Malgré l’explosion de l’activité immobilière, le Fonds du Logement n’atteint pas ses objectifs de crédits octroyés
Après avoir doublé son équipe dédiée à l’information et au traitement des demandes de prêts, le Fonds envisage une campagne publicitaire pour davantage se faire connaître.
Le Fonds du Logement a octroyé, en 2019, 839 crédits, soit une hausse de 8% par rapport aux 776 crédits de 2018. Sur base des chiffres disponibles en novembre dernier, la mensualité moyenne s’est élevée l’année passé à 698 euros. Le tout pour un taux d’intérêt moyen de 1,86 %, un crédit moyen de 181.975 euros et une durée moyenne de 27 ans et 5 mois. C’est ce qu’a indiqué, jeudi après-midi, la secrétaire d’Etat bruxelloise au Logement Nawal Ben Hamou (PS) à la députée régionale Joëlle Maison (Défi), qui l’interrogeait sur le sujet.
Au final, les chiffres 2019 ne représentent pas une réelle tendance à la hausse. Quelque 781 crédits avaient été octroyés en 2015, 873 en 2016 et 810 crédits. La secrétaire d’Etat ne dit pas autre chose dans sa réponse, précisant que les objectifs ne sont pas atteints:“On constate une stabilisation de l’activité de crédits aux alentours des 800 crédits octroyés par an alors que le contrat de gestion du Fonds fixe comme objectif d’atteindre entre 2017 et 2021 une croissance de 100 crédits supplémentaires par an”.
Un marché en surchauffe
L’impossibilité du Fond à d’accorder davantage de crédits ces dernières années peut interroger à première vue au regard de l’activité du secteur immobilier. Comme vient de le rappeler le dernier baromètre des notaires, celle-ci a augmenté de 6,3%% en 2019 en Région Bruxelloise par rapport à l’année précédente. En cinq ans, le prix moyen d’une maison dans la capitale a même bondi de 12,1%.CP sous embargo. Niveau appartements, Bruxelles est d’ailleurs la Région avec le prix moyen le plus élevé en Belgique.
Compte tenu de l’inflation, on peut parler d’une hausse de 11.000 euros du prix moyen par appartement en un an. En comparaison, cette hausse est de 1.500 euros en Wallonie. Du côté du Fonds, on justifie justement la stabilisation du nombre de prêts par cette explosion des prix. “Il y a une difficulté croissante pour les ménages de trouver un logement financièrement abordable. Entre 2016 et 2018, le prix des logements acquis par les emprunteurs du Fonds s’est accru de 11 %. Dans la même période, les revenus des emprunteurs n’ont évolué que de 1,7 %”, note d’ailleurs Nawal Ben Hamou.
Un Fonds censé s’élargir aux classes moyennes
Il faut d’abord rappeler l’objectif du Fonds: offrir aux ménages à revenus moyens ou modestes des crédits hypothécaires qui leur seraient sans doute refusés par le milieu bancaire. La société coopérative aidée par la Région bruxelloise accepte aussi de prêter plus que 80% du prix d’achat du bien. Il est ainsi possible de d’obtenir 100%, voire 120% du montant (pour les frais de notaire, etc.). Une partie croissante de la population bruxelloise s’avère toutefois exclue des conditions d’achats.
Le Fonds vise, depuis plusieurs années, un public plus large et donc aussi une partie importante de la classe moyenne. Ce public reste toutefois peu représenté parmi les bénéficiaires. “On peut supposer que les ménages aux revenus modestes à moyens, peu représentés dans les statistiques du Fonds, trouvent à se financer sur le marché bancaire dans un contexte de taux d’intérêt historiquement bas”, explique la socialiste, dans sa réponse parlementaire. Le taux peut en effet s’avérer plus intéressant dans une banque selon les situations.
Un plan de bataille 2020
Le budget initial 2020 du Fonds prévoit le financement de 923 crédits de 175.000 euros. L’objectif est absolument d’augmenter le nombre de crédits. Le récent doublement du nombre de collaborateurs dédiés à l’information et au traitement des demandes représentait une priorité. Pas moins de 1.300 personnes figurent quand même aujourd’hui sur la liste d’attente en vue de ce premier entretien d’information. “Chaque entretien physique ou téléphonique prend un peu plus de 20 minutes. Le Fonds a un devoir d’information et souhaite aussi apporter un accompagnement pédagogique afin d’accompagner au mieux un premier achat”, explique sa porte-parole Dunia Oumazza.
“Une refonte du site internet du Fonds est également prévue afin de fournir plus rapidement et plus efficacement de l’information aux candidats emprunteurs”, explique la secrétaire d’Etat. Le Fonds prévoit aussi des campagnes de publicité. Une politique de financement à taux zéro des frais d’actes et des droits d’enregistrement prévue par la déclaration de politique générale, est enfin aussi à l’étude.
Toujours les mêmes communes concernées
Du côté du Fonds, on explique que le montant de 175.000 euros prévu par prêt en 2020 ne doit rien au hasard. “Ce ne sont pas des grands montants, mais le public qui vient chez nous ne possède généralement pas de gros revenus. La carte (NDLR: ci-dessous) qui se trouve dans notre rapport annuel montre bien quelles communes sont concernées par nos prêts. Il s’agit surtout des communes du croissant pauvre. Cette carte ne varie quasiment pas d’année en année. Le seul petit changement notable, c’est Berchem qui semble être devenu un moins accessible”, indique Dunia Oumazza.
“Il s’agit d’un dispositif très important”
La députée Joëlle Maison note, pour sa part, avec satisfaction la volonté du gouvernement d’augmenter le nombre de crédits accordés. “Je crois qu’il s’agit d’un dispositif très important. Il permet à des personnes aux revenus faibles de devenir propriétaires et offre ainsi une alternative au système de logements sociaux. C’est aussi un rempart contre la pauvreté. Je suis contente d’entendre que, malgré le contexte budgétaire, le gouvernement poursuit ses efforts”, explique l’élue amarante.
Elle explique aussi être satisfaite d’apprendre que la politique de financement à taux zéro des frais d’actes et des droits d’enregistrement est également à l’étude. “Un point similaire figurait dans notre programme électoral. Nous avions proposé un taux zéro sur les premiers 20.000 euros, ce qui revient au même. C’est une mesure qui pourrait vraiment être incitative et qui ne coûterait en même temps pas si cher à la Région”, conclut la parlementaire.
J. Th. – Photo: Belga/Benoit Doppagne