Près de 4.000 soignants dans les rues de Bruxelles contre l’obligation vaccinale

Environ 3.800 personnes, selon l’estimation de la police de Bruxelles-Ixelles, manifestent ce mardi matin depuis 10h30 à Bruxelles contre l’obligation vaccinale visant le personnel soignant.

Cette manifestation, organisée en front commun par la CGSP, le Setca, la CNE, le SLPF et la CGSLB, succède à une semaine de mobilisation devant le cabinet du ministre de la Santé publique Frank Vandenbroucke.

Elle a débuté par un rassemblement sur la place de La Chapelle. Le cortège s’est ensuite mis en branle en direction du carrefour Arts-Loi, aux portes de la “zone neutre” et du siège du gouvernement fédéral. Les manifestants ont fait du bruit et lancé des pétards.

Ils arboraient de nombreuses pancartes et banderoles sur lesquelles on pouvait lire: “Un plan contre la pénurie d’infirmiers maintenant”, “Du bon sens”, “SOS”, “La vraie urgence n’est pas de licencier”, “Sauvez notre système de santé au lieu de licencier”, “Mon corps, mon choix” ou encore “Urgences en souffrance”. Des blouses blanches, brandies au-dessus de la foule, servaient aussi de supports à des slogans. Des pompiers ambulanciers étaient présents en fin de cortège.

Rencontres avec le monde politique

En marge de la mobilisation, une délégation syndicale devait rencontrer des représentants du parti Ecolo à 09h00, du PS à 10h00, du MR à 11h00, ainsi que le ministre de la Santé à 11h45. Des entretiens avec des partis flamands devaient également avoir lieu dans la journée. “Le secteur des soins est atrophié de longue date et a été d’autant plus atrophié par la crise sanitaire“, défend Olivier Nyssen, secrétaire général CGSP. “Sanctionner les travailleurs non vaccinés va accroître encore la pénurie jusqu’à mettre en péril les soins de santé dans le pays. Le fait de diminuer les bras pour les patients va augmenter la charge et l’essoufflement des soignants vaccinés. Des lits déjà ferment actuellement“, a-t-il ajouté.

Un ras-le-bol aussi concernant les conditions de travail

Cela fait très longtemps que la pénurie de personnel soignant se fait sentir en Belgique mais depuis la crise sanitaire, elle ne fait que croître. Les inscriptions dans les écoles pour devenir infirmier ou aide soignant ont diminué de 30% cette année. La faible attractivité du salaire, les conditions de travail difficiles n’attirent plus les jeunes. “Nous avons eu le fonds blouse blanche mais qui n’est pas suffisant, commente Gaëtan Mestag, vice-président du syndicat autonome Union4U. C’est comme si le gouvernement avait investi 1,50 euro par personne. Ce n’est pas suffisant. Il faut aussi que les étudiants en dernière année soient revalorisés.”

Union4U a également écrit une carte blanche directement au premier ministre, Alexander De Croo pour demander une vraie revalorisation afin de faire revenir dans la profession, les 10.000 infirmiers qui ont quitté la profession.

Une désorganisation dans les hôpitaux

Dans tous les hôpitaux, depuis plusieurs semaines déjà, le taux d’absentéisme est très élevé. Aux hôpitaux Iris, on parlait de 20 à 30% d’absence selon les sites. Dans le groupe hospitaliser privé Chirec, on compte plutôt entre 10 et 15% d’absence. A Delta, un lit en soin intensif ne peut pas être ouvert par manque de personnel. La mobilisation d’aujourd’hui rend encore plus difficile l’organisation. “A Delta, nous avons dû annuler toutes les opérations non urgentes car nous n’avons pas assez de personnel, explique Philippe El Haddad, directeur général médical du groupe. J’espère que nous pourrons résorber le retard dans la semaine.”

Philippe El Haddad comprend le ras-le-bol du personnel soignant. La norme d’un infirmier pour 8 patients n’est pas respectée depuis longtemps. Au Chirec, c’est un soignant pour 11 patients. Malgré les fonds dont son groupe hospitalier dispose, il ne trouve pas de personnel qualifié pour occuper le poste. Il a donc tenté de faire venir une trentaine d’infirmières du Liban, mais cela coince à cause notamment des équivalences de diplôme.

■ Interviews de Gaetan Mestag, de Union4u et de Philippe El Haddad, directeur général médical du Chirec par Vanessa Lhuillier

Belga – Photo : Arch. Belga/Eric Lalmand 

■ Un duplex de Jim Moskovic et Béatrice Broutout