Le Conseil d’État ne donne pas de sursis à Lime, qui assure être “pleinement engagé à revenir dans la Région”
La sélection par la Région bruxelloise de deux exploitants de trottinettes électriques en libre service, en décembre 2023 au terme d’un appel d’offres, était valide, a estimé implicitement le Conseil d’Etat, dans un arrêt rendu mardi, et cité mercredi par Bolt et Dott.
Les opérateurs Bolt et Dott avaient remporté le marché. Lime, qui avait introduit un nouveau recours en suspension, doit donc cesser ses activités sans délai, ont-ils plaidé. C’est aussi le point de vue de la ministre bruxelloise de la Mobilité en affaires courantes, Elke Van den Brandt (Groen). “Lime doit respecter la date d’expiration de sa licence“, a-t-elle commenté, après avoir pris connaissance de l’arrêt. Lime, de son côté réfute: “le Conseil d’Etat n’a pas rendu son verdict concernant l’action légale en cours et nous restons pleinement engagés à revenir dans la Région une fois que le Conseil d’État se sera prononcé sur la légalité de l’appel d’offres en matière de micro-mobilité.”
■ Explications de Romuald La Morté dans Bonjour Bruxelles
Ce dossier a été au centre de plusieurs recours devant les tribunaux et le Conseil d’Etat depuis la sélection par la Région bruxelloise, à la fin de l’année 2023, de Dott et Bolt comme exploitants de trottinettes électriques en libre service. Trois opérateurs de vélos électriques avaient également été désignés. Évincés du marché des trottinettes, VOI et Lime s’étaient tournées vers le tribunal des référés. En janvier 2024, celui-ci avait autorisé ces deux opérateurs à poursuivre leur activité jusqu’au terme de leur licence (ndlr: pour Lime jusqu’au 2 juillet 2025). Le Conseil d’Etat avait ensuite quant à lui suspendu la décision du gouvernement bruxellois en elle-même.
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À présent, il a refusé de donner suite à une demande de suspension du dispositif introduite par Lime jusqu’à ce que la haute instance se soit prononcée sur une demande d’annulation que l’opérateur a introduite, dans l’espoir de bénéficier d’un sursis. Pour Bolt, Dott (trottinettes) et VOI (vélos), la décision rendue mardi “confirme désormais, une bonne fois pour toutes, les résultats de cet appel d’offres… Lime doit immédiatement cesser ses activités à Bruxelles et retirer ses trottinettes et vélos. Nous attendons de la Région bruxelloise qu’elle prenne les mesures nécessaires pour faire appliquer cette décision sans délai. Il serait inacceptable que des opérateurs sans licence valide, ayant épuisé tous les recours, soient autorisés à encore opérer. Cela ouvrirait la porte au chaos…“, ont-ils fait valoir.
“Les trottinettes qui traînaient sur les trottoirs empêchaient les piétons et les personnes à mobilité réduite de se déplacer en toute sécurité et sans encombre dans la ville. C’est pourquoi nous avons mis en place des dropzones et limité le nombre d opérateurs” pour la sécurité et le confort de tous les usagers de la route, a expliqué quant à elle la ministre bruxelloise de la Mobilité, justifiant ainsi le dispositif adopté par la Région. D’après Mme Van den Brandt, le secteur lui-même demandait également un meilleur cadre. “Lime doit donc respecter la date d’expiration de sa licence. Nous continuons à travailler à l’amélioration de la situation sur le terrain“, a-t-elle encore dit.
Vers la fin du “chaos” ?
Les opérateurs sélectionnés insistent sur les efforts et investissements réalisés pour se conformer aux nouvelles exigences régionales, notamment en matière de sécurité, de technologie embarquée et de gestion du stationnement. “Se conformer au cadre établi par la Ville implique de réelles contraintes”, rappellent Bolt et Dott dans une déclaration commune. “Nous avons investi dans des dispositifs de stationnement plus efficaces, des patrouilles communes pour réduire l’encombrement, et des fonctionnalités de sécurité améliorées. Ces efforts ont un coût que seuls des opérateurs agréés peuvent assumer dans un cadre réglementé.”
“Il serait inacceptable que des opérateurs sans licence valide, ayant épuisé tous les recours, soient autorisés à continuer à occuper l’espace public”, affirment-ils.
Les entreprises pointent également du doigt Lime, qui aurait refusé de participer aux initiatives coordonnées de gestion du stationnement, à l’inverse de Dott et Bolt. Voi, autre acteur historique du marché, avait de son côté déjà retiré sa flotte de trottinettes avant la décision finale.
Une “suspension imposée” alors que “le Conseil d’État ne s’est pas prononcé sur la légalité de l’appel d’offres”
Lime de son côté conteste cette lecture et se dit résolu à revenir à Bruxelles après cete suspension imposée. “Le Conseil d’État ne s’est pas prononcé sur la légalité de l’appel d’offres concernant la micro-mobilité à Bruxelles”, réagit l’opérateur. “En réalité, le Conseil d’État a déjà constaté à plusieurs reprises que cet appel d’offres, ainsi que la législation sous-jacente, présentaient de graves irrégularités et devaient être considérés comme illégaux. Une décision finale dans cette affaire est toujours en attente.”
“Bien que Lime soit en position favorable pour remporter la procédure juridique en cours, la Région bruxelloise nous impose de suspendre temporairement notre service jusqu’au rendu de cette décision. Cette suspension a des conséquences graves pour les centaines de milliers d’utilisateurs de Lime à Bruxelles mais aussi pour les plus de 130 personnes employées directement ou indirectement. Elle expose également la Région à un risque financier considérable. Si Lime obtient gain de cause, la Région bruxelloise pourrait être redevable de plusieurs millions d’euros en indemnités. Malgré une connaissance claire de la situation juridique, le Ministère de la Mobilité a continuellement refusé d’accorder des mesures provisoires qui auraient permis à Lime de poursuivre ses opérations dans la Région en attendant le jugement final. La Ministre Van den Brandt choisit ainsi sciemment d’assumer le risque de verser de futures indemnités, risquant d’aggraver encore la pression sur le budget actuel de la Région. En conséquence, Lime est contraint de cesser ses services à Bruxelles de manière abrupte le 3 juillet.”
“Alors que Lime informe ses utilisateurs de la suspension temporaire de ses services à Bruxelles, nous restons pleinement engagés à revenir dans la Région une fois que le Conseil d’État se sera prononcé sur la légalité de l’appel d’offres en matière de micro-mobilité”, conclut Lime.
Avec Belga