Le pavé bruxellois battu dimanche pour dénoncer les violences faites aux femmes
La plateforme Mirabal, qui réunit une centaine d’organisations de la société civile, appelle à manifester à Bruxelles dimanche dans le cadre de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, fixée au 25 novembre. Tout un chacun est invité à se rendre au carrefour de l’Europe, à la gare centrale de Bruxelles, à 14h, pour exiger une lutte plus efficace contre toutes les formes de violences affectant les femmes.
Qui pense violences faites aux femmes songe souvent aux féminicides. Selon le blog Stop Féminicide, créé par des associations féministes, 21 femmes ont déjà été tuées en 2019 pour le simple fait qu’elles sont des femmes. Au total depuis 2017, année de création du blog, 99 féminicides ont été recensés en Belgique. Aucun chiffre officiel sur la question n’existe cependant et le nombre de féminicides pourrait dès lors être plus important.
Le compte des associations ne se base en effet que sur une relative exposition médiatique. “Il ne s’agit là que de l’expression la plus extrême des différentes formes de violences que les femmes continuent à subir dans notre pays (physiques, sexuelles, économiques, psychologiques, institutionnelles…)”, souligne la plateforme Mirabal dans son appel à la mobilisation. Agressions dans l’espace public, harcèlement, “terreur quotidienne imposée par leur (ex-)compagnon (…) sans compter le sexisme banalisé qui s’attaque aux droits de toutes les femmes”, les violences envers les femmes sont plurielles. Et pourtant, “il n’y a toujours aucun débat politique et aucune stratégie cohérente à la hauteur des enjeux”, déplore la plateforme. “Quel mépris!”
En 2016, la Belgique a ratifié la Convention d’Istanbul, texte du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et contre la violence domestique. Trois ans plus tard, le constat de la société civile est sans appel: la “Convention reste très peu et mal concrétisée”. Pas de véritable politique de prévention, peu ou pas d’amélioration de la sécurité et de l’accompagnement des victimes, une reconnaissance aléatoire des violences par les institutions (police, justice, santé, employeurs…), des moyens dérisoires et financements précaires accordés aux associations féministes et services spécialisés… Les griefs sont nombreux.
Un plan quinquennal (2020-2024) de lutte contre les violences doit bientôt être élaboré et adopté, afin de coordonner l’action des pouvoirs publics. Lasse, la plateforme estime cette coordination “au point mort” malgré le précédent plan, qui n’est en outre pas budgétisé et ne comporte pas d’objectif chiffré de réduction des violences. La manifestation de dimanche doit dès lors constituer un appel aux autorités à préparer une lutte plus efficace. Les organisations émettent plus de 200 recommandations. “Il est indispensable d’investir un budget public conséquent, de privilégier la prévention à la répression, de garantir le droit à la sécurité pour toutes les femmes sans basculer dans le sécuritaire et de battre en brèche toute tentative de stigmatisation”, énumère la plateforme Mirabal.
Femmes et hommes indignés sont appelés à crier leur colère lors de cette manifestation nationale, organisée pour la troisième année consécutive. “C’est quand la colère s’exprime et s’organise largement que la lutte contre les violences faites aux femmes s’impose aux agendas des gouvernements”, lancent les organisateurs, qui espèrent attirer plus de 5.000 protestataires. La mobilisation démarrera du carrefour de l’Europe et rejoindra la place Poelaert, où un arrêt de 15 minutes sera observé. Le parcours se poursuivra ensuite dans les alentours de la gare centrale, point d’arrivée de la manifestation.
Demain/lundi, date de la Journée internationale contre les violences faites aux femmes, différentes actions sont prévues dans tout le pays. La plateforme appelle à faire du bruit à midi dans le cadre de l’action “She had a name” (elle avait un nom). “On fait souvent des minutes de silence mais on ne veut plus de silences. Les mortes, elles ne parlent plus”, lâche Céline Caudron, coordinatrice de Vie féminine, l’une des organisations membres de Mirabal. “On fait du bruit pour dire que ça existe, pour dire qu’on en a marre et pour que le gouvernement se bouge”, conclut-elle.
Belga – Photo: Nicolas Maeterlinck