Energie : le billard à trois bandes, l’édito de Fabrice Grosfilley

Ce jeudi, Fabrice Grosfilley évoque dans son édito la face cachée de l’aide énergie.

C’est ce qu’on appelle du billard à 3 bandes. Baisser la TVA sur l’électricité ne va pas profiter qu’aux ménages. Cela va aussi et surtout profiter aux employeurs, comme l’a confirmé aujourd’hui  le bureau du plan aujourd’hui. 

Officiellement, si le gouvernement fédéral a décidé au début de ce mois d’aider les consommateurs, c’est notamment pour alléger notre facture. Un chèque de 100 euros, une prolongation du tarif social qui profite à 900 000 ménages et la baisse de la TVA sur l’électricité qui passera de 21 à 6% dans les prochains mois : le gouvernement d’Alexander De Croo se targuait d’avoir mis plus d’un milliard sur la table. Une bonne nouvelle pour le consommateur ? Dans la plupart des cas, la réponse est oui. Mais dans d’autres, la nouvelle sera peut-être bonne dans un premier temps, mais elle le sera probablement beaucoup moins si on raisonne à long terme.

Aujourd’hui, le bureau du plan a en effet fait part de ses prévisions de croissances et d’inflation. Et d’après ses pronostics, le “paquet énergie” dégagé par le gouvernement fédéral va permettre de ramener l’inflation à 5,5% à la place de 5,8% en fin d’année. Vous allez me dire, ce n’est pas grand-chose 0,3% de différence. Sauf que cette différence va retarder l’indexation des salaires. L’indice pivot qui aurait dû être atteint en avril ne le sera finalement qu’en octobre. Quand un indice pivot est dépassé, les allocations sociales puis les salaires du secteur public augmentent automatiquement de 2%, ceux du secteur privé suivent le même mouvement, mais avec parfois un peu de retard. Si l’indice pivot est reporté, l’indexation des salaires sera décalée d’autant. Au lieu d’être augmentés avant les vacances d’été, c’est plutôt à la Toussaint ou à la Noël que les salaires seront revus à la hausse.

Pour tous ceux qui sont salariés, c’est une mauvaise pièce qui est probablement en train de se jouer. Parce que les prix de l’énergie ne diminueront sûrement pas. Finalement, ce sera une perte de pouvoir d’achat.  Ho, elle ne sera pas énorme, quelques dizaines d’euros, mais pour ceux qui comptent chaque centime, c’est douloureux. Et les vrais gagnants de l’opération seront en réalité les entreprises, qui n’augmenteront pas les salaires en milieu d’année, mais en fin d’année.  Vous multipliez par 4 millions de salariés, vous ajoutez près de 900 000 personnes dans la fonction publique (c’est le même raisonnement)… vous avez compris que les vrais gagnants de ces mesures énergie seront l’État lui-même ainsi que les employeurs privés.

Un édito de Fabrice Grosfilley