Réforme du stationnement : quel est l’avis des communes ?
La Région prépare une mise à jour de l’ordonnance sur le stationnement. La révision du texte a été adopté en troisième lecture. Le projet d’arrêté fixant les tarifs, a lui été soumis pour avis aux 19 communes, qui ont jusqu’au 4 mars pour se prononcer. La plupart des collèges se sont aujourd’hui positionnés, et certains ont déjà fait valider leur position en conseil communal. Bilan ?
Le projet de modification de l’ordonnance régional de stationnement, portée par la ministre régionale de la Mobilité, Elke Van den Brandt (Groen), se conçoit comme un outil destiné à l’amélioration et l’harmonisation des politiques de stationnements. La volonté du gouvernement est d’opérer un transfert du stationnement en voirie vers le stationnement hors voirie. Le texte prévoit entre autres plusieurs changements d’ordre tarifaire. Le plus significatif est sans doute celui qui concerne les cartes de riverains : la région propose un prix minimum de 15 euros pour la première carte (10 euros jusqu’ici), de 120 euros minimum pour la deuxième, et la suppression de la troisième.
►Un accord trouvé sur la réforme du stationnement (24 décembre 2021)
Les tarifs du stationnement en voirie sont eux aussi modifiés. La redevance forfaitaire, aujourd’hui de 25 euros, passe à 35 (pour les zones vertes et bleues), 40 euros (zones oranges) et 45 euros (pour les zones grises, zones plus chères en voirie pour encourager le stationnement dans des parkings hors voiries, aux tarifs plus avantageux). Le prix des places dans les box à vélo, baisse, lui significativement de 60 à 15 euros par an.
Un large processus de concertation a été mené avec les entités locales, soutenu par Brulocalis (l’Association des villes et communes). Les communes ont jusqu’au 4 mars pour faire parvenir leur avis à la Région. Le stationnement est depuis longtemps un dossier sensible et sans surprise les tensions entre (certains) bourgmestres et la Région sont cette fois encore bien perceptibles. Les avis varient en fonction notamment des positionnements politiques ou de la localisation sur le territoire. Si certains sont vent debout contre le projet, d’autres se retrouvent dans la ligne régionale. La question a été notamment abordé ce matin à l’occasion de la conférence des bourgmestres, en présence de la ministre Elke Van den Brandt.
Des avis négatifs…
Opposée aux modifications tarifaires du texte régional, Saint-Josse a remis un avis négatif. Elle entend maintenir les tarifs qu’elle pratique actuellement pour les cartes de riverains (soit 5 euros pour la première carte, 50 pour la deuxième) et dénonce le manque de places de stationnements sur son territoire. Le bourgmestre Emir Kir reproche à la Région de ne pas soutenir ses projets de création de parkings hors voirie. Le maïeur tenoodois ajoute qu’à ses yeux, l’augmentation des tarifs pour limiter l’usage de la voiture « est indécente dans le contexte socio-économique actuel. »
L’aspect social est soulevé également à Koekelberg. Le bourgmestre critique notamment une « approche purement tarifaire » de la Région en matière de stationnement. La commune rendra un avis « plutôt négatif », explique Ahmed Laaouej (PS), indiquant que le moment est mal choisi pour augmenter les tarifs. Le socialiste exprime aussi des inquiétudes sur l’impact des nouveaux tarifs du stationnement en voirie sur les quartiers commerçants.
Le collège d’Evere s’est prononcé contre. Le dossier sera soumis au conseil communal la semaine prochaine. L’absence de tarif « visiteur », l’uniformité des zones rouges, « qui ne tient pas compte des réalités locales », le prix de la carte de riverain (à Evere, la première carte est à 10 euros, la deuxième à 50 euros) passent mal, selon Pascal Freson (DéFI), échevin de la Mobilité.
A Berchem-Sainte-Agathe, le collège dit non, en raison du tarif de la deuxième carte de riverain. « On estime que l’augmentation est trop élevé, 100 euros aurait suffi. Et on est opposé à la suppression de la troisième carte », commente le bourgmestre, Christian Lamouline (CDH).
