Que faire du “balcon de Hitler”? L’Autriche à la recherche d’idées

Soixante-et-onze ans après son annexion par l’Allemagne nazie, l’Autriche lance un concours d’idées sur le devenir du fameux balcon du palais impérial de Vienne d’où Adolf Hitler avait célébré l’Anschluss le 15 mars 1938 devant une foule en liesse. Surplombant une place des Héros noire de monde, le dictateur nazi avait depuis ce balcon proclamé la dissolution de l’Etat autrichien et son rattachement au Troisième Reich. “C’est un des lieux les plus discutés d’Autriche, mais aussi un de ceux qui ont le plus longtemps été tabous”, relève la Maison de l’histoire d’Autriche (HDGÖ), qui a lancé jeudi un appel à idées quant à l'”utilisation” future du lieu.

Les personnes intéressées sont invitées à transmettre par internet “photos, esquisses, collages ou montages”. Les meilleurs d’entre eux feront l’objet d’une exposition à l’automne.

Parmi les premières propositions visibles sur le site heldenplatz.hdgoe.at: un photomontage incorporant un gigantesque miroir destiné à souligner que “l’attention ne doit pas porter sur une personne en particulier, mais sur le fait que les masses sont prêtes à s’approprier des idées inhumaines”.

Ce balcon -en réalité une vaste terrasse flanquée de colonnes néoclassiques- reste “comme un doigt dans une plaie toujours ouverte: le fait que l’Autriche a reconnu beaucoup trop tard sa responsabilité dans les crimes nazis”, estime le HDGÖ.

Le pays, dont une grande partie de la population avait réservé à Hitler un accueil triomphal, avait fourni un important contingent de cadres et de soldats au régime nazi et participé activement à l’Holocauste.

L’Autriche a cependant longtemps refoulé ce passé en se présentant comme “la première victime du nazisme”. Le sujet n’était arrivé sur le devant de la scène qu’au milieu des années 1980, lors de la candidature à la présidence de la République de Kurt Waldheim, un ancien officier de la Wehrmacht.

A l’automne, le vice-chancelier d’extrême droite Heinz-Christian Strache avait encore créé la polémique en inaugurant un monument en l’honneur des femmes qui avaient déblayé les décombres des bombardements de 1945, un geste interprété comme une réhabilitation masquée de sympathisantes nazies.