L’édito de Fabrice Grosfilley : Davos, centre du monde
Dans son édito du lundi 15 janvier, Fabrice Grosfilley revient sur le Forum de Davos.
Grands patrons, dirigeants politiques, intellectuels de haut vol : pendant une semaine le chic du chic sera de retour à Davos, une petite station de ski des alpes suisses qui chaque année à la même période accueille le forum économique mondial. 80 chefs d’Etat et de gouvernement sont attendus cette année. Le président Ukrainien Wolodymir Zelensky fera le déplacement. Le roi Philippe et la reine Mathilde ainsi que le Premier ministre Alexander De Croo y représenteront la Belgique. Le Premier ministre chinois Li Qiang et le président français Emmanuel Macron seront également présents. On annonce aussi la présence de près de 2000 dirigeants d’entreprise.
De quoi discutera-t-on à Davos ? D’abord des grands enjeux diplomatiques du moment. De L’Ukraine et du Proche orient notamment. Sur l’Ukraine Wolodymyr Zelensky viendra s’assurer de la solidité des soutiens occidentaux. Continuer de recevoir des munitions et des financements pour pouvoir maintenir un niveau de résistance élevé face aux forces russes. Mais aussi tenter de relancer un plan de paix en dix points qu’il avait présenté il y a un an et qui avait été rejeté par la Russie. La Russie n’est pas présente à Davos, mais certains alliés de Vladimir Poutine comme le Premier ministre chinois, pourraient faire le relais. Le Proche-Orient sera également un gros morceau. Le gouvernement israélien sera représenté, les pays du golfe aussi. La perspective d’arriver à rapprocher les points de vue parait faible.
A Davos, on ne parle pas que de diplomatie. On évoquera aussi intelligence artificielle cette année. Sam Altam, le fondateur d’Open IA, la maison-mère de Chat GPT et le patron de Microsoft Satya Nzadella multiplient les interventions ces derniers temps. Appel du pied aux décideurs : faut-il réguler l’usage de l’intelligence artificielle, comment faut-il envisager de la taxer (attention spoiler, dans l’esprit de ses promoteurs : le moins possible dans les deux cas), quels sont les impacts que son développement peut avoir sur la vie des entreprises et sur l’économie de demain? Une étude du Fonds Monétaire International qui parait ce lundi matin indique que 40% des emplois dans le monde vont être touchés par l’IA, et la proportion monte à 60% pour les pays dit développés comme le nôtre. Vous avez bien lu : 60% des emplois concernés, c’est énorme. Cela ne veut pas dire qu’il vont tous disparaître, mais qu’ils vont au moins changer de nature. Avec des impacts sur les salariés, et des inégalités qui risquent de s’accroitre, entre ceux qui seront remplacés ou soumis à une intelligence artificielle, et ceux qui arriveront à la dominer. Ce sont en particulier les classes moyennes qui pourraient en payer l’addition avec un risque de déclassement social.
A Davos on parlera encore d’énergie, et de réchauffement climatique et de biodiversité, alors que l’on sent que les effort pour le climat ont plutôt tendance à marquer le pas. Pas de ministre du climat par exemple dans le nouveau gouvernement de Gabriel Attal en France, c’est révélateur. On s’inquiètera de la tournure que prend la campagne électorale américaine, et on aura demain une première indication de ce qu’aura donné la première primaire avec le Caucus de l’Iowa côté républicain. On parlera du commerce maritime avec le tir de missile Houtis en mer rouge. Bref c’est un véritable état du monde qui ressortira de ce rendez-vous de Davos. Un rendez-vous dont on pensait qu’il était passé de mode, voir menacé il y a quelques années. Mis en cause par les altermondialistes, boudé par les pays du sud, contesté de tout côté, consacrant la primauté des multinationales sur le politique qui lui semblait soumis, Davos a survécu, Davos semble relancé. Mieux même (ou pire, selon votre point de vue sur la question) Davos semble être le cœur du monde. Une sorte d’assemblée générale des Nations Unies informelle où beaucoup de contacts se font et ou les décideurs réfléchissent au monde de demain. Un monde dont la dimension économique et la dimension politique semblent plus imbriquées que jamais.
Fabrice Grosfilley