Magritte du cinéma : Violences sexuelles, Proche-Orient, Congo, les artistes prennent positions

La 13e édition des Magritte du cinéma s’est ouverte samedi par le discours de son président, Bouli Lanners, qui a dénoncé les violences faites aux femmes et les abus de pouvoir. D’emblée, l’acteur et réalisateur a rappelé les chiffres des féminicides en Belgique – au moins 26 en 2023 -, avant de souligner que le cinéma avait pour mission d’entendre, de comprendre, d’éclairer et de raconter. Écouter les travailleuses, les victimes, les femmes, les enfants et les hommes qui souffrent aussi du même mal.

Au sujet du cinéma, il a assuré que “le harcèlement, l’abus de pouvoir, le viol ne feront plus jamais partie de ce métier“. “Mais uniquement si nous avons le courage et la volonté d’écouter, de comprendre et de changer“, a martelé le cinéaste, qui a récemment évoqué avoir été harcelé et dénigré par une réalisatrice. “Le monde du cinéma, y compris en Belgique, est trop souvent un monde où l’abus de pouvoir est perçu comme inhérent à la discipline“, a confirmé dans son discours la monteuse Sophie Vercruysse, récompensée avec Raphaël Balboni pour “Le Syndrome des amours passées“. “Un monde où l’exception culturelle a trop souvent mené à un aveuglement exceptionnel envers le rapport de force, l’emprise et la maltraitance. Un monde où les prédateurs peuvent en toute impunité abîmer hommes et femmes.” L’artiste veut la fin de ce système. “Il doit renaître sous un jour nouveau pour que la joie reprenne ses droits: joie de créer dans un cadre sécurisé, joie de mêler nos talents lorsque nous nous sentons en confiance. Rien de sincère ne peut sortir d’une salle de montage sans cette confiance réciproque.”

Manifestations de soutien aux victimes palestiniennes et israéliennes

Après la remise des prix des “Meilleures actrices dans un second rôle“, Sandrine Blancke a invité le public à monter sur la scène du Théâtre National Wallonie-Bruxelles. “Nos pensées vont aux familles et aux proches des 1.200 victimes de l’attentat du Hamas du 7 octobre, mais aussi aux familles des 30.000 Palestiniens et Palestiniennes tués par Israël à Gaza. Nous appelons au retour des otages mais nous disons aussi l’impossible justification morale du massacre humain, matériel, et éthique en cours à Gaza depuis cinq mois“, ont déclaré un ensemble d’acteurs, de réalisateurs, et d’autres travailleurs et travailleuses du monde du cinéma.

“Nous pensons notamment au Congo. Nous ne détournons pas le regard !”

Ces artistes ont dénoncé une guerre contre le récit palestinien. Ils ont en outre témoigné leur solidarité avec tous les peuples victimes de génocide. “Nous pensons notamment au Congo. Nous ne détournons pas le regard !” Arieh Worthalter, sacré “Meilleur acteur” pour son rôle dans “Le procès Goldman” et “Meilleur acteur dans un second rôle” pour “Rien à perdre“, s’est également exprimé sur la situation à Gaza. “J’ai bien conscience qu’ici dans notre petit pays, des gens ont peur“, a-t-il observé. “Des juifs, des musulmans et d’autres, des voisins, de la famille, qui assistent à une montée en puissance d’antisémitisme, d’islamophobie, de racisme, de discrimination en tous genres. Des hommes et des femmes qui voient leur société se déchirer au sujet de leur sort, leurs droits, leurs places, leur légitimité. Des gens qui ne savent plus comment vivre leur histoire nationale sans se voir reprocher leur histoire culturelle, leur passé millénaire.” L’acteur a souligné l’importance d’appeler le gouvernement belge à prendre position face à un autre gouvernement qui “sombre dans une rage et dans une vengeance sans limite“. Lubna Azabal, auréolée “Meilleure actrice” pour son rôle dans “Le bleu du caftan“, s’est également ralliée à ceux qui demandent un cessez-le-feu immédiat à Gaza et la libération des otages. “Mes pensées vont aux enfants de Gaza parce que j’entends leurs cris, leur terreur, leurs larmes, leur détresse, leur solitude, comme j’entends la terreur, l’angoisse, l’horreur et la solitude des otages qui sont encore emprisonnés là-bas“, a-t-elle exprimé.

Belga

■ Un reportage de Marine Guiet et Stéphanie Mira avec les images de la RTBF

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10 mars 2024 - 12h02
Modifié le 11 mars 2024 - 06h41