En Colombie, le pape exige la "vérité" pour les victimes du conflit

Le pape a exigé vendredi “vérité” et “justice” pour les victimes du conflit en Colombie, après avoir estimé que, sans réconciliation, la paix encore fragile sera vouée à l’échec dans ce pays meurtri par une guerre de plus d’un demi-siècle. “Il est indispensable d’assumer la vérité”, a déclaré François lors d’une prière de réconciliation à Villavicencio (centre), où il a rencontré victimes et acteurs du conflit, en point d’orgue de sa première visite pontificale en Colombie, entamée mercredi à Bogota. “La vérité est une compagne indissociable de la justice et de la miséricorde. Ensemble, elles sont essentielles pour construire la paix”, leur a assuré François, 80 ans, troisième pape à se rendre en Colombie, après Paul VI en 1968 et Jean Paul II en 1986.
“La réconciliation (…) se concrétise et se consolide par l’apport de tous, elle permet de construire l’avenir et fait grandir l’espérance”, a-t-il estimé dans cette région du centre de la Colombie, ravagée par la plus longue guerre du continent et qu’aucun pape n’avait jamais visitée.
Le pape argentin a aussi prié pour les victimes du violent séisme au Mexique et de l’ouragan Irma dans les Caraïbes, exprimant sa “proximité spirituelle avec tous ceux qui souffrent”.
La Colombie vit une étape cruciale de son histoire après la signature en novembre d’un accord de paix avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), la principale guérilla des Amériques, reconvertie la semaine dernière en parti politique légal. Le premier cessez-le-feu bilatéral de l’histoire avec l’Armée de libération nationale (ELN), dernière rébellion active, a en outre été conclu lundi, deux jours avant l’arrivée de François.
L’accord avec les Farc prévoit une justice spéciale pour les acteurs du conflit, avec des peines alternatives à la prison s’ils disent la vérité sur leurs crimes, dédommagent leurs victimes et s’engagent à ne plus recourir à la violence. Dans une lettre ouverte au pape, le chef des Farc, Rodrigo Londoño, lui a demandé “son pardon pour toute larme ou douleur que nous avons causée au peuple de Colombie”.
La statue d’un Christ, mutilée lors d’un massacre qui avait fait 79 morts en 2002 à Bojaya, sur la côte Pacifique, avait été symboliquement apportée à Villavicencio et placée au centre de la tribune d’où le pape a dirigé la prière collective. Quelque 1.500 indigènes s’étaient déplacés de toute la Colombie et 102 d’entre eux -le nombre d’ethnies du pays- ont formé une haie d’honneur pour François, qui se veut défenseur des exclus de la société, ainsi que de l’environnement.
Le pape, attendu samedi à Medellin puis à Carthagène des Indes dimanche, d’où il repartira pour Rome, a en outre béatifié deux religieux victimes de la violence politique qui a dévasté la Colombie dès le début du XXe siècle: le prêtre Pedro Maria Ramirez, tué à coups de machette en 1948, et l’évêque Jesus Emilio Jaramillo, tué par l’ELN en 1989.

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09 septembre 2017 - 03h45