L’édito de Fabrice Grosfilley : grandes profondeurs

Un sous mari qui implose. Des débris qui ne laissent aucun doute, un contre-amiral qui présente ses condoléances aux familles, des corps que l’on ne retrouvera peut-être jamais. Ainsi se termine l’épopée du titan, ce petit sous-marin de tourisme qui a tenu l’Amérique et une partie du monde en haleine pendant une partie de la semaine. Depuis dimanche, les services de secours avaient lancé des opérations de recherche de grande ampleur pour tenter de retrouver ce petit sous-marin de poche. Dix navires mobilisés, dont un destroyer, comprenant une chambre de décompression et une équipe médicale, un brise-glace, un remorqueur, des avions de reconnaissance aérienne, et même trois robots sondeurs spécialisés dans l’exploration des fonds marins, la mobilisation des moyens de recherches était exceptionnelle. On ne peut s’empêcher de noter qu’elle était autrement impressionnante que lorsqu’on annonce le naufrage d’un chalutier ou d’une autre embarcation de fortune chargés de migrants lorsque ceux-ci tentent de traverser la manche ou la mer méditerranée. On entend parfois parler de justice de classe, ici, c’est le sauvetage en mer qui fait l’étalage de ses inégalités sociales.

Bien sûr, la mort de ces cinq passagers est un drame. On n’ose pas imaginer l’angoisse qui fut peut-être la leur. L’implosion d’un sous-marin en raison d’un défaut de pression, on a du mal à imaginer ce que cela représente. Vous aurez sans doute des explications en long, en large et à travers dans les prochaines heures avec les meilleures spécialistes qui se relaieront à la radio ou à la télévision pour vous expliquer ce qui s’est passé, ou en tout cas ce que l’on peut présupposer de l’accident. Il faut se rappeler que l’on est à 4 000 mètres de profondeurs. Pour l’instant, la certitude, c’est que les sous-marins est au fond, en mille morceaux et que ceux qui étaient à bord, un Américain, un Français, un Britannique et deux Pakistanais, n’avaient aucune chance de pouvoir remonter à la surface. Et, tout ceci nous rappelle que ce genre d’exploration à un cout. Un cout financier d’abord, ce n’est pas pour rien que la plupart des passagers étaient de richissimes financiers. Mais aussi un cout en termes de risque. L’appareil, développé par une société privée, avait éveillé le scepticisme et les mises en garde de la sécurité sous-marine.

Cet accident, il s’est produit sous l’eau. Il pourrait se produire demain dans l’espace, car au tourisme sous-marin répond en écho le tourisme spatial. C’est sans doute le propre de notre époque que des personnes fortunées, s’offre un grand frisson en organisant des expéditions qui étaient autrefois réservées aux états. Ce ne sont plus la NASA, l’ESA ou l’union-soviétique qui développent les fusées de demain et prévoient des expéditions remarquables, qui sont à la fois des prouesses technologiques et des matières à alimenter notre admiration ou nos rêveries, c’est désormais SpaceX ou Virgin Galactic qui s’en chargent. Avec en prise de risque. La différence entre la puissance publique et un opérateur privé en matière de gestion du risque, c’est que le facteur de la rentabilité n’intervient pas du tout de la même manière.

Fabrice Grosfilley 

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23 juin 2023 - 15h35
Modifié le 23 juin 2023 - 15h35