Décès d’Ibrahima Barrie : deux policiers reconnus coupables de non-assistance à personne en danger

Deux policiers ont été reconnus coupables, mercredi après-midi par le tribunal correctionnel de Bruxelles, d’avoir renoncé ou refusé de porter secours à un jeune homme victime d’un malaise cardiaque, survenu dans une cellule de police en janvier 2021.

Ils ont écopé d’une peine de sept mois de prison avec sursis. Par ailleurs, un troisième policier a été reconnu coupable de coups et blessures sur la victime peu avant son malaise. Il a écopé d’une peine d’un mois de prison avec sursis.

Quatre policiers étaient prévenus devant le tribunal dans l’affaire du décès d’Ibrahima Barrie, un jeune homme de 23 ans décédé le 9 janvier 2021 dans un commissariat de la zone de police Bruxelles-Nord. Celui-ci avait été interpellé vers 19h00 après avoir tenté de fuir des policiers qui voulaient le contrôler près de la gare du Nord.

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Au commissariat, il s’était effondré vers 19h30, victime d’un malaise cardiaque. Il avait été transporté à l’hôpital ensuite, mais n’avait pas pu être réanimé. Son décès avait été constaté à 20h22.

Il ressort de l’enquête qu’Ibrahima Barrie souffrait d’une anomalie cardiaque qu’il ignorait. Selon le médecin légiste, son décès résulte de ce problème de santé, associé à une prise d’ecstasy et de cannabis, bien qu’en faibles quantités. Le fait que le jeune homme avait fait un effort physique en tentant de fuir le contrôle de police entre aussi en ligne de compte selon le professionnel de médecine.

Par ailleurs, selon les images des caméras de vidéo-surveillance du commissariat, cinq à sept minutes se sont écoulées entre la perte de conscience d’Ibrahima Barrie et la réaction des policiers.

Les conclusions du tribunal

Avant tout, le tribunal a estimé que la prévention d’arrestation illégale ou arbitraire n’était pas établie. Il a affirmé que les policiers “ont pu estimer qu’Ibrahima Barrie perturbait la tranquillité publique” et donc vouloir procéder à son contrôle.

Ensuite, le tribunal a établi que l’un des quatre prévenus s’était rendu coupable de coups et blessures sur la victime en la repoussant violemment alors qu’elle était assise sur une chaise et qu’elle commençait à piquer du nez. Un tel geste brutal pour redresser la victime n’était pas nécessaire, selon le juge, car celle-ci n’était pas violente et n’avait pas tenté de se soustraire à la vigilance des policiers. L’usage de la force dans cette situation n’était donc pas justifié.

Il a ensuite estimé que deux autres prévenus, qui ont pu voir que l’état de la victime se dégradait au fil des minutes, notamment parce qu’elle chancelait, glissait de sa chaise et fermait les yeux, sont coupables de ne pas lui avoir porté secours.

Le tribunal a précisé que, dans un premier temps, “les signaux d’un malaise cardiaque n’étaient pas évidents“. De plus, a relevé le juge, il est avéré que certaines personnes privées de liberté simulent parfois des malaises. En outre, les déclarations des policiers présents concordent lorsqu’ils affirment que la victime ne s’est pas plainte d’un mal quelconque. Ceux-ci n’ont donc probablement “pas pu se rendre compte du péril grave qui menaçait la victime“.

Néanmoins, dans un second temps, “l’état de la victime n’était plus du tout le même“, a pointé le juge, et il était “manifeste” qu’il se dégradait. Pour le tribunal, les deux policiers concernés ont “ignoré la situation de danger portée ainsi à leur connaissance” et ce d’autant plus que les policiers “ont une responsabilité particulière vis-à-vis des personnes privées de liberté qui, par définition, sont vulnérables en raison de cette situation“. Il a ajouté qu’Ibrahima Barrie “ne pouvait espérer d’aide autre que celle venant des policiers présents puisqu’il était arrêté“.

Par contre, le tribunal a écarté la prévention d’homicide involontaire, considérant que “les éléments du dossier ne permettent pas d’affirmer que le décès ne serait pas survenu si les policiers n’avaient pas commis de fautes“.

Le quatrième policier prévenu a quant à lui été acquitté de toutes les préventions.

► Revoir notre reportage | Décès d’Ibrahima Barrie : deux policiers devant le tribunal correctionnel ce vendredi

Belga – Photo : BX1

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26 juin 2024 - 15h04
Modifié le 13 août 2024 - 15h59