"Lea", l'histoire vraie d'une mère courage qui défia la mafia

Mariée à un mafieux calabrais, une femme se bat pour que sa fille grandisse loin des crimes et de la violence. Avec “Lea”, Marco Tullio Giordana livre un magnifique portrait de femme tiré d’un histoire vraie qui avait bouleversé l’Italie. “L’exemple de Lea est intéressant au-delà du contexte mafieux et de l’Italie. Derrière son cas, il y a la dénonciation des violences faites aux femmes”, explique à l’AFP Marco Tullio Giordana, 65 ans.

Lea, c’est Lea Garofalo, née en 1975 dans une famille liée à la ‘ndrangheta, la mafia calabraise. Elle est magistralement incarnée par l’actrice Vanessa Scalera.

Après avoir vu son père et son frère assassinés, la jeune femme décide de quitter son mari, Carlo Cosco, baron d’un clan mafieux, et de coopérer avec la justice sous le régime de la protection des témoins.

Ce choix, c’est avant tout pour sa fille Denise qu’elle le fait. Pour lui éviter de vivre dans la terreur des coups de feu et des irruptions nocturnes des carabiniers qui scandent leur existence.

Mais échapper à “la pieuvre” n’est pas chose facile. Malgré les changements d’identité et les déménagements successifs d’un bout à l’autre de la Péninsule, Lea finit par être retrouvée par les sbires de son conjoint.

D’autant que sa protection policière lui a été retirée, la justice ayant jugé sa contribution à la lutte anti-mafia insuffisante en termes de résultats.

Un soir de novembre 2009, alors qu’elle marche dans une rue de Milan avec Denise, elle est enlevée puis assassinée, à 36 ans. Son corps sera ensuite brûlé pendant trois jours dans un entrepôt de la région de Monza.

“Elle est partie en Australie, se dorer au soleil”, tente de faire croire son père à Denise, alors âgée de 17 ans.

“Les derniers moments de la vie de Lea, avant son enlèvement, avaient été saisis par des caméras de surveillance. Les images avaient été diffusées par les chaînes de télévision. Elles sont très fortes et n’avaient fait qu’accroître l’impact de cette histoire sur l’opinion publique”, souligne Marco Tullio Giordana.

Le cinéaste, né à Milan, explique avoir voulu transposer les faits à l’écran le plus fidèlement possible, “même si certains sont tellement incroyables qu’on pourrait croire qu’il s’agit de fiction”, admet-il.

Son film revient aussi sur le long procès des assassins de Lea, au premier rang desquels figurait son mari. Il fut très suivi en Italie et s’acheva, en 2014, par la condamnation de Carlo Cosco et de quatre de ses complices à la prison à vie. Le fiancé de Denise, également dans le box, écopa lui de 25 ans de réclusion.

Parmi les parties civiles, Denise (Linda Caridi) témoigna contre son père, racontant courageusement aux juges l’enfer qu’elle et sa mère avaient vécu.

La jeune fille vit désormais sous haute protection et a changé d’identité.

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08 juillet 2016 - 08h20