Les stars noires et la diversité à l'honneur du Festival du Film de Londres

Le Festival du Film de Londres (LFF), qui s’est ouvert mercredi soir, met à l’honneur pour sa 60e édition les acteurs et cinéastes noirs, faisant écho à la polémique sur le manque de diversité à Hollywood. “Nous voulions vraiment attirer l’attention sur les stars noires”, a déclaré à l’AFP la directrice du festival Clare Stewart, saluant “le dynamisme, la diversité, l’urgence, les défis et le divertissement” des films des raconteurs d’histoire noirs présentés cette année.
Parmi les 245 films présentés, le festival s’est ouvert avec “A United Kingdom”, de la réalisatrice britannique d’origine ghanéenne Amma Asante, qui plonge dans l’histoire d’amour interraciale entre le prince du Botswana Seretse Khama (David Oyelowo) et une anglaise blanche, Ruth Williams (Rosamund Pike), dont l’union fit scandale et bouleversa l’histoire du pays africain, territoire alors appelé Bechuanaland et sous protectorat de l’empire britannique.
Pour l’actrice Rosamund Pike, ce qui aiderait à ce qu’il y ait davantage de diversité sur les écrans du monde serait de “voir ce film comme une simple histoire d’amour sans automatiquement le comparer à +12 Years of Slave+ ou +Selma+, des films qui n’ont rien à voir” avec cette romance historique outre qu’ils sont interprétés et réalisés par des personnes de couleur.
“Mon espoir est qu’en voyant ce film, les spectateurs se verront eux-mêmes en Ruth et Seretse, ils verront l’histoire de ce pays”, le Royaume-Uni et l’histoire du Botswana, toutes deux étroitement liées, “et verront pourquoi nous sommes fiers de nous présenter comme des Britanniques et comme des Africains”, a déclaré en conférence de presse David Oyelowo, acteur et co-producteur du film qui a eu les honneurs du tapis rouge à Leicester Square, dans le centre de Londres.

Pour Amma Asante, la solution est “multiniveau. Cela vient du public, des producteurs, de nous les cinéastes. C’est énorme et en même temps c’est juste (…) raconter plus d’histoires qui sont pertinentes pour le monde et comportent des personnages légèrement différents de ceux que nous sommes habitués à voir”.
Autre histoire vraie à l’honneur du LFF, la biographie réalisée par l’Indienne Mira Nair, qui retrace l’ascension de la championne d’échec ougandaise Phiona Mutesi.
“Queen of Katwe” (“La reine de Katwe”, tiré du nom du bidonville où l’héroïne a grandi) raconte comment la jeune Ougandaise est parvenue à quitter son bidonville pour se rendre au championnat mondial d’échecs, aidée de son entraîneur, interprété par David Oyelowo, et de sa mère incarnée par Lupita Nyong’o, oscar du meilleur second rôle pour “12 Years of Slave”.
Outre ces fictions inspirées d’histoires vraies, la première européenne du documentaire de la réalisatrice noire-américaine Ava Duvernay, “The 13Th”, qui fait référence à l’amendement de la constitution américain qui a aboli l’esclavage, montre les inégalités raciales aux Etats-Unis.
Il se penche sur les raisons qui ont fait des Etats-Unis le pays au taux d’incarcération le plus élevé au monde et sur la naissance du mouvement “Black Lives Matter” (les vies des noirs comptent: NDLR) pour dénoncer les violences policières envers les Noirs.
Cette réalisatrice à l’origine du biopic “Selma” sur Martin Luther King a été au coeur de la polémique autour du manque de diversité à Hollywood et aux Oscars ces deux dernières années. Aucun acteur noir ne figurait parmi les finalistes aux Oscars et “Selma” n’a concouru que dans la catégorie meilleur film en 2015 malgré les critiques dithyrambiques dont il bénéficiait.
A noter également “Moonlight” de Barry Jenkins, qui raconte l’histoire d’un jeune garçon vivant à Miami dans un milieu de toxicomanes et qui découvre son homosexualité.
“Juste après le festival, le British Film Institute (BFI) va lancer la saison la plus ambitieuse au Royaume-Uni de films et programmes télévisés destinés à célébrer la polyvalence et la puissance des acteurs noirs, des stars noires”, a affirmé Clare Stewart, soulignant qu’en l’absence de changement la question de la diversité dans le cinéma continuera à se poser.

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06 octobre 2016 - 07h15