Trois ans et demi après les attentats, les victimes ne s’estiment toujours pas entendues

Des victimes des attentats de Bruxelles, membres de Life4Brussels, ont eu vendredi la possibilité de rencontrer plusieurs avocats qui font partie du collectif mis sur pied par l’association en vue du procès pénal. Elles craignent d’être laissées de côté lors de l’épilogue judiciaire et fustigent une nouvelle fois l’attitude des pouvoirs publics et des assureurs à leur égard.

Life4Brussels, qui rassemble 196 victimes des attentats du 22 mars, déplore que d’importantes recommandations de la commission parlementaire n’aient toujours pas été mises en oeuvre, plus de deux ans après avoir été présentées. L’une des principales concernait la mise en place d’un guichet unique pour simplifier les démarches. “Le protocole a été signé en mai, mais il n’y a toujours pas de mise en route. Les victimes sont épuisées physiquement et moralement. En outre, les délais pour certaines interventions sont déjà dépassés ou le seront prochainement“, s’inquiète Valérie Gérard, avocate de l’association. Concernant l’expertise unique, “c’est le néant”, insiste-t-elle. “Cela donne l’impression de devoir sans cesse démontrer sa condition. Les séquelles sont minimisées et il faut parfois refaire jusqu’à six fois certains examens.” Life4Brussels pointe encore l’exemption des droits de succession qui diffère selon les Régions, le statut spécial créé mais dont les avantages ne sont toujours pas définis ou encore le manque de psychologues spécialement formés pour cette situation. “A la place, les victimes font face à des médecins conseils mandatés par les assureurs qui les regardent de manière suspecte“, pointe Me Gérard.

L’avocate s’insurge enfin que certaines compagnies refusent à des personnes disposant pourtant d’une protection juridique de couvrir les frais liés au procès pénal, au motif que cela ne serait pas nécessaire puisqu’elles seront indemnisées par la suite dans le volet civil. Une réaction inacceptable pour l’association et ses membres, qui comptent bien profiter de la tribune judiciaire pour faire entendre leur désarroi et leur colère. Le procès leur permettra aussi “d’avoir un visage et de ne plus seulement être un numéro“, a expliqué une victime. “Près de quatre ans après, on essaie de se reconstruire“, a ensuite illustré une autre, s’exprimant au nom de plusieurs d’entre elles. “On se sent incompris, oubliés, abandonnés. En plus de la souffrance infligée ce jour-là, il y a un sentiment d’isolement et d’injustice. Les assureurs m’ont forcé à reprendre le travail, et j’ai inévitablement fait une rechute. Certains acceptent des indemnisations dérisoires, se résignent et renoncent à leurs droits. Ils sont lassés de devoir se justifier pour être soignés.” Outre les assureurs, auxquels les victimes réclament davantage “d’humanité“, elles appellent l’Etat à enfin “prendre ses responsabilités”. Il reviendra désormais à une dizaine d’avocats de porter leur voix. “La mutualisation permettra d’améliorer l’accès à la justice pour le plus grand nombre“, se félicite Me Olivia Venet, présidente de la Ligue des Droits humains et membre du collectif.

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