Yves Coppieters : “Il faut encore attendre un peu pour connaître la létalité d’Omicron”

Les pays européens prennent de nouvelles mesures pour lutter contre la propagation du variant Omicron. Entre confinement ou pass vaccinal, le variant inquiète les dirigeants.

Si Omicron inquiète tellement nos décideurs politiques, c’est d’abord à cause de sa contagiosité. Le 25 novembre, le variant est détecté en Afrique du Sud et dans les pays limitrophes. Dès le lendemain, un cas est confirmé en Belgique et en Israël. Aujourd’hui, Omicron représente 12% des contaminations en Belgique.

Partout en Europe, les cas de contaminations avec ce variant se multiplient de manière exponentielle. Au départ, les prévisions estimaient qu’Omicron serait dominant fin janvier. Maintenant, on parle plutôt du nouvel an. Il est donc 5,4 fois plus contagieux que le variant Delta qui lui-même était déjà extrêmement plus contagieux que le variant alpha.

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A cela s’ajoute le risque d’échappement, c’est-à-dire le risque de recontracter la maladie une seconde fois et cela pose un gros problème comme le souligne le professeur en santé publique à l’ULB, Yves Coppieters. “Les dernières données britanniques montrent que les populations vaccinées risquent d’être recontaminées avec Omicron. Les données du Danemark montrent que ce sont les 20-30 ans qui font circuler la souche mais on sait que cela va toucher les populations plus âgées et donc qu’il y aura plus de gens à l’hôpital.”

Selon une étude du College of London, le taux de protection contre une réinfection avec Omicron si on a fait la maladie tombe à 19% contre 85% avec le variant Delta. Si on est vacciné avec deux doses, on descend entre 0 et 20%. Avec trois doses, on repasse à 70% de taux de protection d’où l’importance à l’heure actuelle d’effectuer son rappel.

Reste encore la question de l’immunité croisée ou de la mémoire cellulaire, mais pour Yves Coppieters, cette hypothèse est un peu bancale. “On aurait pu avoir l’espoir qu’on développe une immunité naturelle plus rapidement mais on sait qu’avec les coronavirus, cela ne tient plus la route. L’immunité n’est pas durable. Certains ont l’espoir que l’immunité cellulaire s’installe avec la troisième dose mais cela reste encore une hypothèse.”

La question de la létalité

C’est encore un peu tôt pour dire si le variant Omicron est plus létal ou non que le variant Delta. On se souvient que les médecins sud-africains avaient dit qu’Omicron provoquait un rhume sans plus de gravité. Seulement, la population sud-africaine et européenne sont très différentes en termes de pyramide des âges. Tous les chercheurs étudient donc les parcours des patients atteints par Omicron.

Au Danemark, ce sont surtout les 20-30 ans qui font circuler la maladie qui va forcément à un moment donné toucher les personnes les plus âgées. En Grande-Bretagne on a déjà eu un mort par ce variant. Pour Yves Coppieters, la moindre dangerosité du variant n’est pas prouvée, au contraire. “Si on parle de sa dangerosité en termes de létalité, on ne sait toujours pas. Je suis désolé, cela prend du temps. Il faut qu’on ait des données plus consolidées pour savoir si les formes cliniques changent ainsi que la gravité de la maladie. Les données ne confirment pas l’hypothèse que cela soit un variant moins virulent. Nous sommes plutôt dans l’hypothèse qu’il s’agisse d’un variant aussi dangereux que le Delta, voire un peu plus. Cela doit être confirmé dans le temps.”

■ Interview d’Yves Coppieters, professeur de Santé publique à l’ULB par Vanessa Lhuillier