France: le "droit à la déconnexion" professionnelle prend force de loi

La France appliquera à partir du 1er janvier une loi sur le “droit à la déconnexion” destinée à encadrer dans les entreprises l’usage des outils numériques de connexion à distance, générant des messages professionnels en dehors du temps légal de travail. Ce droit nouveau a été inscrit dans une loi réformant le droit du travail, adoptée au forceps cet été, et dont l’essentiel entrera en vigueur au Nouvel An. Le texte impose notamment aux entreprises de plus de 50 salariés d’engager des négociations pour assurer le respect des temps de repos et la vie personnelle du salarié connecté. A défaut d’accord, l’employeur devra élaborer une charte définissant les modalités de l’exercice du droit à la déconnexion. La loi ne prévoit pas de sanction, en cas d’absence de résultat, ce qui fait craindre à certains qu’elle n’ait qu’un impact limité.

Il s’agit d’une première au niveau législatif, même si des initiatives ont déjà été prises par plusieurs entreprises soucieuses de préserver la limite entre la vie privée et la vie professionnelle de leurs salariés et protéger leur santé, certains spécialistes estimant que la contrainte de disponibilité permanente et l’exigence de réactivité induite par la connexion à distance favorise le stress, jusqu’au burn-out (épuisement professionnel). En Allemagne, les groupes automobiles Volkswagen et Daimler, en France le groupe nucléaire Areva ou bancaire Axa ont déjà pris des mesures, comme l’interruption des messageries le soir et le week-end ou la destruction des mails quand les salariés sont en vacances.

Selon une étude réalisée en septembre, plus d’un tiers des actifs français utilisent chaque jour leurs outils numériques professionnels en dehors du temps de travail et 62% en réclament une régulation, dont une très large majorité de cadres. La souplesse horaire offerte par le numérique reste cependant appréciée par 40% des actifs, particulièrement les chefs d’entreprise (69%) et les cadres (53%), selon cette étude réalisée par le cabinet Eléas, spécialisé dans la prévention des risques psycho-sociaux.

Pour Xavier Zunigo, sociologue du travail, il “y a une vraie attente pour que les entreprises se saisissent du droit à la déconnexion dans sa dimension protectrice, lorsque le numérique devient une menace sur l’existence professionnelle et un vecteur de stress”. “Pour autant, les salariés ne veulent pas perdre l’autonomie et la souplesse que leur permettent les outils numériques, puissants vecteurs de transformation vécus très positivement par une partie de la population”, dit-il.