L’édito de Fabrice Grosfilley : la police, la violence et les jeunes
Des barricades, des voitures incendiées, des feux d’artifices utilisés comme des lance-roquettes : pour la deuxième nuit consécutive des affrontements violents ont opposés de jeunes français aux policiers, à Nanterre dans la banlieue ouest de Paris, mais aussi à la Courneuve, à Saint-Denis, au Blanc-Mesnil, et dans de nombreuses autre villes de France. Cette flambée de violence est la conséquence de la colère ressentie après le décès d’un jeune de 17 ans, Nahel, tué d’une balle tirée à bout portant par un policer parce qu’il et a tenté de se soustraire au contrôle policier.
On ne va pas faire de Nahel un héros. Le jeune homme était connu des services de police, et quand on est face à un policer, la règle est d’obtempérer. Ce qui provoque cette immense vague de protestation c’est la disproportion entre le moyen utilisé, une balle tirée dans la poitrine à quelques centimètres contre un refus d’obtempérer, alors que les policiers n’étaient en rien menacés dans leur intégrité physique. La légitime défense ne sera pas plaidable c’est une évidence. Les premières déclaration du président français Emmanuel Macron et de sa première ministre Élisabeth Borne révèlent pour une fois un malaise qui semble gagner le sommet de l’État. “Les images choquantes” diffusées sur les réseaux sociaux démontrent “une intervention qui n’est manifestement pas conforme aux règles d’engagement de nos forces de l’ordre”, a estimé la Première Ministre tandis que le Président de la République évoquait lui un acte “inexplicable et inexcusable”. Deux déclarations qui ont enflammé le débat politique français. Pour les syndicats policiers et pour l’extrême-droite française, qui parlent très souvent le même langage, le chef de l’Etat et la première ministre sont sortis de leur rôle et ne respectent pas la présomption d’innocence. Certains syndicats parlent même de “récupération indécente” qui encourageraient “la haine anti-flic “.
Est-ce un sujet la relation des jeunes avec la police ? À l’évidence la réponse est oui. C’est même un sujet de forte préoccupation. On a pu voir en France ces derniers années une montée en puissance de la violence policière. Lors des manifestations des gilets jaunes, ou lors des manifestations anti-bassines par exemple, la spirale de la violence est en marche et les blessés se comptent désormais par dizaines. Lors des contrôle de police aussi il est de plus en plus fréquent que les policiers français fassent usage de leur arme à feu. Avec des drames à l’arrivée. En 2022 en France 13 personnes sont décédées à la suite d’un refus d’obtempérer. Et c’est parfois pour un motif futile, parce qu’on roule sans assurance par exemple.
Cette question de la violence policière ne se limite pas à la France. L’agression subie par des élèves de l’athénée du Sippelberg lors d’une sortie kayak est là pour nous le rappeler. Il y a chez certains policiers une forme de condescendance pour la jeunesse bruxelloise qui peut facilement basculer dans la haine et dans la violence gratuite. Avec des contrôles à répétition, des brimades, un manque de respect quand ce ne sont pas des postures ouvertement racistes. Ces tensions contrastent fortement avec des opérations de sensibilisation au cours desquelles des policiers vont au devant des jeunes, avec des rencontres organisées dans les écoles bruxelloises ces derniers jours par exemple. Des opérations de parrainage où policiers et jeunes vont apprendre à se connaitre, à sympathiser même. Se connaitre c’est le premier pas vers un respect mutuel. Ce respect que les jeunes doivent à la police et que la police doit aux jeunes, c’est le ciment indispensable d’une forme de paix sociale. Si on ne veut pas que ce ciment se lézarde, il faut y-être attentif. Et que la police et ceux qui la dirigent ne nous donnent plus l’impression de rechigner lorsqu’il faut sanctionner l’un des leurs.