►Revoir : Les Experts, avec Isabelle Pauthier (Ecolo) et Christian Lamouline (cdH) (5 février)
A Woluwe-Saint-Lambert, le conseil communal a rendu un avis négatif, en raison de l’augmentation de tous les tarifs, jugés disproportionnés, confirme le bourgmestre Olivier Maingain (DéFI). La commune regrette que les tarifs de stationnement ne soient pas adaptés aux réalités locales. Plus globalement, elle estime que les propositions de la ministre de la Mobilité « ne clarifient pas suffisamment les missions revenant respectivement au gouvernement régional, à l’Agence régionale du stationnement et aux communes. »
A Etterbeek, le collège doit se se prononcer ce jeudi. Les débats risquent d’être vifs au sein de l’équipe MR, PS et Ecolo. « On s’attend à un avis négatif majoritaire, assorti de remarques. », précise Vincent De Wolf (MR), qui regrette, entre autres, l’absence de systèmes adaptés pour les visiteurs, le tarif de la deuxième carte de riverain jugé excessif et craint que les nouveaux tarifs ne” tuent le commerce local“.
… Et des avis positifs
A Ixelles, le collège s’est déjà prononcé en faveur du projet et adaptera ses tarifs conformément au plan, indique le bourgmestre Christos Doulkeridis (Ecolo). Le dossier doit encore passer au conseil communal.
Avis positif aussi à Saint-Gilles, où le conseil communal s’est prononcé à la fin du mois de janvier, en faveur du projet régional, nous confirme l’échevine de la Mobilité, Catherine Morenville (Ecolo). La commune adaptera ses tarifs, notamment celui de la deuxième carte de riverain (aujourd’hui à 100 euros, la première étant déjà à 30 euros) et supprimera la troisième carte.
A Forest le collège se dirige là aussi vers un avis positif, qui devrait être acté lors de sa réunion de jeudi 24 février, selon la nouvelle bourgmestre, Mariam El Hamidine (Ecolo). Le conseil communal devra se prononcer ensuite.
Ganshoren remet un avis favorable assorti toutefois de remarques notamment sur l’absence de tarifs différenciés entre les communes de première et de seconde couronne, nous explique Magali Cornellisen (MR), échevine de la Mobilité, même si elle plaide pour une harmonisation des tarifs. Quant à la deuxième carte de riverain, elle ne fait ici pas vraiment débat, « mais il ne faudrait pas qu’elle augmente davantage. » Le dossier doit encore être soumis au conseil communal, ce qui sera chose faite jeudi prochain.
A Jette, le conseil communal soutient les modifications tarifaires prévues par le projet d’ordonnance, estimant qu’une « politique de stationnement efficace implique des tarifs qui incitent à plus de rotation. »
Quelques communes doivent encore se prononcer
De son côté, Auderghem se dit mitigée. « Nous sommes en accord avec certaines choses, en désaccord avec d’autres », dit l’échevine de la Mobilité (et future bourgmestre) Sophie De Vos (DéFI). C’est surtout « l’explosion » du prix de la deuxième carte de riverain à 120 euros qui reste en travers de la gorge. Pour le reste, les tarifs horodateurs n’auront aucun impact sur le territoire auderghemois qui ne pratique que la zone bleue ou libre. Le collège et le conseil communal doivent encore se prononcer.
Schaerbeek et Woluwe-Saint-Pierre n’ont pas encore communiqué leur position. Les communes de Molenbeek, Anderlecht, Uccle, et Watermael-Boitfsort ne nous ont pas communiqué leur position.
Quant à la Ville de Bruxelles, elle ne rendra pas d’avis, puisqu’elle a adopté au mois de décembre son nouveau règlement de stationnement, qui entrera en application au mois de mai. « Mais la volonté de la Ville de Bruxelles est bien de s’inscrire dans le contexte régional en intégrant le cadre de l’ordonnance en vigueur aujourd’hui. », nous communique le cabinet de l’échevin de la Mobilité, Bart Dhondt (Ecolo). Si ce n’est que les tarifs bruxellois ne sont pas tout à fait identiques à ceux de la Région…
Une fois les textes adoptés, les communes seront-elles tenues d’appliquer les nouveaux tarifs? Oui. En principe du moins. Car le cadre fixé par la région se heurte ici au sacro-saint principe de l’autonomie communale. Mais avant l’entrée en application des nouvelles modalités, le projet d’ordonnance sera discuté au parlement régional, dans le courant du printemps. Le projet d’arrêté fixant les tarifs, lui, ne passera pas devant l’assemblée, mais directement au Conseil d’Etat, une fois adopté en deuxième lecture par le gouvernement.
S.R.