Ventilation des classes : des écoles bruxelloises commencent à s’équiper de capteurs de CO2
L’aération des espaces clos, notamment les locaux scolaires, est l’une des clés pour combattre la propagation du coronavirus dans les collectivités. Les capteurs de CO2 constituent à cet égard un bon outil de prévention et de sensibilisation, affirment depuis de longs mois plusieurs experts en santé. Ces équipements ne sont pas imposés en Fédération Wallonie-Bruxelles, mais les écoles de la capitale s’équipent petit à petit. Bruxelles Environnement met à leur disposition 300 mesureurs de qualité de l’air.
La ventilation intérieure est bien l’une des mesures clés pour lutter contre la propagation du virus et diminuer les risques de contamination au sein des collectivités. Tous les acteurs de l’enseignement en sont bien conscients. L’aération dans les classes est largement encouragée, pour garantir le renouvellement de l’air. Mais elle pourrait commencer à se réduire avec l’arrivée de l’automne, puis de l’hiver. Ouvrir les fenêtres régulièrement devient plus difficiles lorsque les températures sont plus fraîches.
Des capteurs de CO2 pour quoi faire ?
Les études ont en effet montré que lorsque des personnes rassemblées dans une pièce exercent une activité, elles produisent du CO2. Plus le nombre de personnes présentes et actives est important, plus la concentration en CO2 augmentera. Et nécessitera aération ou ventilation. Il est recommandé de limiter la concentration de CO2 à 900 ppm (parties par millions – unité de mesures pour calculer le taux de pollution dans l’air). C’est pourquoi plusieurs experts, comme les infectiologues Leila Belkhir, Nathan Clumeck ou encore Nicolas Dauby, recommandent l’installation dans les classes de capteur de CO2. Ces dispositifs permettent de mesurer les concentrations de CO2 dans une pièce. Interviewée récemment sur les antennes de la RTBF, Leila Belkhir insistait sur le taux de positivité élevé dans les écoles. Elle s’étonnait, entre autres, de ne pas voir de capteurs de CO2 dans les classes. L’infectiologue plaidait pour l’installation dans les écoles de ce type d’outil, bien utile pour contrôler l’épidémie, surtout à l’approche de l’hiver.
La Fédération Wallonie-Bruxelles a choisi de ne pas les imposer, suivant les recommandations de la Task Force Ventilation. Dans sa circulaire du 30 avril dernier, concernant l’aération et la ventilation des locaux pour agir contre la propagation du virus, la ministre de l’Education, Caroline Désir (PS), insistait sur les bonnes pratiques en matière d’aération, recommandant l’ouverture régulière des fenêtres, et de manière permanente dans la mesure du possible. Le document précise que les capteurs de CO2 « sont certes de bons outils de mesure de la qualité de l’air, mais ils ne devraient pas être imposés, le respect des consignes de ventilation permettant manifestement de respecter le taux de 900 ppm. » Dans certains cas toutefois, lorsqu’une aération adéquate ne peut être assurée, « en l’absence d’un système de ventilation mécanique efficient, il est recommandé de contrôler les niveaux de CO2. », précise la circulaire, qui conseille de faire effectuer ces contrôles par les services de prévention et de protection (CPPT, SIPPT ou SEPPT). Les coûts générés par ces outils peuvent « être considérés comme une dépense éligible via les moyens budgétaires dégagés par le Gouvernement pour aider les PO à faire face aux surcoûts générés par la crise sanitaire. »
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L’installation de capteurs de CO2 dans les classes est-elle souhaitable ? Pour le médecin et spécialiste en maladies infectieuses au CHU Saint-Pierre, Nicolas Dauby, elle est nécessaire. « On sait très bien que le virus est présent dans l’air et que le renouvellement de l’air est essentiel pour faire baisser la présence du virus. C’est d’autant plus important à l’école, lieu qui concentre aussi des groupes de population non encore vaccinés, puisque les moins de 12 ans ne sont pas encore concernés, et ne portent en outre pas le masque. » Parmi les adolescents, beaucoup ne sont pas (encore) vaccinés non plus. « Or scientifiquement il a été prouvé que les enfants peuvent transmettre et peuvent être contaminés autant que les adultes, même s’ils sont moins souvent malades. » Alors que les fermetures de classes se multiplient, et que l’hiver se profile, avec une baisse des températures, un outil signalant à l’enseignant que la concentration de CO2 est trop importante, est indispensable. « Ce signal le poussera à ventiler et ouvrir les fenêtres. C’est un outil de sensibilisation. »
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Bruxelles s’équipe
Certains établissements évoquent le coût de ces équipements. Le prix d’un capteur de CO2 varie entre 30 euros et une centaine d’euros. Si chaque classe doit en acquérir, la facture peut grimper. Mais ce n’est pas forcément nécessaire. Par ailleurs, les pouvoirs publics proposent des mécanismes d’aide financière. Depuis le début de l’année scolaire, Bruxelles Environnement met à disposition des établissements qui le souhaitent des capteurs d’air sous forme de prêt. 334 sondes ont été commandées, à la demande du cabinet du ministre de l’Environnement et de la Santé, Alain Marin (Ecolo), et distribuées. 200 autres devraient suivre. C’est le projet Scol’Air. À terme, 1300 mesureurs seront disponibles, le but étant d’équiper le plus grand nombre d’écoles possibles des 800 sites scolaires de la région. « Actuellement un capteur est distribué par site scolaire qui le demande, un 2e capteur sera distribué aux plus grandes entités scolaires en fonction des disponibilités restantes. », indique Pascale Hourman, porte-parole de Bruxelles-Environnement. Le fonctionnement : les capteurs passent de classe en classe. Une fois que les principes d’aération sont acquis, que l’enseignant intègre dans quelle situation il est nécessaire de ventiler, il passe l’instrument à ses collègues.
Il semble que toutes les directions ne soient pas encore informées de l’existence de ce système de prêt, à en croire les quelques coups de sonde que nous avons effectués. Plusieurs directeurs nous ont dit ne pas être au courant et ne pas être en mesure d’investir. Reste que quelques 334 des 650 écoles de la région sont désormais équipées, 185 francophones, et 149 néerlandophones. Les équipes qui le souhaitent peuvent également bénéficier d’un accompagnement pédagogique sur la qualité de l’air. Budget de l’opération : 132.300– euros.
De son côté, la Ville de Bruxelles a équipé ses propres écoles fondamentales et secondaires, soit un peu moins de 70 établissements (francophones et néerlandophones).
S.R. – Photo : Bx1