Affaire Sky ECC : quatorze ans requis contre Ali R., quatre contre Naïma A., trois peines différentes pour Kamel A.
Voici les peines requises par le parquet fédéral ce mardi 30 janvier.
Quatorze ans requis contre Ali R.
Selon le parquet fédéral, Ali R. a non seulement dirigé une organisation criminelle active dans la culture et le trafic de cannabis, mais a également été membre d’une autre organisation qui projetait d’importer de la cocaïne vers la Belgique. Pour appuyer ses dires, le procureur s’est basé sur plusieurs photos retrouvées sur le téléphone du prévenu, notamment des images d’arme à feu, de “pains” de cocaïne, de plantations de cannabis et d’un faux document d’identité au nom d’un autre prévenu, Richard G. Plusieurs conversations retrouvées sur un GSM équipé de la messagerie Sky ECC démontrent également l’implication d’Ali R. dans ces trafics, selon le parquet. L’homme y évoque notamment un hélicoptère et un bateau destiné au transport de marchandise.
“Monsieur R. nous dit qu’il est mythomane, mais on retrouve effectivement des recherches pour un bateau, un prix est même évoqué”, a précisé le procureur fédéral. “Il est aussi question du transport de cannabis depuis le Maroc vers l’Espagne en hélicoptère et de transport par bateau depuis l’Afrique et l’Amérique latine.” “Quand monsieur R. nous dit que la cocaïne, ça le dégoûte, ces conversations prouvent le contraire”, a asséné le ministère public. Le prévenu est en aveux des faits concernant le cannabis, mais nie les autres préventions.
Le parquet a enfin rappelé qu’il s’agissait de la 6e détention d’Ali R. et qu’il se trouve donc en état de récidive. L’homme a notamment déjà été condamné à huit ans de réclusion pour avoir dirigé une organisation criminelle impliquée dans le trafic de stupéfiants. Concernant la femme du prévenu, Sarah R., le procureur l’a qualifiée de “secrétaire de luxe” après avoir présenté des conversations montrant que celle-ci donnait des instructions sur demande de son mari. “Ces messages traduisent la connaissance que madame avait des activités de monsieur. Elle avait un rôle logistique”, a assuré le ministère public. “Ils montrent aussi que madame a voulu s’en distancier à un moment.”
Les sanctions demandées par le parquet à l’encontre des deux prévenus sont des peines fermes et sont assorties d’amendes et de confiscations. Trois ans de prison ont aussi été requis contre John B., un homme de paille nommé à la tête d’une société gérée en réalité par Ali R. et qui lui servait pour son trafic de cannabis.
Trois peines différentes contre Kamel A.
Le sexagénaire est l’un des principaux prévenus du procès Encro, relatif à une organisation criminelle active dans le trafic de drogue et mise au jour après le décryptage des messageries Encrochat et Sky ECC. Les écoutes menées sur son téléphone montrent des contacts avec plusieurs prévenus importants du dossier, notamment Eridan M. G., Joachim B. ou encore Abdelwahab G.
Le ministère public a longuement procédé à la lecture de plusieurs extraits des conversations de Kamel A. avec ses complices. “L’implication de monsieur A. est claire dans ces conversations”, a affirmé le procureur. Il est chargé d’un rôle dirigeant. Ce n’est pas la personne la plus haut placée, mais il donne des instructions.”
Et l’accusation de rappeler que lors des perquisitions menées aux quatre adresses du prévenu et de sa femme, Naïma A., également inquiétée dans ce dossier, de l’argent liquide en grande quantité et un vaste laboratoire de faux documents avaient été découverts.
En cavale, Kamel A. continue d’organiser des trafics entre l’Amérique Latine et l’Europe. “Je le considère comme un des organisateurs des importations, de la gestion des labos et des exportations”, a expliqué le parquet.
Après avoir rappelé que l’homme avait déjà été condamné à cinq ans de prison pour des faits de même nature, le ministère public a requis une peine de 15 ans pour avoir dirigé une organisation criminelle active dans le trafic de stupéfiants. Dix-huit mois de prisons ont également été demandés pour détention d’armes prohibées et 3 ans pour l’implication de Kamel A. dans le laboratoire de faux documents.
Quatre ans requis contre Naïma A.
Le ministère public reproche d’abord à Naïma A. d’avoir sous-loué et meublé un appartement à d’autres prévenus impliqués dans la fabrication et le trafic de cocaïne. Lors des perquisitions menées dans le logement, 300.000 euros en liquide et des “pains” de cocaïne avaient été découverts. Dans son lieu de vie, une maison en Région bruxelloise, des bidons de produits chimiques pouvant servir à la confection de drogue ont aussi été retrouvés.
Mais le procureur a également insisté sur les mouvements suspects constatés sur les comptes de la prévenue. En tout, plus de 115.000 euros en espèces auraient transité par ses deux comptes bancaires avant d’être utilisés pour payer les loyers et les charges de ses trois biens immobiliers. Naïma A. est en aveu d’avoir reçu de l’argent de son mari mais affirme qu’elle pensait que ces revenus venaient de la revente de cigarettes. Des transferts de fonds suspects vers le Paraguay et l’Espagne, entre autres, ont aussi été détectés.
“Elle a apporté une aide en connaissance de cause”, a affirmé le parquet. “Même si elle pensait vraiment qu’il ne s’agissait que de cigarettes, cela reste illégal. Madame savait donc que cet argent était illicite. On a un faisceau d’éléments qui montre qu’elle était au courant. Elle prend part aux discussions de Kamel A., elle pose des questions…”
“Elle a eu un rôle important, elle doit donc être sanctionnée de façon sévère, d’autant plus qu’elle ne prend pas ses responsabilités et se présente comme une victime de son mari”, a ajouté le procureur.
Et ce dernier de réclamer une peine de quatre ans d’emprisonnement en s’opposant à un sursis. Une amende, une confiscation et la saisie de l’un des biens immobiliers de la prévenue ont en outre été demandés.
Belga – Photo : Belga