Les financements troubles du "Loup de Wall Street"

Un film avec Leonardo di Caprio sur une escroquerie boursière financé par un détournement de fonds publics: les accusations des autorités américaines visant “Le Loup de Wall Street” n’ont rien à envier à un véritable scénario hollywoodien. Sorti en 2013, le film de Martin Scorsese est apparu en marge d’une offensive judiciaire américaine lancée mercredi pour récupérer un milliard de dollars d’actifs achetés avec de l’argent détourné du fonds souverain malaisien 1MDB. Succès planétaire avec 392 millions de recettes mondiales, ce long-métrage a bénéficié de financements de 100 millions de dollars illégalement siphonnés via des montages complexes dans les paradis fiscaux, selon les autorités américaines. “La population malaisienne n’a pas perçu un centime des bénéfices réalisés par ce film. (…) Cet argent est allé dans les poches des parents et associés des responsables corrompus de 1MDB”, a déclaré la ministre adjointe de la Justice, Leslie Caldwell, en annonçant la saisie des futures recettes générées par le film.

Au centre des accusations américaines figure Riza Aziz le beau-fils du Premier ministre malaisien, qui a co-fondé en 2010 le studio de cinéma hollywoodien Red Granite ayant produit “Le Loup de Wall Street”. Le film raconte l’histoire vraie du trader new-yorkais Jordan Belfort, qui a fait fortune en escroquant ses clients. Son financement proviendrait toutefois d’un détournement de fonds massif portant sur 1,4 milliard de dollars, qui avaient été levés pour le compte de 1MDB via des émissions d’obligations en 2012, selon la plainte américaine. Une partie de cette somme –237 millions de dollars– a été placée sur un compte suisse ouvert au nom d’une société immatriculée dans les Iles Vierges britanniques avant d’être utilisée par Riza Aziz pour acheter de luxueuses propriétés et fonder son studio de cinéma, affirment les autorités. “Red Granite Pictures et sa production +Le Loup de Wall Street+ ont été financés avec de l’argent qu’on peut rattacher aux produits des émissions obligataires de 2012”, assure la plainte américaine.

Selon la bible de l’industrie du cinéma américain The Hollywood Reporter, les 100 millions de Red Granite ont été suffisants pour “financer intégralement” le film. Récompensé en 2014 d’un Golden Globe pour son interprétation dans “Le Loup de Wall Street”, Leonardo di Caprio lui-même avait rendu hommage à Red Granite en remerciant l’ensemble de “l’équipe de production”, dont Riza Aziz, pour avoir pris des “risques sur ce film”. Red Granite a nié toute malversation quand les premières rumeurs d’une enquête fédérale américaine sur le fonds malaisien ont commencé à circuler. Le studio a six longs-métrages à son actif dont “Les Brasiers de la colère” (2013) avec Christian Bale et “Daddy’s Home” (2015) avec Mark Wahlberg et Will Ferrell.
Contacté par l’AFP, Red Granite n’a pas fait de commentaires dans l’immédiat.