Migrants soudanais : la Belgique a violé le droit international, selon Amnesty

Le gouvernement belge a insuffisamment évalué les risques de torture ou de mauvais traitements lors de renvois de migrants au Soudan et a violé ses obligations internationales en matière de non-refoulement des personnes, a affirmé mardi l’ONG de défense des droits de l’Homme Amnesty International, en réclamant le maintien de la suspension de ces rapatriements.

Le principe de non-refoulement interdit aux États de renvoyer toute personne dans un pays où il existe un risque réel qu’elle soit victime de violations graves des droits humains (l’élément substantiel). Ce principe impose également aux États de prendre les mesures nécessaires pour que cette obligation soit respectée (l’élément procédural), rappelle l’ONG, dans une déclaration publiée mardi. “Amnesty International estime que les obligations procédurales n’ont pas été remplies et qu’il est probable que les obligations substantielles aient également été violées“, ajoute le texte.

Selon Amnesty International, le Premier ministre Charles Michel a affirmé au parlement que l’interdiction de torture était sacrée. “Mais force est de constater que, dans la pratique, peu d’efforts ont été déployés pour faire preuve de prudence dans le contexte du renvoi des Soudanais“, a souligné le directeur de la section belge francophone d’Amnesty International, Philippe Hensmans.

Il n’y a même pas eu de vérification quant à la région d’origine de ces personnes. Compte tenu de la situation au Soudan et des nombreux conflits qui y ont font rage, il est pourtant crucial de procéder à une meilleure évaluation des risques de torture et de mauvais traitements sur place“, a-t-il ajouté. Amnesty International dit également condamner la manière dont la Belgique a collaboré avec le gouvernement soudanais par le biais d’une “mission d’identification“. “Une mission d’identification de ce genre n’est pas a priori contraire au droit international, mais elle doit être effectuée avec des garanties suffisantes, ce qui n’a pas été le cas, bien au contraire“, a précisé Philippe Hensmans.

Nous avons constaté que la délégation soudanaise a été mise en contact avec les migrants arrêtés avant même que leur besoin de protection ne soit évalué. La Belgique a ainsi partagé des informations sensibles avec les autorités que ces personnes auraient fui“, a-t-il ajouté. En ne prévoyant ni interprètes ni enregistrements des conversations, les autorités belges n’ont, selon Amnesty International, pas eu de contrôle suffisant sur les échanges qui ont eu lieu. Par ailleurs, le fait que des Soudanais qui avaient précédemment déposé une demande d’asile dans d’autres pays de l’Union européenne aient également été soumis à la mission d’identification montre une fois de plus à quel point la Belgique n’a pas suivi les procédures prévues, ajoute l’ONG.

Dans l’immédiat, Amnesty International demande que l’enquête du Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides (CGRA) en cours serve à mettre la politique de renvoi belge en conformité avec ses obligations internationales et avec le principe de non-refoulement, qu’elle est tenue de respecter en tout temps et pour toute personne, demandeuse d’asile ou non. L’organisation de défense des droits humains insiste enfin pour que “tous les renvois au Soudan continuent d’être suspendus jusqu’à ce que les procédures soient mises en conformité avec les obligations internationales et européennes de la Belgique“.

Belga

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30 janvier 2018 - 18h04
Modifié le 30 janvier 2018 - 18h09