Inscriptions dans le secondaire : comment créer de nouvelles places d’ici la rentrée ?

785 places pour … 913 demandes. Pour la première fois, le nombre d’élèves en attente d’une place en première secondaire à Bruxelles excède l’offre. Il faut d’urgence créer des places. Un défi : il reste à peine plus de deux mois.

Le calcul est simple : d’ici la rentrée, il faut ouvrir 130 places dans l’enseignement bruxellois, nous confirme Julie Lumen, la présidente de la CIRI, la Commission Inter-Réseaux des inscriptions. La ministre de l’Enseignement Caroline Désir (PS) a demandé aux pouvoirs organisateurs et aux écoles de la capitale d’en créer d’urgence. S’il est trop tôt pour savoir si des élèves devront changer de région pour trouver un établissement au premier septembre, il est certain en revanche qu’il faut faire vite.

Comment créer de nouvelles places à la veille des vacances ? La dynamique est lancée depuis des semaines et les chiffres s’améliorent, assure le cabinet de Caroline Désir. « Nous avons jusqu’à fin août pour régler la situation. »

Ouvrir de nouvelles places

La création de place peut emprunter deux voies :

► Soit la densification de classes complètes : celles-ci peuvent accueillir en principe jusqu’à 24 élèves (nombre maximal d’élèves par classe) mais en période de pénurie la norme peut monter jusqu’à “24 + 1”, autrement dit 25 élèves. Vu l’urgence, ce sera la piste la plus privilégiée, selon Julie Lumen. Ce qui revient à ajouter un élève dans des classes réputées déjà complètes.

► Soit une école dispose d’un local, d’un bâtiment qu’elle peut utiliser pour y ouvrir une classe supplémentaire.

C’est le cas de la Ville de Bruxelles qui a notamment pris en location des espaces pour augmenter sa capacité d’accueil d’ici la rentrée. Elle proposera 240 places en plus en 1ère secondaire d’ici septembre : 100 places à l’Athénée Robert Catteau (rue Ernest Allard, près du Palais de Justice), qui seront implantées dans les bâtiments de l’école Charles Buls (boulevard du Midi, près de la gare), 100 places à l’Athénée des Pagodes, là aussi sur un autre site, non loin de l’école, mais qui nécessite des travaux et un loyer, une trentaine de places seront aussi créées au Lycée Dachsbeck et 8 au Lycée Emile Jacqmain.

Précisons que ces nouvelles places sont comprises dans le chiffre de 785 places actuellement disponibles, cité ci-dessus.

L’opération bénéficie du soutien financier de la Fédération Wallonie-Bruxelles, le détail de la répartition des coûts ne nous pas été communiqué. Mais de telles ressources immobilières ne sont pas à la portée de toutes les écoles, loin de là.

Le réseau WBE (Wallonie-Bruxelles Enseignement) est, lui aussi, mis à contribution. Il est prévu d’ouvrir six classes (de 25 élèves) dans six écoles bruxelloises, soit 150 places, nous indique Géraldine Kamps, la porte-parole du réseau : à l’athénée royal de Koekelberg, de Ganshoren, d’Auderghem, Victor Hugo (Haren), Rive Gauche (Laeken), et Crommelynck (Woluwe-Saint-Pierre). L’Athénée royal d’Evere complètera peut-être la liste. Il s’agira bien souvent d’aménagement de locaux ayant une autre affectation.

Pour chaque nouvelle classe ouverte, la Fédération Wallonie-Bruxelles garantit le personnel d’encadrement nécessaire. Encore faut-il le trouver. À la Ville de Bruxelles les recrutements sont en cours « et avec notre plan anti-pénurie, cela ne devrait pas poser de problèmes », assure le cabinet de Faouzia Hariche (PS), l’échevine de l’enseignement.

Densifier, la solution ?

À la CGSP, Joseph Thonon est sur ses gardes. « Le respect de la norme taille/classe est l’une de nos vieilles revendications, or systématiquement on y déroge. », déplore le président de la CGSP-Enseignement, qui constate que dans les faits, à Bruxelles, la norme est passée à 25 élèves par classes dans de nombreux d’établissements. « 24, c’est déjà beaucoup », continue le représentant syndical, « mais si on encourage les écoles à monter jusqu’à 25, les enseignants n’arriveront plus à travailler sérieusement. Or les premières années du secondaire sont déterminantes pour la scolarité des élèves. » Pour garantir un enseignement de qualité, inclusif et ouvert à la différenciation, la CGSP préconise des classes de 18 à 20 élèves. « Nous estimons qu’il faut au contraire réduire la taille des classes, pas l’augmenter. », conclut-il.

La création de places à la traîne

D’autant que le débat sur la nécessité d’ouvrir de nouvelles places n’est pas neuf. Avec le boom démographique des années 2000, des moyens budgétaires ont été dégagés pour permettre la création d’écoles ou de places. Mais le cabinet du ministre des Bâtiments scolaires et du Budget, Frédéric Daerden (PS), le reconnaît lui-même : les travaux accusent de nombreux retards et les places prévues n’ont pas toutes été créées.

À Bruxelles, 8713 places ont été créées dans le secondaire entre 2010 et 2020. Et 7453 places supplémentaires sont annoncées pour 2025, selon les chiffres de perpsective.brussels. « C’est clair qu’il y a du retard », concède Julie Lumen, avec cette fois sa casquette de facilitatrice École à perspective.brussels. « Si on se projette en 2025, on peut considérer qu’il y a assez de projets, mais il est certain que dans la vie d’un projet il y a des risques de ne pas aboutir dans les délais prévus, on le sait. » Il faut surtout espérer ne pas perdre de places d’ici là, avec des fermetures d’écoles ou de locaux jugés insalubres. Car si l’offre est aujourd’hui insuffisante, dit-elle, c’est aussi à cause des suppressions de places.

À partir de 2025, la pression démographique devrait amorcer sa décrue. De quoi commencer à souffler ? Certes, mais pas dans l’immédiat.

S.R.