Le CSA justifie officiellement sa reprise en main de RTL

Après avoir refusé de communiquer officiellement, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) le confirme: oui, il va bien traiter lui-même les prochaines plaintes qu’il recevra contre RTL Belgium. Cette décision “fait suite à plusieurs monitorings des chaînes de RTL Belgium et à une analyse de leurs critères de rattachement à la Belgique plutôt qu’au Luxembourg”, justifie-t-il ce jeudi. Depuis 2005, RTL Belgium considère que ses chaînes télévisées (RTL-TVI, Club RTL et la plus récente Plug RTL) sont éditées depuis le siège de sa maison-mère luxembourgeoise, et que le CSA de la Fédération Wallonie-Bruxelles n’a donc aucune autorité à leur égard. Le CSA a toujours contesté la réalité de cette posture juridique. Mais, en 2009, le Conseil d’Etat a jugé qu’il ne lui appartenait pas de rejeter la compétence du Luxembourg à l’occasion du traitement d’une plainte. A la suite de cet arrêt, le CSA avait accepté de transférer systématiquement au Luxembourg toutes les plaintes concernant RTL Belgium.
Jeudi dernier, le Collège d’autorisation et de contrôle, son organe décisionnel, a cependant décidé de faire marche arrière: le CSA traitera à nouveau lui-même ces plaintes, quitte à entamer une nouvelle bataille en justice. L’arrêt du Conseil d’Etat de 2009 ne s’est pas prononcé sur le fond du litige, soutient-il. Et quand il a sollicité la Cour de justice de l’Union européenne, celle-ci lui a rétorqué qu’il n’avait pas le pouvoir de la saisir.
Ce revirement est justifié par plusieurs monitorings, au cours desquels les services du CSA ont repéré de potentielles infractions tant aux règles harmonisées européennes qu’au droit plus strict de la Fédération Wallonie-Bruxelles, explique-t-il. Il s’agit notamment des règles relatives au téléachat, au placement de produit et au publireportage, à la signalétique pour protéger les mineurs et aux quotas de diffusion d’oeuvres européennes.
De plus, les services du CSA sont dans l’impossibilité de vérifier si RTL investit dans la production audiovisuelle locale, ce que les éditeurs régulés en Belgique francophone sont obligés de faire.
La totalité des plaintes relatives à RTL Belgium transite par le CSA. Les transmettre à l’Alia, son homologue luxembourgeois, “contredit la perception par le public de l’organe régulateur qu’il estime légitime” et est “source d’incompréhension”, ajoute l’autorité administrative indépendante.
Plus largement, la fuite du plus grand opérateur privé actif sur son territoire de régulation cumulée au débordement des chaînes françaises limite son contrôle à des chaînes qui captent ensemble à peine 30% de l’audience. “L’impuissance du régulateur signifie l’impuissance du législateur lui-même, puisque les règles qu’il adopte ne s’appliquent pas à l’acteur télévisuel le plus important en Fédération Wallonie-Bruxelles”, en déduit-il.
Cette situation engendre un désavantage concurrentiel pour ceux qui respectent les règles plus strictes de la Fédération, les incite à contourner ces règles ou à se délocaliser et, enfin, remet en cause la légitimité du régulateur, conclut-il.

Partager l'article

06 juillet 2017 - 16h00