Procès de l’attentat du Musée juif : la défense de Nemmouche s’insurge de la présentation des images de vidéo-surveillance

Avec une certaine avance sur le programme établi par la cour, les enquêteurs ont exposé, lundi, toutes les constatations faites au Musée juif de Belgique après l’attentat, le 24 mai 2014. Ils ont également relaté tous les récits des témoins directs et parlé du recoupement de ces récits avec les images de vidéo-surveillance du musée.

Procès de l’attentat du Musée juif : les enquêteurs reviennent sur “l’exécution” des victimes

La cour a entendu en premier lieu lundi matin les déclarations des premiers intervenants, notamment les secouristes. Les pompiers-ambulanciers arrivés sur les lieux ont expliqué avoir d’emblée constaté le décès des époux Riva, qui se trouvaient dans le couloir d’entrée du musée. Plus loin, au niveau du local d’accueil, ils avaient découvert Alexandre Strens. Il ne parlait pas et tentait de se relever “instinctivement”, ont-ils rapporté.

Placé sous assistance respiratoire, Alexandre Strens avait ensuite été emmené très rapidement à l’hôpital Saint-Pierre, où il est décédé une quinzaine de jours plus tard. Le premier médecin arrivé sur place a également raconté avoir été marqué par la trace de tir “chirurgical” que portait Alexandre Strens au milieu du front. Il a également confié avoir eu “très peur”, les lieux n’ayant pas encore été sécurisés au moment de son intervention.

La cour a ensuite entendu les enquêteurs. Ceux-ci ont tout d’abord dressé la liste de tout ce qu’ils ont découvert sur les lieux: des cheveux, des traces de semelles, des douilles, des projectiles et des impacts de balle. Ils ont aussi commenté les images difficiles des corps des trois victimes décédées sur place, sur lesquelles des prélèvements de poils et de cheveux ont aussi été effectués.

Les enquêteurs ont montré sur photos les orifices d’entrée des balles qui ont tué les époux Riva, situés précisément dans leur nuque, ce qui a provoqué l’important écoulement de sang visible au niveau de leur tête.

Quant à la victime Dominique Sabrier, elle a été retrouvée allongée derrière le bureau le long du mur, ont expliqué les enquêteurs, montrant également sur photos les nombreuses blessures qu’elle présentait contrairement aux autres victimes.

Les expertises médicales et l’analyse des images de l’attaque avaient permis de constater que celle-ci avait été tuée avec une arme différente de celle dont s’était servi l’auteur contre les trois autres victimes. Les enquêteurs de la police technique et scientifique ont également précisé que des prélèvements avaient été faits sur la porte d’entrée du musée, précisant que l’ADN est illisible en cas de superposition de traces papillaires, soit les empreintes digitales ou de paumes de la main.

Enfin, les enquêteurs ont longuement évoqué les témoins directs. “Les images des caméras de vidéo-surveillance du musée nous ont permis d’affiner les témoignages”, a précisé l’un d’eux. Il a ainsi pu être déterminé que l’auteur des faits avait, comme l’ont déclaré la majorité des témoins, pris la fuite à pied, mais aussi qu’il était bien de sexe masculin, âgé de 30 à 45 ans, qu’il mesurait entre 1m70 et 1m80, qu’il était costaud, avait les cheveux noirs et courts, qu’il portait une casquette noire et était porteur de deux sacs.

Mehdi Nemmouche et Nacer Bendrer, deux Français âgés de 33 et 30 ans, sont accusés devant la cour d’assises de Bruxelles d’être auteur et co-auteur de l’attaque terroriste commise le 24 mai 2014 au Musée juif de Belgique, situé rue des Minimes à Bruxelles. L’attentat avait coûté la vie à quatre personnes: Emanuel et Miriam Riva, un couple de touristes israéliens, Dominique Sabrier, une bénévole du musée, et Alexandre Strens, un employé du musée.

Mehdi Nemmouche avait été arrêté six jours après les faits, le 30 mai 2014, à la gare routière de Marseille. Il était en possession de munitions et d’armes, dont une kalachnikov et un revolver, qui ont servi lors de l’attaque au Musée juif.

Selon l’enquête, il est celui qui a fait feu sur les quatre victimes à l’intérieur du musée, l’homme visible sur les images de caméras de vidéo-surveillance dans et autour du musée lors de l’attaque, et qui avaient fait l’objet d’un avis de recherche largement diffusé. Mehdi Nemmouche ne conteste pas avoir possédé les armes du crime, mais il nie être le tireur.

Quant à Nacer Bendrer, arrêté le 9 décembre 2014 à Marseille, il est soupçonné d’avoir fourni les armes à Mehdi Nemmouche. L’audition des enquêteurs se poursuivra mardi.

La défense de Nemmouche s’insurge de la présentation des images de vidéo-surveillance

La défense de Mehdi Nemmouche a dénoncé, lundi à l’issue de l’audience devant la cour d’assises de Bruxelles, la manière dont ont été présentées aux jurés les images de vidéo-surveillance qui montrent l’auteur de l’attentat passant devant le Musée juif. Passablement énervé, Me Courtoy s’est insurgé du fait qu’un arrêt sur image n’a selon lui pas été fait au bon moment pour constater si le tueur portait ou non des gants au moment de l’attaque.

La question des gants éventuellement portés par l’auteur de la tuerie est importante, dans la mesure où elle peut apporter des éléments quant aux traces ADN retrouvées au Musée juif. Pour le parquet, le tueur portait des gants, ce qui expliquerait que le profil génétique de Mehdi Nemmouche n’ait pas pu être mis en évidence sur les lieux de l’attaque.

Un point de vue qui constitue déjà une “volte-face” par rapport à la position initiale des procureurs, qui avançaient dans un premier temps que le tueur n’en portait pas et soulignaient que l’ADN de Mehdi Nemmouche avait été retrouvé sur les armes utilisées, a raillé Me Courtoy.

Les images, de qualité moyenne, n’ont pas permis pour l’instant de trancher la question. L’accusation considère que l’aspect “cireux” des mains de l’auteur démontre qu’il portait des gants en latex. Un point de vue fortement contesté par la défense du principal accusé, qui estime qu’un arrêt sur image sur les mains d’un passant montre un aspect similaire.

Mais cet arrêt n’a pas été fait au bon moment lors de l’audience, dénonce Me Courtoy, qui réclame que la séquence soit à nouveau diffusée mardi. L’avocat considère également que le refus par la présidente d’autoriser le prélèvement de la voix de son client, réclamé par le conseil du CCOJB et auquel Mehdi Nemmouche serait favorable, a pour but de l’empêcher de démontrer son innocence.

Il est par ailleurs pour le moins perplexe quant aux explications données par les enquêteurs sur l’alarme du musée. Me Courtoy, qui dénonce depuis le début de l’affaire une enquête uniquement à charge du principal accusé, rappelle enfin que celui-ci était âgé de 29 ans au moment des faits. Soit nettement moins qu’indiqué par les premiers témoins, qui donnaient environ 40 ans au suspect, a fustigé l’avocat.

Belga

  • Duplex de Camille Tang Quynh et Yannick Vangansbeeck

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