Les Belges dépensent 70 millions d’euros en achats transfrontaliers, selon la Fevia
Face à des chiffes économiques en berne pour la deuxième année consécutive, et alors que les élections se profilent doucement à l’horizon, la fédération de l’industrie alimentaire Fevia a présenté lundi les quatre axes principaux de son mémorandum adressé aux responsables politiques. Le secteur demande notamment la création d’un “ministre de l’Industrie” et appelle à davantage de cohérence politique entre les différents niveaux de pouvoirs.
“La marge de nos entreprises est sous pression. En 2022, elle a chuté à 2,8% alors qu’on était encore à 3,7% en 2021”, expose Carole Dembour, conseillère économique auprès de la Fevia. “On s’attend à ce que 2023 ne soit pas meilleure puisque le volume des ventes a fortement diminué, ce qui va peser sur le chiffre d’affaires. Une baisse du chiffre d’affaires a d’ailleurs déjà été constatée sur deux trimestres consécutifs cette année. Techniquement, on pourrait se dire qu’on est en récession”, souligne-t-elle.
Une enquête de la fédération menée auprès de ses membres le mois dernier a d’ailleurs mis en lumière que quatre entreprises sur dix s’attendent à une nouvelle baisse de leur rentabilité dans les six mois à venir. La hausse des prix, et son impact sur le pouvoir d’achat, est citée comme la tendance affectant le plus l’activité à court terme. Il convient donc, selon le plus grand secteur industriel du pays, de créer des conditions de concurrence équitables avec les pays limitrophes. Outre le sempiternel handicap salarial (qui avoisine les 30%) de la Belgique par rapport à ses voisins, le plat pays est confronté à une “lasagne de taxes” qui pèse sur le secteur.
Et la Fevia d’illustrer avec l’exemple d’une bouteille de limonade qui coûte 11% plus cher en Belgique. “D’année en année, les achats transfrontaliers prennent de l’importance”, signale la fédération, qui évalue à “70 millions d’euros” le montant dépensé par les Belges de l’autre côté de la frontière au cours des trois premiers trimestres de 2023. “Cela représente plus que sur l’ensemble de l’année 2022 et se traduit par une perte de recettes fiscales pour l’État belge évaluée à 85 millions d’euros”, note Carole Dembour. La fédération de l’industrie alimentaire demande dès lors aux responsables politiques d’éliminer les handicaps concurrentiels afin de permettre aux entreprises alimentaires de combattre leurs adversaires “à armes égales”. La Fevia appelle également à davantage de cohérence politique alors que la “fragmentation des pouvoirs au sein et entre les différents niveaux politiques (européen, fédéral, régional, etc.) est source de complexité, d’incohérence et d’inefficacité”.
Elle réclame à cet égard la création d’un “ministre de l’Industrie”, qui aurait une vue d’ensemble de toutes les compétences concernées et veillerait à la coordination, au lieu de la dizaine d’interlocuteurs actuels présents à différents niveaux de pouvoir. En outre, dans un monde en pleine transition énergétique, et alors que le secteur alimentaire est un consommateur d’énergie important, la Fevia demande d’aider les petites et moyennes entreprises à instaurer des mesures d’efficacité énergétique, en mettant notamment à leur disposition des spécialistes en la matière. Enfin, la fédération requiert une “sécurité juridique et un cadre stable” pour que les “entreprises sachent clairement quels investissements et quelles actions sont alignés sur la politique de demain”.
“Une politique cohérente avec une vision tournée vers l’avenir devrait offrir des perspectives et de la stabilité à nos entreprises”, avance Bart Buysse, CEO de Fevia, soulignant qu'”investir dans une industrie alimentaire forte est la garantie d’un avenir durable”. À cet effet, il recommande d’ancrer localement l’industrie alimentaire afin de “garantir notre approvisionnement et de ne pas devenir dépendants des pays étrangers”. L’industrie alimentaire belge compte plus de 4.000 entreprises, composées à 90% de PME, et emploie plus de 100.000 personnes. Son chiffre d’affaires avoisine les 76 milliards d’euros, soit 21% de l’industrie belge.
Belga – photo : Belga