“Ce jour-là, le silence n’était plus possible” : sur la place Bethléem, des parents appellent à l’aide
À Saint-Gilles, dans le quartier Bethléem, les habitants lancent un cri d’alerte après la découverte d’impacts de balles dans une école. Une mère de famille, habitante du quartier, témoigne sous anonymat, de la situation devenue invivable.
“L’école des Quatre Saisons, qui s’ouvre sur la place Bethléem, est le coeur de notre quartier. Il y a quelques jours, des tirs ont éclaté en pleine nuit. Des impacts de balles ont été découverts dans les murs de l’école, par les enfants eux-mêmes. Ce jour là, le silence n’était plus possible.”
Ce témoignage, intitulé Journal d’un jeune parent sur la place Bethléem, décrit un quotidien rythmé par la violence, la misère, les trafics, et surtout la peur. “Aujourd’hui encore, les scènes se succèdent, insoutenables. Des corps immobiles, parfois gisants, dénudés. Des visages déformés, des cris. La violence du réel s’y montre dans toute sa crudité”.
Cette maman révoltée, partage deux souvenirs marquants : “Il y a cinq minutes seulement, en sortant du tram avec mes enfants, je viens de voir une femme, avec ses amis dans un état second, édentée, le visage et les mains lacérées de coupures, vêtements ensanglantés de la tête aux pieds. La seconde image, celle d’un homme très maigre, amputé, allongé en travers du trottoir un matin, un de mes enfants m’a demandé : ‘Pourquoi le monsieur, il est mort dans la rue, il n’a pas d’habits et il n’a plus de pieds?’, comment répondre à une telle question sans perdre pied soi-même?”
“Un homme dans un état second, essayait de câliner des enfants”
Dans ce récit, qui ne relève pas de la fiction, les parents s’inquiètent pour la place des enfants, qui n’est plus un lieu de jeu. “Autrefois, on allait sans crainte autour du toboggan. Aujourd’hui, avant d’y laisser les enfants s’approcher, on ramasse les morceaux de verre, on scrute les personnes autour”, avant de raconter quelques moments douloureux : “J’ai vu un petit se blesser gravement au pied à cause des bris de bouteilles d’alcool. Un homme dans un état second, essayait de câliner des enfants…”
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Les parents confient ne plus rester sur la place après l’école, par instinct de survie. “Lorsque le bourgmestre nous dit ‘il faut occuper l’espace public, se le réapproprier’, j’aimerais qu’il médite cette phrase à la lumière de nos témoignages”.
Face à l’inaction, c’est un sentiment d’abandon qui domine. Malgré les discours, rien ne change durablement. Les trafics reprennent, les violences aussi, déplorent les habitants. “La place Bethléem n’est pas une “zone de non-droit. C’est un morceau de ville où se concentre tout ce que notre société produit d’inégalités et d’indifférence.”
Les habitants ne réclament pas de simples mesures symboliques, mais une action politique réelle, humaine, et de long terme. “Ce que nous demandons n’a rien d’extraordinaire : vivre, respirer, marcher sans crainte. La place Bethléem n’est pas perdue. Elle attend simplement qu’on lui rende la vie, la sécurité et l’espoir. Mais cette fois, nous ne contenterons plus de promesses.”
Unis, les parents appellent ceux qui gouvernent le pays à venir voir leur quotidien, et à assumer leurs responsabilités.
Rédaction





