Procès Encro-Sky ECC : le parquet réclame 10 ans de mise à disposition pour un prévenu

Le parquet fédéral à requis mardi, devant le tribunal correctionnel de Bruxelles, une peine de dix ans de prison assortie d’une mise à disposition du tribunal de l’application des peines (TAP) de la même durée à l’encontre de Missoum B. C’est le seul prévenu, sur les 124, pour lequel une mise à disposition est demandée, a précisé le procureur, qui justifie cette mesure par le passé judiciaire particulièrement chargé de l’homme.

Le rôle de ce dernier dans le dossier Encro, relatif à une organisation criminelle active dans le trafic de drogue mise au jour après le décryptage des messageries Encrochat et Sky ECC, est relativement léger. Il est soupçonné d’avoir travaillé pour Pascal R. en tant qu’ouvrier, mais surtout en tant que convoyeur de stupéfiants. Missoum B. s’occupait de remplir des caches aménagées dans des camions avec de la cocaïne et d’amener les véhicules où c’était nécessaire.

Il a ainsi transporté des dizaines de kilos de cocaïne, selon le ministère public. Mais c’est surtout le lourd passé judiciaire du prévenu de 58 ans qui justifie, aux yeux du parquet, la sévérité de la peine requise. L’homme a en effet été condamné à de multiples reprises, notamment pour vols avec violence, association de malfaiteurs, possession d’arme de guerre ou tentative de meurtre. Sa dernière condamnation, à 11 ans de réclusion, remonte à 2020, il attendait son billet d’écrou lorsqu’il a commis les faits qui lui sont reprochés dans le dossier Encro. En plus de la peine de prison et de mise à disposition du TAP, une amende et une confiscation ont été sollicitées à son encontre.

Arme à feu et pains de cocaïne

Par ailleurs, le ministère public a requis 14 ans de prison à l’encontre d’Ali R. L’homme est l’un des principaux prévenus du procès Encro. Une peine de 40 mois d’emprisonnement a également été réclamée contre sa femme Sarah R.

Selon le parquet fédéral, Ali R. a non seulement dirigé une organisation criminelle active dans la culture et le trafic de cannabis, mais a également été membre d’une autre organisation qui projetait d’importer de la cocaïne vers la Belgique. Pour appuyer ses dires, le procureur s’est basé sur plusieurs photos retrouvées sur le téléphone du prévenu, notamment des images d’arme à feu, de “pains” de cocaïne, de plantations de cannabis et d’un faux document d’identité au nom d’un autre prévenu, Richard G.

Plusieurs conversations retrouvées sur un GSM équipé de la messagerie Sky ECC démontrent également l’implication d’Ali R. dans ces trafics, selon le parquet. L’homme y évoque notamment un hélicoptère et un bateau destiné au transport de marchandise. “Monsieur R. nous dit qu’il est mythomane, mais on retrouve effectivement des recherches pour un bateau, un prix est même évoqué”, a précisé le procureur fédéral. “Il est aussi question du transport de cannabis depuis le Maroc vers l’Espagne en hélicoptère et de transport par bateau depuis l’Afrique et l’Amérique latine.” “Quand monsieur R. nous dit que la cocaïne, ça le dégoûte, ces conversations prouvent le contraire”, a asséné le ministère public.

“Secrétaire de luxe”

Le prévenu est en aveux des faits concernant le cannabis, mais nie les autres préventions. Le parquet a enfin rappelé qu’il s’agissait de la 6e détention d’Ali R. et qu’il se trouve donc en état de récidive. L’homme a notamment déjà été condamné à huit ans de réclusion pour avoir dirigé une organisation criminelle impliquée dans le trafic de stupéfiants. Concernant la femme du prévenu, Sarah R., le procureur l’a qualifiée de “secrétaire de luxe” après avoir présenté des conversations montrant que celle-ci donnait des instructions sur demande de son mari.

“Ces messages traduisent la connaissance que madame avait des activités de monsieur. Elle avait un rôle logistique”, a assuré le ministère public. “Ils montrent aussi que madame a voulu s’en distancier à un moment.” Les sanctions demandées par le parquet à l’encontre des deux prévenus sont des peines fermes et sont assorties d’amendes et de confiscations. Trois ans de prison ont aussi été requis contre John B., un homme de paille nommé à la tête d’une société gérée en réalité par Ali R. et qui lui servait pour son trafic de cannabis.

Une peine de quatre ans de prison a été requise à l’encontre de Naïma A. Cette dernière est considérée par l’accusation comme une complice de son mari Kamel A., un important prévenu du procès. Trois peines différentes pour un total de 19 ans et six mois de réclusion ont été demandées envers lui.

300.000 euros en liquide

Le ministère public reproche d’abord à Naïma A. d’avoir sous-loué et meublé un appartement à d’autres prévenus impliqués dans la fabrication et le trafic de cocaïne. Lors des perquisitions menées dans le logement, 300.000 euros en liquide et des “pains” de cocaïne avaient été découverts. Dans son lieu de vie, une maison en Région bruxelloise, des bidons de produits chimiques pouvant servir à la confection de drogue ont aussi été retrouvés. Mais le procureur a également insisté sur les mouvements suspects constatés sur les comptes de la prévenue. En tout, plus de 115.000 euros en espèces auraient transité par ses deux comptes bancaires avant d’être utilisés pour payer les loyers et les charges de ses trois biens immobiliers.

Naïma A. est en aveu d’avoir reçu de l’argent de son mari mais affirme qu’elle pensait que ces revenus venaient de la revente de cigarettes. Des transferts de fonds suspects vers le Paraguay et l’Espagne, entre autres, ont aussi été détectés. “Elle a apporté une aide en connaissance de cause”, a affirmé le parquet. “Même si elle pensait vraiment qu’il ne s’agissait que de cigarettes, cela reste illégal. Madame savait donc que cet argent était illicite. On a un faisceau d’éléments qui montre qu’elle était au courant. Elle prend part aux discussions de Kamel A., elle pose des questions…”

“Elle a eu un rôle important, elle doit donc être sanctionnée de façon sévère, d’autant plus qu’elle ne prend pas ses responsabilités et se présente comme une victime de son mari”, a ajouté le procureur. Et ce dernier de réclamer une peine de quatre ans d’emprisonnement en s’opposant à un sursis. Une amende, une confiscation et la saisie de l’un des biens immobiliers de la prévenue ont en outre été demandés.

BX1

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30 janvier 2024 - 16h17
Modifié le 30 janvier 2024 - 16h17