Au moins 2000 Belges et Belgo-Marocains toujours bloqués au Maroc

Combien de Belges et Belgo-Marocains attendent toujours de pouvoir quitter le Maroc pour rentrer en Belgique? Selon la plateforme des “Belgo-Marocains bloqués au Maroc”, ils seraient encore au moins 3000. Le SPF Affaires étrangères avance le chiffre de 2000. En attendant, les rapatriements continuent. Un dernier avion atterrissait en début de semaine. Un autre partira vendredi. 

Souleiman a 17 ans. Depuis le début du confinement il vit chez une proche de sa famille. Sa maman est en effet bloquée au Maroc. Malade, sous certificat, elle a pourtant rentré un dossier, avant le 17 avril, demandant son rapatriement pour raison médicale, précisant que son fils, mineur, est seul en Belgique. En vain. Souleiman témoignait ce mercredi après-midi lors d’une rencontre-débat organisée à Molenbeek par la plateforme des “Belgo-Marocains bloqués au Maroc”. Un autre, père de famille, rapportait les difficultés vécues par son épouse enceinte de six mois et sa fille de deux ans, parties pour une visite familiale au début du mois de mars et toujours coincées sur place et sans la moindre information de l’ambassade, malgré un dossier dûment rempli et déposé. “Nous nous sentons abandonnés.”, concluait-il.

La plateforme des “Belgo-Marocains bloqués au Maroc” affirme avoir recueilli de nombreux témoignages similaires. 3000 Belges et Belgo-Marocains seraient toujours coincés sur place, selon des chiffres recueillis par le député fédéral Ecolo Samuel Cogolati, à l’occasion d’une interpellation du ministre Philippe Goffin (MR) en commission Affaires étrangères de la Chambre. Parmi eux, de nombreuses personnes en situations d’urgence, toujours sur le carreau, et sans aucune réponse des autorités, dénonce-t-il. La plateforme qualifie de fiasco la gestion, à ses yeux calamiteuse, du dossier par l’administration des Affaires étrangères. De nombreux pays, comme la France, le Royaume Uni ou le Canada ont fait beaucoup mieux, et réussi à rapatrier un nombre bien plus élevé de leurs ressortissants, ajoute Samuel Cogolati.

3000 Belges rapatriés

Le SPF Affaires étrangères rejette les accusation. Contacté par téléphone, son porte-parle, Arnaud Gaspard rappelle qu’après une première vague de rapatriements, au mois de mars (7 vols, 1200 Belges rapatriés), le Maroc a pris des mesures destinées à endiguer la crise du Coronavirus. Parmi elles, l’interdiction pour tous les Marocains, y-compris les binationaux, considérés par le Maroc comme des nationaux, de quitter le pays. Conséquences : des situations dramatiques, de familles déchirées, de mineurs séparés de leurs parents

Des négociations ont alors permis d’aboutir à un accord, début avril, pour débloquer la situation. Il prévoyait la possibilité de procéder au rapatriement des Belgo-Marocains, pour raisons humanitaires, sur base de trois critères : sanitaire,  familial, professionnel. Les personnes entrant dans ces conditions avaient jusqu’au 17 avril pour introduire un dossier, assorti des documents nécessaires (certificat médical, composition de famille, etc). Selon  Arnaud Gaspard, environ 5000 demandes ont été introduites, 3400 concernaient des Belges, et 1400 entraient dans les conditions. A cet égard, il précise que le terme Belges comprend également les binationaux, la Belgique ne faisant pas de distinction entre Belges et Belga-Marocains, insiste-t-il, considérant ces derniers comme des nationaux. Il rejette dès lors les accusations portées par certains de traitement différencié entre  Belges et Belgo-Marocains.

1400 personnes ont ainsi été rapatriées depuis, répartis en cinq vols. Le dernier est arrivé ce mercredi matin. 400 autres le seront encore vendredi, poursuit Arnaud Gaspard. Ce qui portera à 1800 le nombre de rapatriés de cette seconde vague. Soit 3000 en tout. Selon les calculs du SPF, il reste probablement encore au moins 2000 Belges sur place, “auxquels peuvent se rajouter des personnes qui ne se sont pas manifestées. “, précise Arnaud Gaspard, qui conteste toutefois le chiffre de 3000.

Quelles solutions?

Il y a urgence à rapatrier tout le monde, c’est un droit fondamental.”, soutient le député Samuel Cogolati. Et d’appeler la Belgique à mettre en place des rapatriements en partenariat avec d’autres pays européens concernés par la même problématique. L’avocat Georges-Henri Beauthier, conseil de certains des membres de la platerforme, dénonce une situation scandaleuse. Il appelle à la mobilisation et invite ses clients à demander à être reçus par le ministre Goffin. “S’il n’accepte pas, nous demanderons l’arbitrage des tribunaux.” De son côté Arnaud Gaspard rappelle que le blocage vient du Maroc. Mais il table sur une amélioration de la situation sanitaire et espère que les règles imposées par le Maroc seront petit à petit levées, maintenant que les mesures liés au Covid-19 commencent à être assouplies.

Sabine Ringelheim