L'Allemagne se dote d'un président "anti-Trump"

L’Allemagne doit désigner dimanche comme chef d’Etat son ancien chef de la diplomatie Frank-Walter Steinmeier, déjà présenté par la presse comme un “anti-Trump” après avoir multiplié les critiques à l’égard du président américain. La fonction de président en Allemagne est surtout honorifique, le pouvoir restant entre les mains du chef du gouvernement et du Parlement. Mais elle a valeur d’autorité morale du pays.
Chevelure d’un blanc immaculé et lunettes cerclées lui donnant des allures d’éternel étudiant, le responsable social-démocrate doit être élu en milieu de journée par une assemblée de 1.260 grands électeurs issus des deux chambres du Parlement, celle des députés et celles des Etats-régions allemands.
A 61 ans, Frank-Walter Steinmeier est assuré de la victoire. Il est soutenu par son parti, le SPD, et par les démocrates-chrétiens de la chancelière Angela Merkel, alliés au sein de la coalition gouvernementale et qui disposent de la majorité des voix.
Celui qui fut ministre des Affaires étrangères un peu plus de sept ans au total (2005-2009, 2013-2017), jusqu’à la fin du mois dernier, mais aussi rival malheureux d’Angela Merkel à la chancellerie lors des élections de 2009, succèdera à la présidence à Joachim Gauck, un ancien pasteur dissident de la RDA communiste.
Connu pour son franc-parler à la tête de la diplomatie, Frank-Walter Steinmeier s’est distingué l’an dernier par ses saillies à l’encontre de Donald Trump.
Durant la campagne électorale américaine, il l’a qualifié de “prédicateur de haine”. “Je veux en tant que président être un contrepoids à la tendance sans limite à la simplification”, a-t-il promis cette semaine à Munich, “c’est le meilleur antidote aux populistes”.
“Steinmeier veut être un président anti-Trump”, résume le quotidien Berliner Morgenpost, alors que le chef de l’Etat américain a multiplié les attaques contre l’Allemagne. Une fois installé, Frank-Walter Steinmeier devrait toutefois baisser de ton. Un membre de son entourage reconnaît qu’il est sans doute allé “trop loin” l’an dernier.
Très apprécié en Europe de l’Ouest, ce proche de l’ex-chancelier Gerhard Schröder l’est moins en Europe de l’Est où ses positions jugées parfois pro-Moscou ont suscité l’inquiétude. Il avait critiqué l’an dernier le renforcement de l’Otan à la frontière avec la Russie en parlant de “bruits de bottes” inutiles.
Sur le plan intérieur, l’élection de Frank-Walter Steinmeier constitue un nouveau signe de l’affaiblissement politique d’Angela Merkel à moins de sept mois des élections législatives, cette fois face aux sociaux-démocrates.
“Du point de vue des sociaux-démocrates, l’élection de Steinmeier est le prélude à quelque chose de beaucoup plus important: une victoire au scrutin de septembre contre Merkel” qui semblait il y a encore peu “impossible”, juge Michael Bröning, politologue à la Fondation Friedrich Ebert, proche du SPD.

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12 février 2017 - 05h40