La grille des loyers rate son public visé : “La plupart des plaignants sont des locataires de logement tout confort”
En mai dernier, les pouvoirs de la commission paritaire locative à Bruxelles ont été renforcés afin de mieux lutter contre les loyers abusifs. Suite à cette réforme, le locataire peut désormais solliciter une révision de son loyer auprès de cette commission s’il dépasse un certain pourcentage du loyer de référence renseigné dans la grille indicative des loyers. Plus de cinq mois plus tard, l’heure est à un premier constat.
Premier constat, sur une centaine de dossiers, 80% des plaintes déposées donnent un avis favorable en faveur du bailleur et non du locataire.
Pour Thibaud de Menten, coordinateur de l’ASBL “Loyers négociés”, ces chiffres s’expliquent en partie par les profils des plaignants. “Il s’agit en général de locataires avec des logements tout neufs, parfois avec un confort exceptionnel. Je pense clairement qu’il y a une information qui ne circule pas assez. Cette grille est non contraignante. Les plaignants pensent qu’ils vont pouvoir obtenir une réduction alors que le logement présente un niveau de confort qui justifie tout à fait cette différence.”
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Olivier De Clippelle, président de la section bruxelloise du Syndicat national des propriétaires, estime le gros problème porte sur la méthode de calcul de le grille des loyers actuelle. “Elle est truquée, ce n’est pas la réalité. On devrait plutôt prendre les baux enregistrés et faire suivre la loi qui demande comme loyer de référence le loyer médian. On en est pas du tout là. On a publié une grille factice sur base d’éléments qui remontent dans le temps“, déplore-t-il. “Cela donne de faux espoirs à des locataires qui espèrent ainsi voir leur loyer réduit.”
“Les publics plus fragiles ont peur des conséquences”
Cela fait longtemps que la méthode de calcul de la grille tarifaire des loyers fait débat entre locataires et propriétaires. Selon la dernière en date, si le loyer demandé est 20% plus haut que le loyer de référence fixé, le locataire peut se plaindre d’un loyer abusif. Dans les faits, on voit que ce n’est pas si simple. “Je pense que cette grille est le meilleur outil dont nous disposons, mais elle reste indicative”, rappelle Thibaud de Menten. “Cette grille donne des indications qui – sans être parfaites – sont suffisamment fiables pour des logements qui ne présentent pas d’éléments de confort supplémentaire. (…) Mon plus grand regret, c’est de ne pas avoir vu passer beaucoup de dossiers pour des logements qui présentent des défauts de qualité.”
C’est à ces locataires que la réforme s’adressait en particulier. “Le problème est que ces publics plus fragiles ont peur des conséquences. S’ils subissent un loyer abusif, c’est précisément parce qu’ils n’ont rien trouvé d’autre comme solution. La crainte de ne pas trouver autre chose et de se retrouver dans la même situation qui les ont amenés à conclure ce type de bail existe.” Pour Thibaud de Menten, le besoin d’accompagnement est indispensable, mais aujourd’hui les travailleurs sociaux sont débordés. Pour Olivier De Clippelle, il faudrait plutôt proposer aux bailleurs une réduction de la fiscalité s’ils louent à des prix fixés par le gouvernement. “Il faut travailler avec les bailleurs et pas contre eux“, insiste-t-il.
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■ Une interview de Thibaud de Menten et Olivier De Clippelle au micro de Jean-Christophe Pesesse et Valérie Leclercq dans + d’Actu





