Nicole de Moor suspend l’accueil des hommes seuls demandeurs d’asile : les associations s’indignent

Nicole de Moor a décidé de ne plus accueillir, temporairement, les hommes seuls demandeurs d’asile en Belgique dans le réseau Fedasil.

“Ne voulant pas être en retard sur les événements, je prends d’ores et déjà la décision de réserver toutes les places disponibles aux familles avec enfants. Le nombre élevé de demandeurs d’asile arrivés dans notre pays ces deux dernières années pèse encore sur le réseau d’accueil”, a annoncé le cabinet de la secrétaire d’État à l’Asile et la Migration.

Elle justifie la décision : “Je veux absolument éviter que des enfants se retrouvent à la rue“.

Une décision d’ores et déjà contestée, alors que de nombreux demandeurs d’asile errent déjà dans les rues de Bruxelles, faute de place dans les centres d’hébergement.

Alain Maron, ministre bruxellois de l’Action social craint les conséquences de cette mesure : “Cette décision va engendrer un nouvel afflux de public en errance, sans prise en charge ni perspective. Avec des effets délétères à Bruxelles en tout cas et pas qu’au Midi. Le Federal DOIT assumer ses responsabilités et obligations nationales et internationales.“, a t-il déclaré sur X, anciennement Twitter.
Même réaction du côté de Bernard Clerfayt (DéFI) : “Par cet abandon, le gouvernement De Croo laisse des milliers de migrants errer dans les rues où les gares de Bruxelles. Et qui fera ensuite du ‘Brussels bashing’?
Interrogée à ce sujet par Le Soir, le cabinet de Nicole De Moor, se dit conscient que certaines personnes n’auront pas de places. Il mise sur la recherche de solution de logement alternatifs, ou les structures d’accueil pour sans abris.
Plus globalement, au fédéral, on s’insurge aussi : Pierre-Yves Dermagne, Vice-Premier ministre PS, s’étonne que la majorité Vivaldi, n’ait pas été consulté.
Pour Georges Gilkinet, vice premier ministre Ecolo, l’État fédéral doit respecter ses obligations à l’égard de tous les candidats à l’asile : “Des solutions doivent être trouvées pour mettre fin aux condamnations dont il est la cible et surtout pour faire en sorte qu’aucun demandeur d’asile ayant droit à l’accueil ne soit contraint à dormir dehors cet hiver.

Le Samusocial s’alarme

La décision de la secrétaire d’État à l’Asile et la Migration va entraîner une augmentation du public sans abri en rue et du nombre de refus de personnes en demande d’hébergement, estime le Samusocial dans une réaction mercredi. Et ce, “alors que des centaines de personnes – hommes, femmes et familles – doivent dormir en rue étant donné les capacités limitées de nos centres déjà saturés“, ajoute l’asbl.

Cette décision annonce également le renforcement prochain de la crise de l’accueil, alors que les besoins vont encore augmenter à l’approche de l’hiver, selon le Samusocial. “Nous regrettons de devoir constater l’absence totale d’information et de coordination avec les acteurs de terrain qui seront pourtant les premiers impactés par cette décision“.

Le Samusocial conclut en disant que “s’il faut bien entendu assurer aux enfants et aux femmes un accueil, l’État fédéral doit respecter ses obligations à l’égard de tous les candidats à l’asile. Des solutions doivent être trouvées pour qu’aucun demandeur d’asile ayant droit à l’accueil ne soit contraint à dormir dehors“.

“Un coup de canif en plus dans l’Etat de droit”, estime le Ciré

L’association “Coordination et initiatives pour réfugiés et étrangers” (Ciré) n’est guère étonnée par l’annonce de la secrétaire d’Etat à l’Asile. Selon elle, il ne s’agit de rien d’autre que de l’officialisation d’une pratique en cours depuis deux ans.

Cela officialise une pratique à l’oeuvre depuis deux ans. Nous en sommes presque à ne pas comprendre les réactions indignées de certains membres du gouvernement alors qu’ils savent bien ce qui se passe. Depuis deux ans, nous dénonçons que les hommes seuls restent sur le carreau. Aujourd’hui, on porte un coup de canif en plus dans l’Etat de droit. En plus, cette décision ne réglera rien. Cela fait un certain temps que l’on s’attend à ce que, dès la semaine prochaine, des familles ne reçoivent pas de place“, a expliqué mercredi la directrice générale, Sotieta Ngo, à l’Agence Belga.

L’Etat belge a déjà été condamné des milliers de fois pour défaut d’accueil de demandeurs d’asile le temps que leur demande soit examinée. Les actions en justice n’ont pas cessé et se poursuivront, avertit le Ciré.

Selon l’association, il est faux d’affirmer que l’Etat fait tout ce qu’il peut. Il a la possibilité de recourir à des hôtels pour trouver des places d’accueil et d’activer un plan de répartition entre communes, ce qu’il ne fait pas. “Le problème, c’est la volonté politique, le blocage est politique“, a souligné Mme Ngo.

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M.D. avec Belga – Photo : Belga Image

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30 août 2023 - 17h30
Modifié le 31 août 2023 - 07h22