Le "Nègre magique", ce préjugé raciste qu'Hollywood pérennise

La dernière création de la chaine américaine ABC a réveillé le spectre du “Nègre magique”, un artifice souvent utilisé dans le cinéma hollywoodien qui consiste à confier à un personnage noir pour seule mission d’aider un héros blanc. De la voyante Oda Mae Brown (Whoopi Goldberg) dans “Ghost” (1990) au chef Gus Mancuso dans “Passengers” (2016), cette pratique a perduré au fil des ans et trouve ses racines bien ancrées dans la tradition narrative américaine.

“Kevin (Probably) Saves the World” -“Kevin sauve (probablement) le monde”-, présenté dimanche à Los Angeles en avant-première à la presse par l’Association des critiques de télévision, a ravivé le débat sur le sujet.

Cette nouvelle série suit la vie de Kevin, un tocard égoïste incarné par Jason Ritter, auquel un être céleste prénommé Yvette (Kimberly Hebert Gregory) offre une chance de rédemption. Le premier est blanc, la seconde est noire.

Interrogée sur la façon dont les créateurs comptaient éviter que son personnage ne devienne un “Nègre magique”, celle qui a joué dans la série “Vice Principals” a répondu: “Je comprends ce concept mais le personnage n’est pas un ange, elle a des failles, elle n’est pas angélique”. “Elle ne se comporte pas vraiment comme un ange, elle n’utilise pas un langage angélique”, a-t-elle insisté. “Elle a une vraie raison d’être et cette raison d’être est plus vaste que simplement aider Kevin à faire ce qu’il doit faire”.

Ces personnages noirs utilitaires, parfois carrément vêtus d’un costume immaculé d’ange et/ou dotés de pouvoirs mystiques, sont là pour distiller sagesse et conseils au héros blanc afin qu’il accomplisse sa mission.

Morgan Freeman est un récidiviste en la matière: “Robin des Bois: Prince des voleurs” (1991), “Les Evadés” (1994), “Bruce tout-puissant” (2003) et sa suite en 2007, ou encore la trilogie “Batman” de Christopher Nolan et le remake de “Ben-Hur” l’an dernier.

L’expression “Nègre magique” a été popularisée en 2001 par le réalisateur Spike Lee, exaspéré par le fait que les patrons du secteur continuaient d’utiliser ce stéréotype. Il avait nommément jeté l’opprobre sur “La ligne verte” (1999) et “La Légende de Bagger Vance” (2000).