Covid Safe Ticket : il est légal de demander la carte d’identité, pas de l’exiger
Est-il possible pour un patron d’établissement de demander une preuve d’identité en même temps que le covid safe ticket? A priori oui même si cela pose des questions plus larges de légalité et de vision de société. Des recours ne sont donc pas à exclure.
Dans l’avant projet d’ordonnance du gouvernement bruxellois, il n’est pas fait mention du contrôle d’identité lors de la présentation du covid safe ticket à l’entrée d’un restaurant, d’un événement ou d’un théâtre. Par contre, cela est indiqué dans l’accord de coopération entre les entités fédérées et le fédéral qui réglemente l’utilisation du covid safe ticket. Le titulaire du CST doit prouver son identité avec un papier officiel qui indique son nom et dispose d’une photo. S’il refuse de montrer une pièce d’identité, le gérant du lieu peut lui interdire l’accès. Cependant, il ne peut pas conserver les coordonnées de la personne et ne peut les demander que pour vérifier que le client est bien le détenteur du covid safe ticket présenté. D’ailleurs lorsqu’on scanne le QR code du CST, le nom s’affiche ainsi que la couleur de validité, vert ou rouge mais rien n’est enregistré.
Le Conseil d’Etat n’a pas fait de remarque concernant cette disposition. Par contre, l’autorité de protection des données en a émises et pour Manuel Lambert, conseiller juridique à la Ligue des droits Humains, cette disposition pose question. “Dans une société démocratique, on ne peut pas contrôler l’identité. Cela est dévolue aux forces publiques mais il existe des exceptions. Le contrôle d’identité est une ingérence dans les libertés fondamentales et on ne peut pas prévoir sans justification raisonnable et sans proportionnalité, on ne peut pas autoriser n’importe qui à contrôler.”
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Limiter le contrôle à des cas précis
Pour la Ligue des droits humains, il est donc plus prudent pour les autorités de prendre le temps de la réflexion et de la justification. Evidemment, il est déjà permis pour un patron d’un établissement horeca ou de boites de nuit de demander la carte d’identité pour vérifier si la personne n’est pas mineure d’âge. Cependant, il ne peut pas l’exiger mais peut refuser ensuite l’entrée ou de servir de l’alcool.
Pour la Ligue des droits humains, il faut que la demande soit limitée à des cas précis et à une catégorie précise. Or, pour le domaine culturel, interdire l’accès est contrairement aux droits humains car la culture fait partie des droits fondamentaux. Et puis, cela pose aussi la question de la discrimination des personnes qui ne seraient pas en ordre administrativement et pourraient donc avoir peur de devoir présenter une preuve de leur identité.
Face à ces arguments, Manuel Lambert n’exclut pas d’éventuels recours comme la Ligue des droits humains l’avait fait pour les mesures corona prises en urgence par le fédéral. “Il y a des questions juridiques épineuses qui se posent et aussi des questions de société. On est face à quelque chose de très sensibles, à savoir les données de santé. On parle d’une forme de privatisation du contrôle. Cela doit être bien justifié et strictement limité.”
En attendant, l’accord de coopération est discuté en commission santé au parlement bruxellois ce mardi midi. Des modifications peuvent encore y être apportées et il devrait passer au vote des députés jeudi matin en séance plénière.
■ Interview de Manuel Lambert, conseiller juridique à la Ligue des droits humains par Vanessa Lhuillier