Devoir de protection, l’édito de Fabrice Grosfilley
Ce mardi, Fabrice Grosfilley évoque dans son édito le discours d’Alexander de Croo sur la protection des citoyens.
Protéger. C’est le mot-clef du discours d’Alexander de Croo. Protéger les citoyens, protéger le pouvoir d’achat, protéger les générations futures. Le verbe protéger apparaît comme le fil rouge de cette déclaration que le Premier ministre a lu devant les parlementaires.
Quand on parle de protection, c’est qu’il y a une menace. D’emblée, Alexander De Croo a fait référence à la guerre en Ukraine. D’abord pour réaffirmer le soutien de la Belgique au peuple ukrainien. Ensuite pour établir un lien direct entre les bombardements qui frappent là-bas et les secousses économiques ou énergétiques que nous ressentons jusqu’ici. “Protéger aujourd’hui, c’est avant tout armer nos familles et nos entreprises face à cette guerre énergétique » a ainsi précisé le Premier ministre.
Très logiquement, Alexander De Croo a rapidement fait référence aux décisions prises ce matin ou la nuit dernière par son gouvernement. Trois milliards d’euros seront ainsi redistribués en faveur des consommateurs, a-t-il affirmé, après avoir commis un petit lapsus où il parlait de trois millions. Le Premier ministre a de nouveau appelé la Commission européenne à plafonner le prix du gaz. “Le marché du gaz n’est plus un marché libre. C’est une arme de guerre » a-t-il justifié. Avant d’ajouter que “le gouvernement a également décidé d’examiner comment nous pouvons encore augmenter notre propre capacité énergétique, à la fois nucléaire et renouvelable.” Petite phrase que le MR a très rapidement soulignée comme étant une ouverture à la prolongation envisageable d’autres centrales nucléaires.
Toujours au chapitre protection, le Premier ministre a annoncé un milliard d’investissements pour la police et la justice. Mais il faut oser rationaliser, a-t-il insisté, s’arrêtant notamment sur les 225 bâtiments relevant du ministère de la Justice, alors que les Pays-Bas n’en comptent que 25, et suggérant encore qu’une fusion des zones de police serait la bienvenue. On retiendra également de cette déclaration qu’une réforme fiscale est bel et bien sur les rails. Le ministre des Finances est appelé à remettre sa copie d’ici le mois de décembre. En attendant cette réforme, c’est surtout la fiscalité sur notre alimentation qui va changer dans les années à venir. Avec un shift santé : trop gras et trop sucré ou trop salé, ce sera aussi à l’avenir trop taxé.
Sur le fond, il n’y a pas eu vraiment de surprise aujourd’hui à la Chambre. Pas d’envolée lyrique non plus. Et on remarquera qu’il n’y pas eu non plus de perturbations ou de tentatives de flibuste parlementaire, comme c’est souvent le cas dans ces occasions où l’on sait que toutes les caméras sont braquées sur le Parlement, et que réussir à retarder la séance ou provoquer un peu de chahut permet une exposition médiatique maximale. Comme si on avait compris dans la majorité comme dans l’opposition que l’heure était grave et que l’atmosphère du moment n’était pas à l’esbroufe.
Alors bien sûr, les joutes politiques reviendront rapidement. Elles seront là dès demain. Le vote lui est prévu pour jeudi soir. Mais la déclaration d’Alexander de Croo en nous ramenant au début et à la fin de son intervention à la guerre en Ukraine a au moins un mérite. Celui de ne pas nous laisser le nez dans notre assiette, en feignant d’ignorer ce qui se passe autour de nous. Et éviter cet aveuglement que Jacques Chirac avait dénoncé il y a déjà 20 ans par cette phrase, qui à l’époque visait notre passivité climatique, mais qu’on pourrait utiliser aujourd’hui dans d’autres contextes : “notre maison brûle et nous regardons ailleurs“.
■ Un édito de Fabrice Grosfilley