3 étudiants sur 10 s’estiment en décrochage : “Ce deuxième confinement est plus dur”

Trente pour cent des étudiants s’estiment en décrochage, et ce malgré des taux de réussite plus élevés que d’habitude lors de la session de janvier, ressort-il d’une étude de l’Université Saint-Louis, à Bruxelles. Six étudiants sur dix se sentent découragés et démotivés.

Sur l’ensemble des près de 600 étudiants interrogés, tous inscrits pour la première fois à l’Université Saint-Louis en 2019-2020, les plus nombreux à exprimer leur sentiment de décrochage sont ceux qui ne sont pas passés en deuxième année. Ils sont en effet 36,6% à le faire, contre 29% des étudiants qui sont, eux, passés dans le bloc supérieur.

Ce sont par contre les étudiants qui ont été admis en deuxième année qui sont les plus enclins à exprimer leur découragement : 61,8%, contre 46,4% de ceux restés en première ou qui se sont réorientés.

“Ces personnes n’ont pas connu le coup d’arrêt de rester en première. Elles nourrissent en général plus d’espoir dans leurs études et sont plus investies”, explique le professeur de sociologie Nicolas Marquis. “Paradoxalement, ceux qui vont le moins mal ont plus tendance à dire qu’ils vont mal. C’est peut-être aussi parce que ces étudiants ont tendance à avoir plus de ressources. Ils sont donc plus prompts à dire que ça va pas, cela fait davantage partie des possibilités de leur environnement”, avance-t-il.

Des difficultés psychologiques

Bien qu’une majorité d’étudiants partageait l’impression d’avoir beaucoup de temps pour leurs études, 85% d’entre eux ont rencontré des difficultés psychologiques entre fin octobre et mi-décembre. Ils n’étaient encore “que” 79% dans ce cas en juin. Près de la moitié estime que ces obstacles ont lourdement entravé leur parcours. “Ce sentiment est lié à l’absence de perspective, à court, moyen et long terme”, estime Nicolas Marquis sur BX1+. “Quand vous ne savez pas ce que sera la valeur du diplôme que vous obtiendrez, cela donne ce sentiment de découragement et de fatigue”.

La majorité des étudiants interrogés ont trouvé plus difficile la deuxième expérience d’enseignement à distance par rapport à celle de l’année académique précédente. Un constat lié à un sentiment d’isolement aggravé : il concernait 63,5% des répondants fin 2020, contre 51,4% six mois plus tôt.

“Des étudiants se disent toujours très stressés de retourner en présentiel, mais il y a clairement un sentiment de découragement et de fatigue, qui les touche de plein fouet depuis maintenant plus d’un an“, explique Nicolas Marquis sur BX1+. “Ce deuxième confinement est plus dur que le premier, parce qu’il contraste très fort avec la motivation perçue chez les étudiants lors du premier quadrimestre de cette année scolaire”.

Des inquiétudes présentes et croissantes

Les étudiants semblent cependant avoir pu capitaliser sur leur expérience, relèvent les auteurs de l’étude. Ils étaient en effet moins nombreux à admettre avoir été désorganisés (39,8%, contre 47,9% en juin), mais aussi plus enclins à apprécier travailler leurs cours de façon autonome. Ils ont moins souvent dû revoir leurs méthodes (52,7% en juin 2020, contre 43,1% aujourd’hui). Près de la moitié, soit 46,4%, s’estiment plus productifs, contre 40,9% lors de leur première expérience de l’enseignement à distance.

L’enquête démontre également que les étudiants ont des inquiétudes très présentes et croissantes. Pour une majorité d’entre eux, les conséquences de la crise sanitaire (économiques, sociales, familiales…) constituent la source de stress la plus répandue, alors que les inquiétudes liées à la suite de leur parcours sont un peu moins fréquentes.

“Ce dont on se rend compte, c’est à quel point le métier d’étudiant ne se fait pas tout seul. Cette situation montre que l’autonomie peut fonctionner jusqu’à un certain point, mais les étudiants sont extrêmement demandeurs d’encadrement concret sur la façon de fonctionner au quotidien de la part de leurs enseignants. Si on devait repartir dans une situation de confinement ou d’enseignement semi-distantiel, je pense qu’il est de notre devoir de produire cet encadrement, avec une sorte de guide de survie au quotidien pour ces étudiants”, conclut-il sur BX1+ (avec Belga)

■ Interview de Nicolas Marquis, professeur de sociologie à l’Université Saint-Louis, par Fabrice Grosfilley dans Toujours + d’Actu.

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16 mars 2021 - 13h20
Modifié le 16 mars 2021 - 14h10