bourgmestre de Bruxelles. Pour Annelies Verlinden, ministre de l’Intérieur, c’est « un groupe de casseurs qui ne cherchent qu’à provoquer une émeute ». Georges-Louis Bouchez, président du MR, parlait d’ “actes scandaleux“, tandis que le Premier ministre Alexander De Croo, à peine de retour de Kiev, estimait que le football doit être une fête.
Aux propos très durs des politiques, répondent les images que vous avez pu voir. Cette voiture utilisée comme bélier contre d’autres véhicules. Ces trottinettes transformées en barricades. Ces débuts d’incendies. Ces projectiles que l’on lance contre la police. Et le tout soigneusement masqués et cagoulés, car les auteurs de ces faits-là savent très bien ce qu’ils font. Ils savent très bien qu’en cas d’identification, ils seront poursuivis et qu’à part leur avocat, ils ne trouveront personne pour justifier leurs actes.
Ce qui s’est passé hier après-midi au boulevard Lemonnier n’a donc rien à voir avec le football. Le but des fauteurs de troubles était de provoquer des incidents, de profiter du chaos pour piller des commerces et casser du policier au passage. Rien à voir avec le football, et rien à voir avec le Maroc non plus. Les supporters du Maroc, quelle que soit leur nationalité, quelques centaines de mètres plus loin, se sont bien gardés de prendre part aux affrontements.
Alors, combien étaient-ils ces émeutiers ? Même si le terme est un peu fort : une émeute, c’est un soulèvement populaire, ici, il n’y avait guère de soulèvement, et encore moins d’engouement populaire. 100, 200, 300 au maximum ? La plupart jeunes, voir très jeunes, issus du quartier pour certains, attirés de plus loin par l’odeur du combat pour d’autres. On a du mal à voir dans leur motivation autre chose que du pur hooliganisme. Un hooliganisme maroxellois ni plus ni moins intelligent que celui des fans du Sporting, du Standard ou de Liverpool. Un hooliganisme sur lequel se greffent des phénomènes de bandes, trafic de drogue, vol à la tire.
Ce désir de violence doit être puni comme tel. Suffisamment fort pour donner l’envie de ne pas recommencer. Avec en prime une condamnation explicite des communautés dont sont issus les lanceurs de pavés. On est suffisamment engagés contre le racisme dans cette émission pour dire que ce qu’on a vécu hier n’est pas explicable par l’expression d’un malaise racial ou sociétal. Se recommander du Maroc et en utiliser le drapeau dans ces circonstances, c’est valider tous les discours racistes qui circulent. Ces discours qui estiment qu’une partie de nos jeunes refuse de s’intégrer, qu’ils ne nourrissent que de la haine contre la société dans laquelle ils évoluent, que leur seul mode d’expression repose sur la violence.
Pas plus que tous les supporters de foot ne sont des hooligans, tous les jeunes des quartiers de Bruxelles ne sont pas des délinquants. Plus que les images d’hier soir et les dégâts causés, ce qui nous interpelle, c’est notre incapacité à prévenir le phénomène. Parce qu’on savait le match à risque, que les policiers étaient même mobilisés en conséquence. C’est plutôt en amont que nous devrions trouver les moyens d’agir. Et ça ne dépend pas que des services sociaux et des éducateurs. Ça dépend aussi des familles qui, ce lundi, portent la honte de leurs jeunes.
■ Un édito de Fabrice Grosfilley